Chapitre IV [TW]

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[TW scène graphique]

Yoni courait dans les couloirs du manoir. Un messager du comte était venu très tôt dans sa chambre pour lui demander de le rejoindre dans le salon privé. C'était urgent.

Était-il arrivé quelque chose au comte ? Une nouvelle attaque avait-elle eu lieu ?  Les têtes se tournèrent vers lui quand il fit claquer la porte du salon avec fracas. Le comte était là, ainsi que quelques membres de la garde rapprochée de ce dernier et Akira.

Le Chevalier Noir se figea en voyant son frère. Ses cheveux étaient lâchés et tombaient en une cascade noire et ondulante le long de ses épaules. Mais ce changement inhabituel ne parvenait pas à cacher le bandage qui couvrait son œil droit.

Yoni dû se faire violence pour ne pas se précipiter près de lui et l'examiner sous toutes les coutures. À la place, il demanda d'une voix blanche :

- Que t'est-il arrivé ?

- C'est justement pour cela que nous sommes réunis ici, chevalier, répondit le comte. Asseyez-vous je vous prie.

Le dit chevalier tenta d'étouffer le dépit qui commença à grandir dans son ventre. Devant les autres, le comte tenait à mettre le plus de distance possible entre eux. Il ne voulait pas que le reste du personnel pense que lui et Akira étaient favorisés. Cela le mettait en colère. Leur place était méritée, alors pourquoi jouer à qui sera le plus hypocrite ?

Conscient qu'il ne pouvait rien faire d'autre, il prit un fauteuil et s'assit à contrecœur. À présent, tout le monde avait les yeux rivés vers Akira. Ce dernier balaya l'assemblée de son œil restant et dit :

- La Bête m'a attaqué.

Son annonce fit l'effet d'un coup de tonnerre dans la salle. Les soldats, bouche bée, ne pouvaient en croire leurs oreilles. Yoni, le regard rivés vers le tapis richement décoré, serra les accoudoirs de son fauteuil avec force. Le bois craqua légèrement sous la pression. Ran Eoghan jeta un coup d'œil à ses jointures blanchies sous l'effort, mais il ne s'en rendit même pas compte.

- Hier dans la soirée, reprit Akira, je suis allé à la Flûte de Pan. Quand je suis sorti, la nuit était tombée depuis longtemps. Il devait être aux alentours de minuit. Je me suis installé près de la fontaine sur la place pour profiter de l'air frais. Je n'ai pas allumé ma lampe car les réverbères fonctionnaient toujours. Au bout de quelques minutes, le vent s'est levé et j'ai senti une odeur de mort.

Dans la seconde qui a suivi, j'ai senti un souffle chaud sur ma joue. Quelque chose qui puait la chair datée. Avant même de pouvoir réagir, j'ai senti qu'on m'empoignait les bras par derrière. Et puis il y a eu un éclair rouge. Je pense que c'est cela qui m'a blessé. C'était quelque chose de court et vif. Mais très aiguisé au bout. Peut-être des griffes. Nous nous sommes battus, à l'aveuglette pour moi, car le sang me cachait complétement la vue. Cela s'est passé très vite, à peine plus d'une minute tout au plus. Puis d'un seul coup, tout s'est arrêté. Elle avait tout bonnement disparue. Je suis rentré au manoir et j'ai prévenu monsieur le comte.

Le silence qui régna dans la pièce après la fin du récit était lourd, électrique. Aucun d'entre eux n'osait parler, de peur de dire tout haut ce que tout le monde pensait tout bas. Ce fut de nouveau Akira qui rompit le silence :

- Je ne pense pas que la Bête soit un animal. C'est quelque chose de bien plus dangereux.

- Ah oui ? Et bien, quelles sont vos preuves ? L'alcool vous a sûrement fait imaginer tout ça ! Cela ne peut être autre chose qu'un loup ! S'exclama brusquement un soldat, scandalisé.

La légende du GévaudanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant