Le soleil réchauffait mes joues. D'un pied peu sûr, je me rapprochais tant bien que mal vers ce grand bâtiment gris. Le verglas qui avait poussé durant la nuit empêchait mes semelles de bien s'accrocher au sol. Durant le mois de novembre, je m'étais inscrite à un camp d'hiver. Quelle drôle d'idée que d'aller faire l'ermite pendant 4 jours dans une forêt enneigée. Je n'avais rien d'autre à faire et il fallait bien que je trouve de quoi occuper mes « vacances ». Diplômée depuis 2019, je n'avais pas réussi à trouver du travail dans la région. J'étais donc au chômage, valdinguant de postulation en postulation, sans jamais réellement trouver quelque chose.
Plus je m'approchais du point de rencontre plus je regrettais ma décision. La seule chose qui m'avait réellement motivée à faire cela était la possibilité de découvrir une faune sauvage, vierge de toute présence humaine.
Depuis petite, je me passionnais pour les animaux. Rampant, volant ou gambadant, ils m'intéressaient tous. J'avais un net penchant pour les oiseaux – penchant que j'ai toujours – et les félins. Il y a quelques années en arrière, j'avais même investi dans des jumelles et des guides en tout genre afin de pouvoir reconnaître différentes espèces grâce aux indices qu'elles laissaient. Il m'arrivait assez régulièrement de partir une après-midi pour aller découvrir les espèces vivant près de chez moi. Cela me permettait d'apprendre, mais surtout de me vider l'esprit. Me retrouver seule, oublier les tracas du quotidien, respirer.
Je passai la porte d'entrée et essuyai mes chaussures de marche sur le tapis noir de l'entrée. Je scrutai les environs jusqu'à apercevoir un monticule de sacs entassés les uns sur les autres. D'un pas sûr je me dirigeai là-bas, bien décidée à laisser mes appréhensions sur le seuil de la porte. Les dalles de carrelages ressemblaient comme deux gouttes d'eau à un échiquier, seules les traces de chaussures posaient la réelle différence.
Cinq personnes étaient là, les unes en train de discuter avec les autres. J'étais visiblement la dernière. Je posai alors mon sac près de la pile déjà formée et m'approchai timidement du groupe.
- Bonjour...
Une petite femme aux cheveux rouge s'approcha de moi, une veste orange fluo sur le dos.
- Hello ! C'est toi la dernière participante ?
- Salut. Je ne sais pas, peut-être.
- Je pense que oui, Eric nous a dit qu'on attendait encore quelqu'un avant de partir.
Elle désigna d'un mouvement de tête un homme adossé à une fenêtre, tournant frénétiquement les pages d'un dossier agrafé.
- Au fait, je m'appelle Lola.
- Romane.
Lola me sourit et se retourna pour continuer sa discussion avec le reste du groupe. Ne sachant pas trop quoi faire, je décidai d'aller me présenter vers Eric, qui semblait être notre guide, et de l'informer de mon arrivée.
- Hello, je suis Romane Vaudert.
- Ah Vaudert ! Enfin !
La personne se trouvant en face de moi me fit penser à un commandant de l'armée. Déjà quelle idée de m'appeler par mon nom de famille et ensuite, sa dégaine d'explorateur n'annonçait rien de bon.
- On va pouvoir partir !
Il se tourna vers les autres en indiquant du doigt la pile de sacs.
- Prenez vos affaires, on y va !
Eric avait l'allure de Mike Horn. Chaussures de montagnes, lunettes d'alpiniste, habits ayant vraisemblablement survécu à la Seconde Guerre Mondiale... Il devait sûrement être un de ces hommes férus de montagne et de grimpe.