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Inconnus. Ils n'étaient que deux inconnus.
Au bord d'une mer capricieuse, sous un ciel morose et des orages électriques, Héloan Enver et Théo Clifford fendent les routes à toute vitesse.
Fuyant leur quotidien lassant pour quelques jo...
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L'air étouffant de la mi-juin alourdissait les pas, gonflait les cœurs et laissait une marque brûlante dans l'esprit. L'ambiance si singulière de la plage se mêlait aux effluves de tabac, d'alcool et à l'amertume de l'océan, à son goût salé, à ses vagues paisibles ; tout plongeait Héloan Enver dans un autre monde, un univers loin de sa vie monotone.
Il était assis dans le sable, les yeux rivés sur les flots, une bouteille de bière à la main. Il avait décidé de prendre des vacances sur un coup de tête, souhaitant fuir le stress de son travail, la pression de sa famille, tout. Il ne voulait plus être ce jeune homme de presque trente ans, célibataire, aux allures d'adolescent prépubère avec ses t-shirts de jeux vidéo, ses cheveux bleus, ses bracelets de toutes les couleurs et Converses usées.
Il ne possédait pas le permis de conduire, aussi, il avait pris le train pour venir à l'autre bout du pays dans une maison d'hôtes qu'il partageait avec deux autres personnes. Ces gens-là possédaient une histoire singulière également ; le garçon aux cheveux bouclés était là à cause d'une peine de cœur. Le jeune homme aux yeux sombres ne disait pas un mot, toujours en train de fumer, mais quelque chose l'avait poussé à fuir sa routine également.
Ils se retrouvaient là tous les trois pour des raisons différentes mais partageaient un unique et même but : s'éloigner de ce qui leur pesait sur la conscience, là, au bord de la mer. Ils ne se parlaient pas, tout juste aux repas du matin, servis par les propriétaires de la maison dans laquelle ils logeaient. Le midi, ils ne se retrouvaient jamais et mangeaient en ville dans leurs coins, ou bien avalaient de simples sandwiches dans leurs chambres respectives. Au repas du soir, seul le bouclé descendait, tenant compagnie à Héloan.
Il comptait rester deux petites semaines, et l'une d'elle était déjà presque écoulée. Il connaissait ses compagnons forcés de vue mais jamais ils ne s'étaient touché un mot. Le bouclé avait l'air trop timide et préférait rester seul au bord de l'eau. Il semblait avoir le cœur lourd, l'âme en peine ; il était sans doute venu ici pour oublier une rupture ou bien un amour non réciproque. L'autre type, en revanche, s'isolait plus parce qu'il semblait avoir les êtres humains en aversion que parce qu'il souhaitait effacer quelque chose de sa mémoire.
Il était assez intriguant et, pour ne rien cacher, Héloan le trouvait même réellement attirant. Ses yeux noirs, électriques, envoyaient des éclairs aux téméraires qui osaient les regarder. Sa voix sèche possédait le don de faire fuir ceux qui tentaient de l'importuner. Il n'avait pas l'air bien méchant dans le fond, cependant il s'était clairement isolé dans cette maison d'hôtes pour être tranquille, pour fuir toute vie humaine et ne rester qu'avec ses songes, la mer et son paquet de cigarettes.
Héloan ne connaissait pas son prénom, ne savait même pas son âge ; il s'en fichait, il ne le reverrait sans doute jamais de sa vie. Et puis, il était en vacances. Il se donnait donc le droit de l'observer, de s'imaginer toutes sortes de scénarios loufoques, comme dans ces livres qu'il avait lus, plus jeune.
