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Inconnus. Ils n'étaient que deux inconnus.
Au bord d'une mer capricieuse, sous un ciel morose et des orages électriques, Héloan Enver et Théo Clifford fendent les routes à toute vitesse.
Fuyant leur quotidien lassant pour quelques jo...
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Héloan soupira de tout son être, la joue écrasée contre sa main et le coude sur la table. Il faisait nuit mais il était assis dans la véranda et fixait la colère des vagues qui, pour ne pas changer, se déchaînaient encore à cause d'un orage. Il jouait distraitement avec ses bracelets colorés, passant du vert au rouge, puis du bleu au violet. Il pleuvait des cordes au dehors et le bruit de la pluie était assourdissant, tapant contre les vitres. Il n'y prêtait pas réellement attention, trop agacé.
Il en avait marre de tourner en rond. Théo et lui ne faisaient que répéter les mêmes schémas depuis le début : ils se cherchaient, s'embrassaient, se rapprochaient, puis s'éloignaient et ne se revoyaient plus jusqu'au lendemain. Tout était trop répétitif, trop semblable ; comme son quotidien en dehors de ces vacances. Il en avait marre. Il envisageait donc toutes sortes de manière d'obtenir ce qui lui tenait tant à cœur, mais ses théories n'aboutissaient jamais. Il ne parvenait pas à comprendre pourquoi le noiraud le faisait attendre à ce point, pourquoi est-ce qu'il tenait tant à patienter jusqu'à vendredi soir, jusqu'au dernier moment possible.
D'un côté, cela avait du sens : ce serait mémorable et marquerait la fin de leurs vacances. Mais de l'autre, cela ne rendait que cette semaine plus lourde et ennuyante. Héloan aurait voulu pouvoir profiter, pouvoir peut-être même se donner à lui plusieurs fois. Ce n'était absolument pas dans ses habitudes de ne côtoyer quelqu'un que pour du sexe, il ne se reconnaissait pas vraiment. Pourtant, il chérissait ces quelques jours loin de sa vie ordinaire, monotone. Il était plus libre que jamais ici, libre de se défouler, de se lâcher. D'oublier, oublier son travail, sa famille, ses obligations. Oublier qu'il avait déjà trente ans et qu'aux yeux de sa mère, il était déjà trop vieux. Il aurait dû être marié, avoir un enfant, une maison. Mais il était là, célibataire aguerri dans son vieux pyjama Pokémon, à baver sur un inconnu qui faisait exploser ses envies.
Il ne voulait pas de mariage, ni même d'enfant. Non, à choisir, il aurait plutôt tout plaqué pour se lancer dans le dessin, ou bien suivi Théo quelques temps sur sa moto. Il aurait pu découvrir le pays, en apprendre un peu plus sur ce jeune homme aux yeux sombres. Peut-être qu'il avait déjà une vie, une vraie ? Peut-être même que s'il repoussait Héloan ce n'était que parce qu'il était déjà marié ?
Non, non, il avait été le premier à se rapprocher. Et s'il avait été engagé, il ne se serait pas permis de l'embrasser, c'était déjà bien trop. Alors pourquoi s'entêter à attendre ? Pourquoi ne pas profiter de toutes les nuits qui leur restait, de tous les moments qu'ils pouvaient saisir afin de profiter ? Peut-être pas toujours pour s'envoyer en l'air, Héloan n'était pas obsédé à ce point, non plus. Mais ils pouvaient faire bien des choses tous les deux pour soulager leurs ventres brûlants, leurs oreilles bourdonnantes et leurs mains baladeuses. Pourtant, Théo s'obstinait. Il s'obstinait à commencer quelque chose, à initier quelques gestes, pour se rétracter ensuite et disparaître.
