Tue-moi lentement

Chapitre IV

             

                  On se ferme à tout pour que rien ne transpire,

                  On s'emmure dans des vêtements larges

                   Pour qu'il ne nous trouve plus,

                  Mais on pleure au coucher,

                Amour où es-tu ? ...

                (Poème autodidacte)

              

                  Mia atterrit à l'aéroport de Pearson plus tard dans la journée, ne restait plus qu'à faire la route jusque chez les Gibson qui devaient l'accueillir. Il était à peine 6 heures du matin lorsqu'elle prit l'avion de l'aéroport d'Heathrow et elle arriverait avec plusieurs heures d'avance avec le décalage horaire. Il ne serait probablement que onze heures du matin lorsqu'elle débarquerait au Canada qu'elle définissait comme l'El Dorado des nouveaux diplômés. Une ville melting-pot ou plus de la moitié des habitants étaient nés ailleurs qu'ici. Du lac Ontario au lac Érié, des châteaux modernes aux constructions les plus récentes, elle voulait tout voir, tout visiter.

                  La jeune anglaise s'assit quelques minutes après avoir récupéré ses bagages. Elle souffla fort en atterrissant dans cette salle d'attente bondée de monde. Elle s'immobilisa en entendant enfin une famille qui parlait la langue de chez elle avant qu'ils ne disparaissent vers la sortie en voiture de location. Il faisait jour, elle aurait le temps de faire pas mal de choses malgré le trajet. Le voyage avait été épuisant, elle avait effectué près d'une demi-journée de vol pour arriver et la fatigue commençait à la gagner. Qu'importe, elle se leva de son siège. Elle devait se présenter chez ses employeurs avant la fin de la journée. Il lui fallut quelques minutes pour trouver sa route dans cette aéroport géant et cette salle d'attente d'où partait les taxis. Elle eut pourtant du mal à en trouver un qui veuille parcourir ce trajet d'une demi-heure. Elle patienta jusqu'à trouver cet homme enturbanné qui s'adressa à elle avec un large sourire. Elle s'engouffra dans la voiture, soulagée d'avoir enfin dénicher le bienfaiteur qui la conduirait à destination.

                    La nouvelle arrivante ouvrit grands les yeux en parcourant ses rues alambiquées qui passaient près du lac Ontario pour revenir à Grandview. Ces paysages étaient bien différents de ceux qu'elle connaissait et les structures de bâtiments étaient plus élevées. Elle mit quelques minutes avant de se repérer et trouver la bonne route jusque chez ses logeurs et surtout trouver la maison qui correspondait à la photo qu'elle en avait. Il fallait dire que dans ce genre de quartier les maisons se ressemblaient toutes. Heureusement, elle était tombée sur un chauffeur sympathique qui l'avait aidée à se repérer.

                    Depuis ce soir terrible ou rien ne compta plus, elle avait passé en revue plusieurs sites, rempilé des centaines d'infos, accumulé les idées pour enfin trouver cette formation qui lui permettrait de partir. Laisser tomber des amis qui comptaient sur elle avait été une solution extrême qui l'insupportait. Seulement, plus elle se forçait à faire les choses bien, plus elle se sentait triste, le corps en charpie, anéantie par les mâchoires asserrées d'un cerbère affamé.

                   Elle chercha et chercha encore quoi faire pour ne plus être là, ne plus être entourée de ces murs, de ce parfum persistant sur les draps de son lit, de ces visions qui ne s'évanouissaient pas et en même temps de la peur de faire du mal à sa plus grande amie.
                   Comment faire pour la regarder en face ? C'était simple, elle ne le faisait plus. Elle décryptait le plafond ou les rainures du plancher à chaque fois que Mégane lui adressait la parole. Elle eut peur que la brunette ne puisse lire dans son cœur rien qu'en la regardant et qu'elle ne déchiffre quoi que ce soit de toute cette courte aventure. Au mieux, elle protègerait son père et lui pardonnerai. Au pire, elle les renierait tous les deux. Et c'était plus dans le caractère de Mégane d'être inflexible.