Chapitre 28

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La deuxième fois que je sortis d'Allenwood, tout était différent. Le jour était tombé depuis peu et la lune était cachée par de gros nuage ; je ne me sentais pas soulagée pour autant lorsque je traversais de nouveau la grille qui séparait la liberté de l'enfermement et enfin, quelqu'un m'attendait dehors. Appuyé sur la portière de sa voiture, mon avocat, seul, me fit un signe de la tête et je le rejoignis, le bagage sur le dos.

— Nelson ? qu'est-ce que vous faites là ? Je n'ai pas compris votre message.
— Pourtant ça me semble clair. Vous êtes libre.
— Comment ?
— De nouveaux éléments qui posent un doute raisonnable sur votre culpabilité et mon entêtement à harceler le juge... Mais ça ne veut pas dire pour autant que tout est fini, mais au moins, j'ai réussi à vous faire sortir de là. Montez.

Je suivis les ordres de mon avocat et après quelques minutes, des gouttes de pluie s'écrasaient sur le pare-brise, chassées rapidement par les essuie-glaces qui coupaient régulièrement le silence de l'habitacle.

— Et Charlotte alors ? demandai-je.
— Elle s'est réveillée et n'a aucune séquelle neurologique de sa chute. La dernière chose dont elle se souvient c'est de l'interrogation de mathématiques la veille de l'accident. Mais les médecins n'excluent qu'elle retrouve la mémoire.
— J'évite de me faire de faux-espoirs. Répondis-je froidement.
— Alana, nous faisons tout pour vous sortir de là.
— Je sais, je vous remercie, mais j'ai perdu foi en la justice, pardonnez-moi.

Le reste du trajet était silencieux, même si Nelson avait fait tout ce qu'il pouvait pour me sortir de là, je m'attends toujours à ce qu'on vienne me chercher et me renvoyer en prison, ce sentiment que tout ne va pas s'arranger aussi facilement qu'ils le croient.

Une fois arrivés à mon appartement, je pris mon sac du coffre de la voiture et remercia mon avocat de m'avoir déposé. Quand j'allumai la lumière dans le salon, je contemplais le désordre après le passage de la perquisition, une semaine auparavant. Je me changeais, enfilant un gilet beige confortable avant de m'attaquer au bordel ambiant. Au moment où j'allais ramasser la vaisselle brisée dans la cuisine, quelqu'un sonna à la porte. A peine avais-je ouvert que Viktor me prit dans ses bras tendrement.

— Alie, je suis tellement content de te voir. Tu m'as tellement manqué... soupira-t-il.
— Viktor ! Si tu savais à quel point je suis soulagée d'être sortie !
— Je savais que tu n'allais pas y rester longtemps ! Et cette fois, je vais rester avec toi pour qu'il ne t'arrive rien. Sourit-il en franchissant le seuil.

Il commença à ranger le salon quand une deuxième personne frappa à la porte, cette fois c'était Nathaniel. Quand je le vis, le souvenir de son regard, la dernière fois qu'on s'était vu à Allenwood me revint en tête et j'hésitais.

— Alie...
— Qu'est-ce que tu fais là toi ? demanda Viktor sur un ton brusque derrière moi.
— Viktor ! Et toi qu'est-ce que TOI tu fais la ?
— Je la soutiens, je suis ici pour l'aider !
— Et qu'est-ce que tu crois que je fais ici ? répondit le blondinet en avançant vers l'ex-délinquant.
— Tu ne mérites pas d'être ici, avec elle ! Je suis la seule personne à pouvoir comprendre ce qu'elle vit !
— Tu n'apportes que le malheur toi ! renchérit Nathaniel avec les sourcils froncés. Tu penses qu'elle ne voit pas clair dans ton petit jeu ? Tu fais juste ça pour te rapprocher d'elle ! Combien de fois doit-elle te dire qu'elle ne t'aime pas ?!
— Elle ne t'aime plus, c'est évident ! Tu es égoïste, à ne penser qu'à ta petite personne !
— Alie a besoin de stabilité ! T'as 18 ans, mais t'as aucun diplôme et aucun avenir ! Je peux lui donner ça !
— Nathaniel !! Viktor !! intervins-je. Ça suffit tous les deux. Je suis à peine revenue que je dois subir vos petites disputes !

Ils se turent une seconde en me regardant, j'avais juste besoin d'être seule, d'être dans un endroit où je me sentais en sécurité, pouvoir réfléchir à ce qui allait se passer ; mais non, j'avais deux grands enfants à gérer, qui se battaient pour la reconnaissance de leur mère.

— Nathaniel, rentre chez toi s'il te plaît. Demandai-je au blondinet. Je t'appellerais.

Il resta silencieuse une seconde, attendant une suite qui ne vint pas, il fit quelques pas en arrière sans quitter Viktor des yeux, sa fierté blessée. Quand il claqua la porte, Viktor avait un sourire en coin, un air de triomphe qui me désespéra.

— Rentre chez toi aussi Viktor. J'ai envie et besoin d'être seule.
— Mais je pensais que...
— C'est comme ça. Va-t-en.

Il prit la porte en la claquant derrière lui, me laissant enfin seule... ou presque. A peine était-il parti que quelqu'un d'autre frappa à ma porte, pour la 3ème fois de la soirée. Je levais les yeux au ciel, désespérant trouver la paix. Mais c'étaitCastiel devant moi, son air narquois absent de son visage, remplacé par un sentiment fugace de culpabilité.

— Alie, je suis...
— Nan, ne dis rien Castiel. Mon avocat m'a dit ce que tu avais fait et pourquoi... Je te remercie vraiment et je suis désolée d'avoir douté de toi.

Il me prit dans ses bras mais cette fois, j'acceptais son étreinteet j'étais contente de le voir.

— Ils n'y vont pas de main morte pour les fouilles dis donc ! Commenta le rebelle en m'aidant à ranger.

Au fur et a mesure qu'on voyait plus clair à terre, la nuit progressait et je me sentie soudainement épuisée ; affalé sur le canapé, Castiel me demanda :

— Alors t'en es où avec Nathaniel ?
— Je sais pas... J'ai pas envie d'y penser.
— Je comprends pas, tu l'aimes encore ou pas ? Ou tu aimes Viktor ?
— Je n'aime pas Viktor, je vois bien qu'il fait tout pour se rapprocher de moi. Mais Nathaniel... Je ne sais pas. Et si je retournais en prison, hein ? Et s'il devait venir toutes les semaines pendant je ne sais combien de temps en attendant qu'on me libère ? Je voudrais qu'il fasse sa vie loin de moi... Surtout que j'ai voulu partir ! Comment peut-il me pardonner ça, moi qui aie voulu l'abandonner ! .... Je ne sais plus quoi faire, c'est tellement compliqué !
— Tu sais, je n'ai pas de conseils à te donner puisque ma copine est une folle furieuse, mais je pense qu'il t'a déjà pardonné et qu'il aimerait que vous vous remettiez ensemble.
— Tu es vraiment sûr ? demandai-je perplexe. Ne fait-il pas ça parce qu'il est jaloux de Viktor ?
— Nathaniel... Jaloux de Viktor ! Il n'a rien à lui envier sans vouloir le vexer.
— Mouais ... je vais voir.

Je m'endormis peu après, épuisée par la complexité de cette situation amoureuse. Le lendemain matin, je me retrouvais dans mon lit, surement déposée par Castiel sans que je ne me souvienne de rien. Les bruits de vaisselle qui tintait et des messes-basses me réveillèrent tard dans la matinée. Quand j'entais dans la cuisine, mon avocat, Lysandre et Castiel étaient attablés, buvant un café, discutant de mon affaire.

— Alana, je suis content de te voir. Me fit Lysandre enthousiaste.
— Merci Lysandre, ça me fait plaisir aussi. Je vais allez prendre une douche, je reviens.


Je sélectionnai des habits propres (et pas étalés à terre à prendre la poussière) et entra dans la douche. Je savourais le temps illimité d'eau chaude que je disposais, contrairement à Allenwood où chaque goutte d'eau chaude était un luxe. Enfin, lorsque je sortis de la douche, les miroirs étaient tout embués, je les essuyais, laissant des traces qui dévoilaient mon visage neutre. J'en profitais pour ranger encore un peu des affaires mises à la mauvaise place, je tombais sur une pâquerette en plastique dont les pétales blancs ne me disait rien. J'allais voir dans la cuisine, interrogé le victorien.

