6 : Jungkook

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Les premiers rayons du Soleil viennent projeter des éclats de lumière dorée dans la pièce encore sombre. C'est comme un spectacle d'ombres chinoises qui prend naissance sur les murs de la chambre. Je regarde l'obscurité se consumer peu à peu, pour laisser place au jour. 

Jimin est allongé dans son lit, sur le côté et encore endormi. En même temps, il a eu du mal à fermer l'oeil après que je sois venu m'incruster dans ses rêves. Ce que je comprends. J'aurais sûrement fui, à sa place, dans l'espoir de quitter ce parc d'attraction terrifiant. Moi, je suis prisonnier de cette quatrième dimension. Lui peut y aller et venir à sa guise. Mais ça, il ne l'a pas encore compris.  

Ses mèches de cheveux en bataille sont illuminées par le Soleil levant. Son visage n'est jamais aussi serein que quand il dort. Son nez frémit légèrement, peut-être qu'il rêve encore. Cette fois-ci je ne viendrai pas le déranger. Jimin serre son oreiller contre lui, instinctivement. Son tee-shirt et ses draps sont colorés de nuances de blanc. Ainsi entouré de ces étoffes épurées, il ressemble à un ange. 

Je contemple la scène comme on admire un tableau. Si l'on prend le temps d'observer ces petits moments de la vie quotidienne, on prend conscience de toute la dimension artistique qu'ils renferment. Mais nous oublions de regarder les gens, les choses... nous préférons consulter les images toutes faites que nous nous sommes créées. 

Je me demande qui est réellement Jimin. Qui est ce jeune homme assoupi près de moi, l'air si calme alors que son coeur est sûrement animé d'une tempête invisible ? Qui peut prétendre être à sa place et avoir saisi le sens de la vie ? N'est-ce pas finalement une quête de tous les instants, nous plongeant dans un voyage sans fin ?

Jimin commence à s'agiter et à marmonner dans son sommeil, me tirant hors de mes songes. S'il savait que je suis là, assis sur sa chaise, à le regarder... le pauvre ! Ses doigts se resserrent sur l'oreiller, faisant ressortir les veines de ses avant-bras. Je déglutis en me remémorant le contact physique que nous avons eu en rêve. Je ne pensais pas que c'était possible qu'un vivant me touche ! 

Quand sa main tiède s'est posée sur mon poignet, c'était comme si je recevais une décharge électrique. J'avais oublié à quel point il est bon de sentir la chaleur humaine contre son propre corps. À quel point un index peut hérisser les cellules, dérivant lentement sur les courbes d'une épaule. À quel point la douceur d'une caresse peut vriller un estomac...

C'est là que Jimin ouvre les yeux. Pendant quelques secondes, je crois qu'il me regarde et je me sens pris sur le fait. Comme si c'était mal de songer à la tendresse que peuvent partager deux personnes. Puis je comprends, déçu, que le garçon ne me voit toujours pas. Son regard est perdu dans le vague, il cligne des yeux, tentant de chasser les dernières limbes du sommeil. 

J'aimerais tellement lui parler. De tout et de rien. Ne serait-ce que lui dire bonjour... ma solitude me pèse. C'est comme si l'on m'avait volé la voix. Je pourrais crier tant que je peux, personne ne m'entendrait.

Peut-être que Jimin, lui, voudra m'écouter. Si sa peur ne m'empêche pas de le visiter en rêve. Il est parfois dur de rentrer en contact avec ceux qui ne veulent pas de leur don. 

Jimin se retourne sur le dos et s'étire avec un soupir un peu gémissant. Il a l'air très motivé pour se lever. Je crois que le réveil est le pire moment de la journée. Quand on se rappelle de tout. Quand on doit se revêtir de ce masque qui nous tient compagnie en société. Quand on doit une nouvelle fois faire face aux agressions extérieures, mais aussi à nos propres démons. 

Je ne peux m'empêcher d'embrasser du regard sa silhouette se courbant sur les draps. Ses côtes ressortent sous son tee-shirt et il rejette légèrement la tête en arrière, les yeux mi-clos. Son corps se détend avec un nouveau soupir affligé. Le garçon reste encore quelques secondes allongé, en étoile, l'air nullement décidé à faire quoi que ce soit. 

LE MESSAGER (Jikook)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant