Chapitre 4

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Mon réveil sonne. Je le frappe brusquement d'un coup de poing pour le faire taire puis ouvre les yeux pour visualiser les chiffres numériques écrits en rouges. 6h30. Je m'allonge sur le dos de façon à être droite et fixe le plafond blanc de ma chambre. Je reste comme ça durant de longues minutes qui m'ont paru aussi longues que des heures. Je vais devoir affronter cette nouvelle semaine sans Pauline et encaisser tous ces paires d'yeux qui ne reflètent que de la pitié. Génial ! Je suis ravie.

Je repousse ma couverture de couleur vert pastel et me dirige vers mon armoire d'angle recouverte d'un revêtement effet bois dans les tons beige. Elle déborde de vêtements : les 6 blocs qui la constituent sont remplies à ras-bord de jeans, de pulls, de hauts à manches longues ou courtes, de vêtements de sport – bien que je n'en fait jamais – et même de mes pyjamas ! Un tiroir pour mes sous-vêtements et mes maillots de bain. Et mes deux barres à penderie, n'en parlons pas. Même elles débordent de fringues. Bon, j'avoue la plus petite d'entre elles sert uniquement à pendre les manteaux d'été lors de l'hiver et inversement. Mais la plus longue regorge de robes à porter tous les jours ou bien pour les occasions, de chemises, de hauts à fines bretelles et de vestes légères. En dessous de ces deux barres, il y a pas mal de bazar comme ma chaîne Hifi et son nombre incalculable de CD que je n'écoute même plus, mes cahiers de cours et mes livres, des peignoirs de bain et mon bric-à-brac à coiffure que j'ai eu par mes parents l'an dernier. Et pourtant, comme chaque matin, je ne sais pas comme me mettre. Je poireaute là, à regarder ma penderie et à fouiller par-ci et par-là. Au bout d'un quart d'heure, je finis par sortir un jean bleu foncé et un polo noir légèrement décolleté à manches courtes. Je m'habille et descends dans la cuisine saluer mon père et prendre mon petit déjeuné.

- Salut papa.

- Salut ma puce, dit-il en sirotant son café, tu en fais une de ces têtes !

- J'ai mal dormi et en plus je vais devoir affronter les regards de pitié des uns et des autres (j'ouvre mes yeux en grands pour exagérer mes propos) et j'en ai pas la force...

- Tu veux que j'appelle le lycée ? Ils comprendront si tu ne veux pas y aller.

- Non c'est bon papa, répondis-je subitement, je vais y aller. De toute façon il va bien falloir que j'affronte ces regards tôt ou tard et je ne compte pas sécher éternellement ! Et plus je les affronterais tôt, mieux ce sera.

- Tu en es sûr ? Me répondit-il en plissant des yeux.

- Certaine.

Je m'approche de mon père et le prends dans mes bras. Il sent bon le café moulé. Puis je me dirige vers le placard à petit-déjeuné. Je l'ouvre, prends une tasse blanche avec un croquis des oreilles de Mickey et la pose sur le plan de travail. C'est une tasse que j'ai eu à mes 14 ans et depuis c'est ma favorite. Je prends la bouilloire qui se trouve juste en face de moi, la remplie d'eau et la mets à chauffer. Pendant ce temps, je sors un sachet de thé saveur fruit de la passion et me prépare mes tartines de confiture de fraises. Une fois mon eau chaude, je la verse dans la tasse et j'y plonge mon thé. Un petit-déjeuné de rêve. Je m'assis à côté de mon père et entame mes tartines.

- Maman n'est pas là ?

- Non, elle a été appelé ce matin vers 5h30. Elle rentre ce soir à 20h.

Encore... Elle va être crevée la pauvre. Depuis que je suis née, j'ai toujours connu maman travaillant à l'hôpital. Je ne sais pas depuis quand précisément elle exerce ce métier mais je pense que ça doit faire un bon bout de temps maintenant. Déjà de mon plus jeune âge c'était souvent mon père qui s'occupait de moi car il ne travaillait pas à l'époque. Maman été toujours appelé aux alentours de 3 ou 4 heure du matin mais rentrait toujours à 20 heure pétante pour que je puisse avoir « mon bisou du soir ». Au fur et à mesure des années, c'est devenu notre rituel : papa s'occupait de moi la journée et après l'école ensuite, à 19h30, on montait dans ma chambre pour un moment calme, c'est-à-dire soit un câlin soit une histoire, puis maman rentrait pour mon bisou et au lit ! Maintenant j'ai 17 ans et c'est toujours un rituel. Maman rentre pour me souhaiter une bonne nuit sauf qu'au lieu que ça soit moi qui vais me coucher à 20h ou 20h30 c'est elle. C'est la petite différence.

- Athélaïs, il est 7h30. Tu vas être en retard.

- Merde ! Déjà ! M'exclamai-je en avalant mon thé.

- Ton langage jeune fille !

- Pardon, c'est l'effet de surprise !

Je débarrasse mon coin de table et me précipite dans la salle de bain. Je me brosse les dents et les cheveux, cache mes cernes et recourbe mes cils de mascara, prends mon sac de cours, ma veste et mes clés.

- Bisous papa ! À ce soir !

- Bisous chérie ! L'entendis-je crier alors que je ferme la porte.

Je sors de mon allée et vois mon bus passer juste devant moi. Oh non, pas ça ! Je me met à courir pour rejoindre le plus vite possible mon arrêt de bus en espérant que le chauffeur me voit dans ses rétroviseurs et qu'il ne redémarre pas. Heureusement pour moi, il y a une personne en fauteuil roulant qui souhaite y monter. Le temps que la planche du bus se mette en place, j'arrive devant celui-ci à temps mais essoufflée. Les portes s'ouvrent et je monte à l'intérieur en aidant la personne à mobilité réduite. Je m'installe sur un siège disponible et branche mes écouteurs.

Quelques minutes plus tard, j'ai une énorme boule au ventre. Le fait d'affronter cette nouvelle semaine juste après l'enterrement de mon amie me fait encore plus peur que quand elle ne l'était pas encore... J'aurai du accepter la proposition de papa et rester à la maison. Je finis par me ressaisir me disant que c'est seulement de passage et descend à mon arrêt qui se trouve à quelques rues de mon établissement. Je rejoins le long passage piéton qui sépare la grande avenue et attends que le feu devienne vert. Quelques instants passèrent et le petit bonhomme devient vert. Je traverse.

Mon téléphone sonne pour m'informer d'un nouveau message. Je regarde le nom de l'envoyeur et découvre que c'est un message de madame Briuve. Cela doit être vis-à-vis de mes parents biologiques ! Impatiente, je le déverrouille et commence à lire le message :

"Bonjour Athélaïs, c'est Amélia. La maman de Pauline. J'ai demandé à une amie de la mairie qui a libre accès aux registres des habitants de la ville de bien vouloir jeter un coup d'oeil et d'essayer de trouver le nom « Polvy » et il lui semble avoir quelque chose qui puisse t'intéresser. Je ne lui ai pas expliqué toute l'histoire mais juste que tu essayais de retrouver deux personnes. Passe la voir après le lycée. Bonne journée !"

Ce n'est pas vrai. J'allais peut-être découvrir qui sont mes véritables parents ! J'étais tellement heureuse que j'ai voulu lui répondre immédiatement alors que je suis toujours sur le passage piéton. Je jette un coup d'oeil au petit bonhomme qui est toujours vert puis je baisse à nouveau la tête et commence à rédiger mon message.

"Bonjour madame Briuve, merci beau.."

À travers le son de mes écouteurs, j'entends plusieurs personnes crier. Je lève la tête de mon écran pour voir ce qui se passe et aperçoit une grosse voiture noire foncée sur moi. Tétanisée, je reste plantée en plein milieu de la route à la regarder, tout en priant qu'elle ralentisse. Mais rien. Elle ne ralentit pas. Au contraire j'ai même l'impression qu'elle accélère de plus en plus. Mon esprit me dit de bouger de là mais mon corps ne suit pas. Il ne m'obéit pas. Je ferme les yeux et des larmes commencent à rouler sur mes joues. Soudainement, je sens de grandes mains m'attraper la taille puis un corps se coller à moi. Des gens cris toujours autour puis... plus rien. Tout devint noir et silencieux.

Athélaïs PolvyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant