4- Enlèvement

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Helen était nue comme un ver.

Calliopé n'était pas vraiment du matin. Pas avant une douche, une cigarette et un café, pas forcément dans cet ordre-là. Et encore moins après avoir quelque peu abusé de la boisson la veille. Elle regarda donc son amie qui la fixait avec elle aussi une certaine appréhension un certain temps avant que ses neurones ne se mettent en marche et qu'elle comprenne ce qu'elle voyait.

La Roumaine adopta brutalement un rouge pivoine parfait.  Mais elle ne pouvait détacher son regard de ce qui la fascinait le plus. Tout le dos d'Helen était tatoué, avec un art prodigieux. Calliopé n'eut aucun mal à reconnaitre un irezumi, un  tatouage traditionnel japonais. Il représentait un complexe dragon oriental,  qui courait de la base de sa nuque à la descente de ses reins, débordant sur sa cuisse droite. Voir un tel travail en photo était une chose ; l'admirer sur la peau pâle de son amie en était une autre. Elle restait figée, en proie à une fascination  hypnotique doublée d'une profonde charge érotique. Elle en oublia le second détail qui l'instant d'avant l'avait tant surprise.

C'est la prise de conscience qu'admirer le corps nu d'Helen avait sur elle des effets pas prévus du tout selon ses normes personnelles qui la fit rougir derechef, et se tourner brusquement, en bafouillant :

— Heuu... désolée de... Je ne savais pas que... heuu...  Je vais aller m'habiller, hein, le temps que tu...

Helen se retint de rire, mais pas de pouffer, le regard attendri, après ce bref moment de surprise commune. Elle avait capté et adoré ce qu'avait fugacement montré le regard de sa protégée, même si elle se reprochait quelque peu de l'avoir mis mal à l'aise. Mais elle ne le regrettait guère finalement. Elle resta de dos, laissant Calliopé filer à toutes jambes.

— Je suis navrée ! Je viens de recevoir un appel téléphonique et j'ai omis de tenir compte du risque que cela vous réveille. J'ai eu un petit oubli quant à ma nudité.

La voix de Calliopé se fit entendre depuis la chambre.

— Pas... pas de soucis ! Je ne savais pas que tu avais été au Japon ?

Helen tira un sourire, et se dirigea vers la salle de bain pour y chercher un peignoir.

— C'est le cas, mais ce tatouage, s'il a bien été réalisé par un grand maitre japonais, vient de San Franscico. Une escapade, il y a quelques années.

— Ça a dû coûter une fortune, il est magnifique !

Helen enfilait son peignoir, et passa la tête rapidement vers la chambre, sans y entrer. Calliopé était de dos, et s'habillait rapidement. Elle était aussi peu douée pour se vêtir que pour choisir ses tenues.

— En longue patience surtout. C'est un cadeau que l'artiste m'a proposé après lui avoir rendu un service.

— Mais tu rends service à tout le monde ?

— Cela m'arrive oui. Il y a du café chaud, voulez-vous un petit déjeuner ?... et j'ai un message pour vous : l'inspecteur en charge de l'enquête a appelé, votre appartement ne sera disponible que ce soir au plus tôt et il souhaite vous recevoir dans les locaux de la police de Blanc-Mesnil à dix-sept heures.

— Ha, me convoquer ? Pff... Et il a trouvé ce qui avait été volé ?

— Selon lui, rien. C'est pour cela qu'il souhaite en discuter.

Calliopé apparut dans le salon, vêtue de son tailleur-pantalon de la veille, froissé et de guingois. Helen ne put se résoudre à laisser la chose sans intervenir, et approcha pour commencer à tirer, déplisser et réajuster l'ensemble. Calliopé râla, forcément, ce qui n'arrêta pas la gouvernante.

Héritages, livre 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant