Chapitre 7.4

999 70 3
                                    

Le 26 Décembre 1940, Volker fit ses adieux à sa famille sur le quai de la gare. Il pensait que ce moment serait plus douloureux pour lui mais il fut étonné d'éprouver un soulagement vif en s'installant dans le train qui le ramenait dans le nord de la France.

En réalité, les fêtes de Noël ne s'étaient pas passées comme prévu. Bien entendu, sa mère avait été ravie de le revoir après plusieurs mois d'absences :

« - Comme tu es beau, mon fils ! s'était-elle écriée en le voyant sur le quai de la guerre. Tu deviens un homme de plus en plus imposant ! Tu as la même carrure que ton père à ton âge. »

Elle l'avait ensuite entraîné à sa suite, vers une voiture, où sa sœur Olga et son frère Karl l'attendait avec impatience. Après des étreintes chaleureuses, ils avaient pris la direction de la modeste demeure familiale.

La journée avait été délicieuse. Volker avait été ravi de retrouver sa famille et le petit confort de la maison de ses parents. Lorsque la soirée était arrivée et après avoir englouti le délicieux strudel aux pommes que sa mère avait préparé, il s'était installé au coin du feu et avait allumer une cigarette. Sa plus jeune sœur, Olga, était venue le rejoindre rapidement.

« - Alors, la France ? avait-elle demandé les yeux pétillants de curiosité. On raconte qu'ils ont la meilleure cuisine du monde ! Et Paris ? Il paraît que c'est la plus belle ville du monde ! »

Volker avait souri tendrement devant l'innocence de sa jeune sœur. Certes, la cuisine française était délicieuse, le jeune homme avait eu l'occasion de l'expérimenter. Mais il ne pouvait s'empêcher de ressentir une certaine honte à se régaler ainsi une veille de Noël alors que des milliers d'hommes et de femmes, notamment en France, avaient du mal à pourvoir à leurs besoins... Olga était jeune et innocente, Sarah devait avoir à peu près le même âge qu'elle...

Sarah ! Malgré lui, le jeune homme n'avait pu s'empêcher de penser à elle. Que faisait-elle, à cet instant précis, en France ? Elle était si loin... Volker sentait sa gorge se serrer quand à la pensée que des centaines de kilomètres le séparait de la belle jeune fille. Pourtant, il savait qu'ils ne se devaient rien. La plus grande intimité qu'ils avaient pu partager, c'était quand le jeune homme s'était permis de caresser sa délicate joue rosée. Il sentait encore la douceur de sa peau sur ses doigts. Mais il ne pouvait s'empêcher de se questionner : la jeune femme aurait-elle de quoi festoyer, le lendemain soir, à l'occasion des fêtes de Noël ? Volker avait conscience des difficultés alimentaires que les gens villageois de Boiscourt traversaient... Décidemment, la française lui faisait ressentir de drôles de choses. Des choses qu'il n'avait jamais ressenties avec aucune autre et, pourtant, Dieu seul savait qu'il en avait connue plus d'une.

« - A quoi penses-tu ? l'avait alors interrogée Olga en constant que son frère était perdu dans ses pensées.

- A rien du tout », avait-il répondu bien trop rapidement.

A cette remarque, le jeune homme avait brusquement tourné la tête.

« - Il paraît qu'en France, les filles sont très jolies, avait alors murmuré Olga en esquissant un sourire narquois.

- Mhhh, peut-être, avait répondu Volker en rougissant devant la perspicacité de sa petite sœur. Je n'ai pas fait attention. J'ai beaucoup travaillé, tu sais.

- Menteur », répondit simplement Olga en émettant un petit rire cristallin.

Heureusement pour lui, la conversation avait été interrompue par l'arrivée de Karl. Le jeune garçon s'était alors allongé au coin du feu et s'était mis, lui aussi, à questionner son frère avec avidité. Mais, au contraire d'Olga, les questions de ce dernier était beaucoup moins innocente en dépit de son jeune âge...

L'Aigle NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant