Le mois de Décembre 1940 s'écoula très rapidement et, bientôt, on ne fût plus qu'à quelques jours de Noël.
Les toitures du village et les prairies étaient désormais recouvertes d'un épais manteau blanc. Les enfants avaient accueilli avec joie l'arrivée de la neige. Les jardins des maisons étaient décorés de bonhommes de neiges plus originaux les uns que les autres. Certains adolescents, plus extravertis, s'étaient quant à eux beaucoup amusés en bombardant des soldats allemands de boule de neige tout en étant tapis derrière des murs avant de s'enfuir à toute jambe.
Cependant, la nuit, la température était glaciale.
Danny Aubry en fit la constatation lorsqu'il s'aventura un soir dans les rues silencieuses du village. Une épaisse couche de gel avait recouvert la neige et les rues étaient devenues si glissantes qu'on aurait pu les comparer à des patinoires.
En serrant plus étroitement son manteau, le jeune homme s'invectiva à la prudence. Il pressa davantage le bout de papier qu'il avait glissé dans sa poche quelques instants plus tôt.
Malgré le calme apparent des ruelles, il savait que les allemands n'étaient jamais loin.Bien-sûr, la froideur des nuits avait quelque peu découragée les jeunes soldats allemands dans leurs rondes nocturnes. Bien plus attirés par la chaleur des bâtiments et par les vins chauds qui les y attendaient, nombreux étaient ceux qui négligeait quelques peu leurs gardes.
Sur ce point, Danny pouvait les comprendre. Quel imbécile prendrait plaisir à patrouiller, en pleine nuit et dans un froid polaire de surcroît, dans des rues désespérément silencieuses et vides ?
Le jeune homme avait donc profité de cette occasion pour se glisser dehors en pleine nuit. Il était presque minuit mais le jeune homme restait sur ses gardes. La mort de Jean leur avait servi de leçon et ils redoublaient de prudence lors de leurs escapades nocturnes.
C'est avec un soupir de soulagement que le jeune vit poindre la toiture de la modeste demeure familiale d'Henri Leblanc dont une légère fumée suintait par la cheminée. La maison semblait endormie et aucune lumière ne laissait présager que quelqu'un soit encore éveillé. Mais le jeune homme savait qu'il en était tout autre. Lorsqu'il atteignit enfin la porte d'entrée, il l'ouvrit silencieusement.
Bientôt, une douce chaleur se répandit dans son corps et, malgré lui, il poussa un soupir de contentement.
Soudainement, une faible lueur de bougie éclaira la pièce et il vit Irène Leblanc se précipiter vers les fenêtres donnant sur la rue et les couvrir de multiples draps et torchons.
« - Sortir par ce temps, c'est complètement inconscient ! Siffla-t-elle en se retournant vers lui. Tu vas attraper le mort ! Et si des soldats t'étaient tombés dessus, tu imagines, hein ? Vraiment, je ne...
- Il suffit ! la coupa Henri. Laisse-nous, Irène. Tu n'as pas besoin de rester ici. Va te coucher, il est tard. »
Irène lança un regard courroucé à son mari mais elle concéda cependant à quitter la pièce tout en marmonnant rageusement. Lorsqu'il fut sûr qu'elle eut quitté la pièce, son mari prit la parole :
« - Il faut l'excuser, déclara Henri tout en lançant un regard gêné à ses invités. Elle est très inquiète en ce moment. D'avantage depuis les nouvelles lois sur le statut des juifs d'octobre dernier*...
- Sa peur est justifiée, répondit sobrement Albert.
- En effet, rétorqua Danny en s'installant sur une chaise et en se frottant les mains vigoureusement.
- Hitler a bien réussi son coup : il a complètement endoctriné son peuple. Interdire à des êtres humains une nationalité, un travail dans la fonction publique ou encore de tenir un commerce parce qu'ils sont juifs... cela relève de la folie. Non, Henri, tu n'as pas à excuser Irène. Son inquiétude est totalement fondée et légitime, ajouta Albert le regard perdu dans le vide.
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L'Aigle Noir
Fiksi SejarahDurant la Seconde Guerre Mondiale à Boiscourt, un petit village situé dans les actuels Hauts-de-France, les villageois sont contraints d'accepter l'installation des soldats allemands dans la commune. Mais malgré son apparente docilité et les restric...