— Lysandre, c'est toi qui a mis cette fleur dans ma salle de bain ?
— Et bien... je l'ai simplement ramassée à terre lorsque nous sommes venus le lendemain de la perquisition.
— C'est pas à toi ? demanda Castiel qui ne comprenait pas les fondements de cette question.
— Je suis du genre à mettre des pâquerettes blanches sur moi ? remarquai-je désabusée.
— Alors d'où vient cette fleur et que fait-elle ici ? raisonna Nelson professionnellement

Un long silence de réflexion s'installa, mais ce fut Castiel, les yeux grands ouverts qui proposa la réponse.

— Capucine ! Je l'ai entendu dire à Selly qu'elle avait perdu quelque chose chez Alie ! ça pourrait être ça !

Nelson se leva et sortit de sa pochette de cuir mon dossier, puis les photos prises lors de la perquisition et les étala sur la table.

— Si elle a oublié quelque chose, elle devrait être sur la scène de crime !

Nos yeux fouillèrent frénétiquement les photos à la recherche de cette fleur qui pourrait tout changer.

— Là ! pointa en premier Lysandre. Elle était sous la commode, près du panier de linge sale !
— Vous pensez vraiment que c'est la sienne ? Demandai-je perplexe.
— Il n'y a qu'une façon de le savoir ! annonça l'avocat d'un ton victorieux. Il est grand temps de l'interroger.

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J'attendais devant le portail vert de la maison du délégué, hésitante. Devais-je sonner ? ou plutôt lui envoyer un message ? devais-je partir ? Je tournais en rond, au sens littéral et figuré. Au moment où je décidai de partir, le portail électrique s'ouvrit et la cheveulure blonde et bouclée d'Ambre apparut.

— Alie, tu veux voir Nathaniel ? demanda la sœur en venant vers moi. Il dort encore, mais je pense qu'il sera content de te voir.
— Euh... Nan, laisse, je repasserais le voir plus tard... bafouillai-je en reculant.
— Tu veux le quitter ? demanda la blonde d'un air triste.
— Hein ? Non ! Enfin ... non mais... c'est plus compliqué ! Et si lui voulais me quitter ?
— Pourquoi le ferai-t-il ? il t'aime toujours

Je restais muette sans bouger, j'aurais aimé le rejoindre en courant dans son lit, le serrer dans mes bras mais je fis un pas en arrière, puis un autre, sous le regard incompréhensible d'Ambre. Et sous les yeux de Nathaniel qui me scrutait depuis sa fenêtre.

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L'avocat n'aurait jamais cru se retrouver un jour en face d'une copie parfaite de la parfaite petite fille de 12 ans... Mais Capucine en avait 17 et pourtant, elle paraissait aussi frêle et fragile qu'une enfant. Vetu d'une robe à fleurs multicolores et d'un serre-tête chargé d'un nœud sur le côté, elle semblait mal à l'aise et évitait le regard de l'avocat.

— Mademoiselle Capucine Sigard, est-ce que vous savez pourquoi vous êtes là ? commença-t-il.
— Non, je ne comprends pas. Fit-elle en déglutissant.
— C'est en rapport avec ceci.

Nelson ne voulait pas perdre une seconde, il lança le premier pavé dans la marre en sortant du dossier un sachet transparent où il montra en évidence la pâquerette blanche et jaune retrouvée dans la salle de bain d'Alie.

— Est-ce que cela vous dis quelque chose ?
— Euh... non... répondit Capucine sans décrocher ses yeux ébahis de la fleur.

Nelson laissa planer une seconde de silence, pensant qu'elle allait craquer mais il fut content qu'elle ne le fit pas, juste pour le plaisir de la questionner davantage.

— Vous connaissez Mademoiselle Quint depuis longtemps ?
— Oui, nous étions dans le même collège il y a 2 ans. Reprit-elle, soulagée du changement de sujet.
— Et vous connaissez aussi sa demi-sœur, Selly. Vous étiez proches ?
— Pas vraiment...
— Qu'est-ce que vous avez pensé d'Alana quand elle a agressé sa demi-sœur ?
— Elle le méritait.
— Elle devait vraiment être en colère contre elle pour l'agresser avec tant de violence. Reprit l'avocat en tournant autour de la table. Qu'avait fait Selly pour mériter ça ?
— J'en sais rien ! se rebella Capucine, ce n'est pas à moi qu'il faut demander !
— Vous êtes une élvère modèle, les meilleures notes de la classe, le brevet avec une mention très bien la seule du collège d'ailleur. Vous voulez devenir chirurgienne ? Quel bel avenir...
— En quoi cela est pertinent ? rétorqua la jeune fille aux cheveux châtains.
— ça ne l'est pas évidemment. Revenons à nos moutons. Vous n'êtes jamais allé dans l'appartement d'Alana Quint et cette fleur n'est pas à vous, c'est ça ?
— oui.
— Alors comment expliquez-vous ce cheveu...

L'avocat pointa le sachet contenant la fleur et mit par-dessous une feuille de papier blanc, mettant en évidence un long cheveu châtain enroulé dans un pétale blanc.

— L'analyse ADN confirmera vos dires ?
— Euh... En fait j'ai déjà...
— Faites attention à ce que vous dites, n'oubliez pas que tout ce que vous direz sera confirmé ou infirmé par des preuves. Si vous mentez, je le saurais. Est-ce que Selly vaut vraiment la peine que vous la couvriez ? Vous qui avez un si bel avenir !

Enfin, Capucine fixa Nelson dans les yeux, il voyait sa détermination flanchée, il avait touché la corde sensible, l'ambition de cette jeune fille et malgré son intelligence, elle se retrouvait dans cette situation, manipulée par une autre pour arriver à ses fins. Il lâcha enfin son dernier atout.

— En fait, je n'ai pas attendu votre réponse, j'ai fait anaylser le cheveu, c'est évidemment le vôtre et il a été retrouvé dans l'appartement d'Alana Quint. Ce qui suppose que vous étiez sur place, que c'est vous qui avez mis le foulard de Charlotte Parker dans la salle de bain et par conséquent, que vous et vous seule l'avez fait tomber dans les escaliers. Il n'y a pas de trace d'une autre personne à part vous ! Et ensuite, j'ai demandé un mandat pour la chambre que vous louez à l'hôtel. Devinez ce que j'ai trouvé avec mes collègues les policiers ?! Est-ce que je peux savoir ce que c'est que ça !

Il sortit un sachet en plastique plus grand, contenant le pull Superman tâché de sang séché. Et là, enfin, les aveux coulèrent à flots.

— C'est elle qui a tout manigancé, de son agression il y 1 an et demi, à la chute de Charlotte et le fait d'accuser aussi Alie pour les deux...
— Bien... Commencez par le début.

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Le rebelle dormait encore profondément lorsque son portable sonna. Il l'envoya d'abord balader à terre et fut soulagé qu'il ne sonna plus... Mais ce fut un soulagement de courte durée. Il avait beau s'enroulé dans les draps et les couettes, il entendait toujours cette sonnerie, au final, il se leva et décrocha violemment

— C'est qui ?! cria-t-il énervé.
— C'est Nathaniel, j'ai eu un appel de l'avocat, Capucine a tout balancé sur Selly ! Il envoie une patrouille l'arreter d'ici quelques minutes
— Je vais à son appartement, je veux la voir avec les menottes aux poignets !
— On se rejoint là-bas ?

Castiel raccrocha et enfila rapidement un jean et sa veste en cuir au-dessus d'un t-shirt rouge. Il dévala les escaliers et claqua la porte derrière lui. Dejà, il vit une voiture de police s'arreter dans la rue perpendiculaire, puis une deuxième, des policiers sortirent, et se concertèrent une seconde et se dirigèrent vers l'appartement de Selly.

— Reculez Mon,sieur. ordonnèrent-ils au rebelle.
Après un coup d'oeil entendu, l'un des policiers frappa à la porte en criant :

— Police ! Ouvrez !

Le temps se figea une seconde en attendant une réponse, mais seul le silence se fit entendre. Le plus costaud des agents défonça la porte et, accompagné de ses collègues, attendra dans l'appartement.
Castiel ne voyait pas se qu'il se passait, mais au loin, il vit Nathaniel accourir, l'interrogeant du regard.

— J'ai bien peur qu'elle ne soit pas là...
— En effet, l'appartement est vide.

Nathaniel entra malgré les interdictions des flics et inspecta chaque pièce. Non seulement Selly n'est pas là, mais en plus, toutes ses affaires avaient disparues. plus de vêtements dans l'armoire, plus de produits de beauté dans la salle de bain, plus de télé, d'ordinateur, de livres, ni aucune présence de la demi-sœur d'Alie, comme si elle n'avait jamais été là.

— Elle s'est enfuie. réalisa-t-il

[Amour Sucré][Nathaniel][Terminé]The Second Time of my lifeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant