La jeune sirène

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De l'air, il lui fallait de l'air !

Des larmes de rage se mêlaient à l'eau tumultueuse alors que la jeune humaine n'arrivait pas à combattre ses horribles réflexes humains : elle souhaitait quitter cette souffrance, alors pourquoi son corps tentait-il toujours de la remonter à la surface, là où ses souvenirs étaient aussi douloureux que ses pas, là où elle avait tant souffert mais aussi tant été aimée par l'être qu'elle adorait le plus au monde ? 

Elle voyait au loin le château, s'éloignant toujours plus loin alors que le courant l'entraînait au large. Elle entendait encore le cri désespéré de son prince qui lui avait brisé le cœur. La sorcière lui avait dit qu'une fois son cœur brisé, elle deviendrait écume : pourquoi ne le devenait-elle pas ? Pourquoi fallait-il que se soit la simple amitié du prince qui la tue et non cet amour qui la faisait tant souffrir ?

Alors qu'elle gémissait, une vague la submergea et l'envoya dans les profondeurs tandis qu'elle avalait de l'eau. Ses réflexes humains la ramenèrent une nouvelle fois à la surface mais déjà une autre vague déferlait. Dès qu'une l'entraînait vers le fond, son corps répondait, désobéissant à son esprit qui lui hurlait de lâcher prise. Seul l'épuisement vint à bout de l'obstination de son corps humain de vivre et, alors qu'elle était dans une sorte de transe, ballottée par les vagues, une personne dernière elle lui mit une poche sur la tête et plongea avec elle dans l'eau.

Elle tenta de se débattre mais son ravisseur était obstiné à l'emmener au fond de l'océan. Le corps épuisé, la jeune humaine sombra dans l'inconscience.

Lorsque la poche d'oxygène fut consommée, l'humaine se réveilla et hurla de terreur : elle était dans la grotte de la sorcière des mers, qui la fixait d'un air morne. La jeune fille se boucha le nez et la bouche, essayant de ne pas avaler d'eau, mais celle-ci s'infiltrait en elle malgré ses efforts. Elle voulut remonter à la surface mais elle savait qu'elle n'aurait jamais le temps. Des larmes dévalèrent ses joues alors qu'elle comprenait qu'elle allait mourir : elle ne pouvait certes plus supporter sa douleur, pour autant elle souhaitait  vivre !

Affolée, terrifiée, elle empoigna la sorcière des mers et la supplia silencieusement mais celle-ci ne bougea pas. L'eau continuait de s'engouffrer, l'oxygène presque épuisé.

— Sauvez-la ! supplia alors derrière elle une personne aussi affolée que l'humaine.

Celle-ci se retourna dans un dernier effort et vit ses cinq sœurs, pleurant avec elle, terrifiées par sa noyade.

— Je ne peux rien faire, déclara la sorcière.

Les sœurs gémirent et l'une se précipita auprès de la benjamine qui ne bougeait plus.

— Respire, petite sœur, tu peux le faire ! s'écria l'ainé désespérée.

— On sait que tu en es capable ! 

— Tu n'as pas à t'inquiéter, tu reviendras vivre parmi nous ! affirma une autre.

— Ne nous quitte pas, reste avec nous ! pleura une énième.

— On sent que c'est extrêmement difficile, que tu penses que tu ne peux plus rien faire, mais crois nous, bien que ça sera dur, tu peux t'en sortir ! finit la dernière.

Alors, les supplications et encouragements de ses sœurs se métamorphosèrent en ce chant, celui qui appelait l'ancienne sirène lorsqu'elle tentait tant d'atteindre le fond de la crique.

Et bien qu'elle ait peur, qu'elle souffre de sa séparation avec son prince, qu'il soit plus facile de se laisser mourir, l'ancienne sirène utilisa ses dernières forces et inspira. Elle commença par inspirer de l'eau, comme tout humain. Cela lui fit mal, mais cette douleur la rassurait : elle avait toujours souffert en tant qu'humaine car elle n'était pas elle-même. Il était temps qu'elle redevienne ce qu'elle était : une sirène.

Elle continua d'inspirer en se gorgeant d'eau et par la magie de sa volonté et le chant d'espoir de ses sœurs, son corps commença alors à filtrer cette eau et à mettre l'oxygène à part : la première bouffée de cette molécule lui tira les larmes aux yeux. Elle continua d'inspirer et son corps continua de filtrer. Elle respirait enfin sous l'eau.

Alors, elle hurla de douleur une dernière fois et des écailles poussèrent sur ses jambes, celles-ci fusionnèrent et finalement disparurent pour redevenir ce qu'elles avaient toujours été : une queue de sirène.

Elle s'évanouit alors.

Lorsqu'elle se réveilla, la petite sirène était dans sa chambre, dans son palais, tout au fond de l'océan

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Lorsqu'elle se réveilla, la petite sirène était dans sa chambre, dans son palais, tout au fond de l'océan. A ses côtés, ses cinq sœurs pleurèrent de soulagement, tandis que derrière elles, son père lui souriait. Sa grand-mère s'avança vers elle.

La petite sirène, enlacée par sa grand-mère, pleura son prince qu'elle avait dû abandonner mais se promit de ne plus jamais chercher à être quelqu'un d'autre qu'elle-même, surtout par amour, car la souffrance était d'autant plus terrible.

Essuyant ses larmes, elle sourit de bonheur en sentant le courant soulever sa chevelure, en voyant par le trou du mur les poissons nager librement.

Elle souhaitait à tout prix les rejoindre et redécouvrir son territoire, mais avant cela, elle prit dans ses bras ses proches et embrassa ses sœurs. Comment pouvait-elle exprimer sa gratitude pour leur aide, pour lui avoir permis de se retrouver ?

Elle les regarda, sécha ses larmes puis sourit.

— Merci.

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Et si la petite sirène avait épousé son prince ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant