Chapitre 4 - Se rapprocher

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Son pied frappait frénétiquement le sol, tandis qu'il se tenait le menton, les coudes posés sur les genoux. Adam regardait son téléphone toutes les cinq minutes pour vérifier l'heure. 22h se rapprochait à la fois trop vite et trop lentement. Il avait peur qu'elle ne vienne pas, qu'elle le trouve ringard ou stupide avec son invitation romanesque. Il voulait seulement lui remonter le moral, était-ce une erreur ?

Pourtant, lorsqu'il discerna son petit corps à l'entrée du parc et son sourire en coin lorsqu'elle l'aperçut à son tour, il sut qu'il avait fait le bon choix. Elle portait un pull rouge coquelicot, la même couleur que la robe d'Anna Livia la première fois qu'elle rencontrait le héros du Cercle. Adam se demanda si elle avait fait exprès. Elle avait attaché ses cheveux en un chignon tressé qui dégageait sa nuque et laissait apercevoir son tatouage en forme de lune. Il ôta sa capuche de son front et se décala pour lui faire de la place sur le banc qu'il occupait depuis un bon quart d'heure. Elle s'y assit puis plongea ses yeux verts, assombris par la pénombre et par l'impatience, dans les siens.

- « Alors, où sont les étoiles ?

- Dans le ciel, voyons. – répondit-il simplement, en se penchant en arrière pour se caler contre le dossier, les bras croisés à l'arrière de son crâne.

- Mais, tu as écrit que...

- J'ai écrit que je te ferai découvrir les étoiles. Et, c'est ce que je vais faire. Les étoiles sont dans le ciel, mais pour vraiment les apprécier, il ne suffit pas simplement de lever la tête. Suis-moi. »

Il se leva et elle n'hésita pas une seconde à faire de même. Il enfonça les mains dans les poches de son pantalon et marcha deux pas devant elle, pour ne pas qu'elle puisse voir le sourire triomphant qui ornait ses lèvres. Elle le suivit, curieuse, à travers les rues de la ville, passant par des petites ruelles qu'elle n'aurait jamais pensé traverser un jour. Quand il s'arrêta enfin de marcher, elle avait les pieds en compote et s'autorisa à s'appuyer sur les planches de bois qui longeaient le trottoir et délimitaient une zone de chantier. Adam fouilla dans la poche ventrale de son sweat et en sortie une clé. Il l'enfonça dans le cadenas qui fermait d'une épaisse chaîne le portail d'entrée du chantier.

- « Qu'est-ce que tu fiches ? – l'arrêta Agathe, paniquée, en agrippant vivement son poignet.

- Détends-toi, mon père est le chef de chantier. On ne risque rien.

- C'est lui qui t'a passé la clé ? Il est au courant ? – s'assura-t-elle, en vérifiant furtivement à gauche à droite que personne ne les voyait.

- Hum, on va dire que je lui ai seulement emprunté. Aller, viens ! Ça vaut le coup, je t'assure. »

Elle lui libéra le poignet, un peu à contrecœur, et le laissa déverrouiller le portail. Il se glissa comme une ombre à l'intérieur et, voyant qu'elle hésitait toujours à le suivre, la tira à sa suite. Devant eux s'étalait un terrain vague, vallonné par les traces de pneus des engins de construction, qui somnolaient çà et là. Une palissade de planches de bois entourait le site et, en son centre, se dressait une grande construction couleur béton, ceinturée par l'armature métallique d'un échafaudage. En réalité, le bâtiment n'avait pas encore de murs, il n'y avait pour le moment que le squelette de la structure, des grandes poutres tendues vers le ciel, reliées entre elles par la surface horizontale de chaque étage. Deux grues surplombaient l'ensemble, veillant comme deux tours de guet. Agathe serra ses bras contre sa poitrine, intimidée par l'endroit, digne d'un mauvais film d'horreur. Adam semblait quant à lui tout à fait serein et elle se rapprocha inconsciemment de lui. Il sifflotait, enjambant les crevasses et les canalisations, comme s'il connaissait les lieux comme sa poche. Sans doute venait-il souvent ici rendre visite à son père pendant ses heures de travail, songea Agathe. La vérité, c'est qu'il s'y aventurait souvent seul, durant ses balades nocturnes. Des bâches en plastique obstruaient la plupart des ouvertures, Adam en souleva une et invita sa belle à entrer d'un geste de la main.

Et Tout Faire ValserOù les histoires vivent. Découvrez maintenant