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Jeudi 07 mars, 15h43

(Valentin)

-"Ça va mec?" chuchota Axel, somnolant dans l'amphithéâtre, "T'as l'air énervé"

-"Non, non. C'est juste ce cours qui me gonfle t'inquiète" grogna le brun, ses yeux bleus accrochés au grand tableau noir de la salle. "J'en ai marre" ajouta-t-il en posant sa tête sur son bras, pensif.

"Ah, je croyais qu'on était pas amis pourtant Valentin"

Il ruminait, sans trop savoir pourquoi, cette phrase depuis la veille, se repassant en boucle le clin d'œil cynique du photographe. Pour la première fois depuis longtemps quelqu'un réussissait à lui tenir tête, quelqu'un le prenait à son propre jeu et il détestait ça. Pourtant, une part de lui, ancrée au plus profond de son esprit, semblait apprécier et admirer l'auteur de son agitation. Il aurait tant voulu le haïr, comme les autres. Il est tellement plus simple de détester plutôt que d'aimer.

Soudain un petit sourire en coin étira ses fines lèvres et il tritura le bracelet en argent qui pendait à son poignet. Une idée venait de naître dans son esprit. Il savait qu'elle risquait de ne pas plaire à son ami skateur mais il s'en fichait, il voulait sa revanche sur Maxence.
Il soupira une nouvelle fois et tourna la tête, cherchant la meilleure manière d'annoncer son plan au brun somnolent à ses côtés.

-"Tu sais ce qu'on devrait faire?" Axel l'observa, attentif, tandis qu'il marquait un petit silence, "On devrait s'incruster à la soirée de la meuf là, Marine"

-"Mais pourquoi faire mec?" soupira le skateur, "T'as dit que tu faisais une soirée de toutes façons"

-"Ouais, mais je sais pas, j'ai envie d'y passer, juste deux minutes" Il passa la main dans ses cheveux bruns en bataille, "Juste pour voir la merde que ça va être"

Axel lui lança un regard excédé mais hocha néanmoins la tête.

-"Si tu veux.. Mais tu disparais pas comme la dernière fois ok? J'vais pas passer ma vie à te chercher mec"

Le brouhaha de fin du cours retentit soudain, et sa réponse fut aspirée par le raclement des chaises sur le sol et par les gloussements joyeux d'étudiants libérés.

-"T'inquiète"

22h40.

(Maxence)

La musique retentissait sourdement dans le petit appartement où se trouvait Maxence et Thomas, faisant tinter le liquide doré qui se trouvait dans leur verre. Le brun observait son ami danser avec une jolie brune de façon grotesque, un petit sourire aux lèvres, jetant de temps à autres une pupille sombre sur la porte d'entrée.

-"T'attends quelqu'un Maxeeence?". La voix aiguë de Marine le fit sortir de ses pensées et il étudia le sourire béat de la jeune fille avec agacement. Elle le collait depuis le début de la soirée, et il la repoussait chaque fois, gentiment au début, un peu moins depuis qu'elle n'arrivait presque plus à former de phrases cohérentes.

-"Non non" affirma-t-il avec un petit sourire poli.

-"Et euuuh.." Elle semblait chercher ses mots, ses yeux vitreux se perdant dans le vide, "Tu t'amuses?"

Il observa ses longs cheveux bruns et ses jolies pommettes. Ses yeux en amande encadrés de longs cils dorés et sa bouche rosée, étirée en un sourire niais. Il se maudissait de ne pas arriver à s'intéresser à elle.

-"Oui ça va c'est cool, merci Marine!" Elle sourit en entendant son prénom dans la bouche du photographe et s'approcha un peu plus près.

-"Tu veux danser?" chuchota-t-elle avec un clin d'œil espiègle. Son haleine gorgée d'alcool bon marché vint chatouiller les narines du brun et il s'apprêta à décliner poliment l'invitation.

Pourtant la porte d'entrée s'ouvrit à ce moment-là et la casquette familière de Valentin fit son entrée tandis que plusieurs filles se mettaient aussitôt à glousser en se trémoussant joyeusement sous le nez du rider. Ce dernier balaya la salle du regard et finit par trouver les prunelles ciblées. Il sourit enfin, posa sa veste noire sur une chaise qui traînait et s'approcha de sa démarche féline, se frayant un passage à travers les corps moites de la pièce.

-"Eh Maxence, tu m'écoutes? Tu veux danser ou pas?"

Le brun posa ses yeux sombres sur la jeune fille, sur le prédateur qui s'approchait et de nouveau sur la fille. Il plaqua finalement un sourire enjôleur sur son visage et se pencha par-dessus l'épaule de Marine. Il avança lentement sa bouche vers son oreille, les yeux toujours fixés sur Valentin et susurra, "Bien sûr"

Il passa ensuite ses mains dans le dos gracile de la brune et enlaça doucement sa taille, réduisant considérablement l'espace qui les séparait. Maxence sentit les bras maladroits de Marine s'accrocher à sa nuque et il sourit mentalement, tournant le dos au rider.

Valentin stoppa sa course endiablée, bouche bée. Il observa les courbes harmonieuse de Marine, ses yeux bleus étirés par son sourire radieux, ses mains agrippées au cou du photographe, leur corps bien trop proches. Il contempla le sourire narquois de Maxence, enfouis dans la crinière brune, ses mains collées au dos de la fille, légèrement trop bas. Une rage sourde s'empara de lui, violente, incontrôlable. Il croisa les yeux sombres du brun et le sourire de ce dernier s'agrandit aussitôt, faisant redoubler la fureur du rider.

Voir Valentin dans cet état faisait jubiler le brun; pour la première fois c'était lui qui édifiait les règles du jeu, et il comptait bien profiter de ce pouvoir. Il resserra son emprise sur le corps mouvant et fiévreux de sa proie, ses mouvements aléatoires ondulant au rythme de la musique et il descendit encore plus bas ses mains chaudes. Le dos de Marine se cambra à ce contact et son ventre vint se plaquer contre celui de Maxence dans un brusque ondulement. Elle leva les yeux vers lui, pleine d'espoir, contempla sa bouche avec envie et se mit sur la pointe des pieds.

-"Embrasse-moi Maxence" chuchota-t-elle, son souffle chaud et humide venant effleurer le lobe de l'oreille du brun, lentement.

Valentin observa Maxence tendre le cou, entrouvrir ses lèvres rosées et sa limite fut atteinte; il s'élança. Il cogna plusieurs corps alcoolisés, passant outre les faibles protestations qui se perdaient dans la musique assourdissante. Il se planta devant le photographe, furieux, ses yeux bleus foudroyant la pauvre fille du regard.

-"Casse-toi, pauvre conne" cracha-t-il, méprisant. Il attrapa fermement, presque violemment, le bras de Maxence, et il le tira en arrière, loin de ce baiser inachevé.

Jeu InconscientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant