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20h25.

-"Putain Max! Je commençai à m'inquiéter, t'étais où?"

Maxence venait d'entrer dans la petite cuisine, les mains sur les côtes, à bout de souffle. Il s'assit péniblement sur un tabouret et entreprit de reprendre doucement sa respiration. Il avait couru depuis la petite clairière jusqu'ici, évacuant une petite partie de sa rage, de sa haine, de son dégoût; il se sentait désormais vide, épuisé. Abandonné.

-"Je suis allé prendre des photos, j'ai pas vu l'heure, désolé"

Thomas l'observa d'un air étonné. Sa voix trahissait la lassitude et la colère qui s'était emparées de lui depuis qu'il avait vu sa mère.

-"Ça va? T'as pas l'air bien..."

-"Ça va t'inquiète pas..." Il sentit sa voix trembler et ses remparts s'effondrer comme de vulgaires cartes prises dans une tempête de vent.

Thomas s'assit, déconcerté. Il approcha son tabouret de celui de Maxence et l'observa de ses grands yeux, à l'écoute.

-"Non en fait t'as raison, ça va pas, ça va pas du tout même. Je voulais pas t'embêter avec ça, j'avais pas envie de t'encombrer de mes problèmes, mais je vais finir par craquer si j'en parle pas. Ma mère est malade. Elle a un cancer et elle va bientôt mourir... Le pire dans tout ça c'est que je commençai juste à reprendre espoir, à apprécier ma vie, et il a fallu que cette rechute vienne tout gâcher. Il a fallu que cette maladie de merde vienne reprendre ma mère. Je sais pas quoi faire Thomas j'essaye de lui faire croire que je vais bien et que je m'en sortirai quand elle ne sera plus là. J'essaye de montrer à mon père que je suis fort et que je ne craquerai pas. Pour lui, pour elle. Mais j'ai plus la force, j'en suis plus capable"

Il aurait tant voulu prononcer ces mots, ces phrases pour enfin se libérer, se sentir moins seul. Pourtant, il plaqua encore une fois sur son visage triste un de ces sourires atrocement faux dont il avait le secret et lança d'une voix faussement enjouée :

-"Alors ces bières, elles viennent?"

-"Euh... Oui, oui, elles sont au frigo" Le rouquin l'observa longuement, inquiet, puis, à moitié convaincu par le sourire triste, il ouvrit la porte du grand frigidaire et en sortit deux bières. Il en tendit ensuite une à son ami et passa une main réconfortante dans son dos, le soulageant un peu de tous ces maux. C'est à cet instant que la porte s'ouvrit avec fracas sur un Valentin titubant, une bouteille de Tequila dans une main, sa casquette dans l'autre. Il observa d'un œil méprisant la main de Thomas sur le dos de Maxence, leurs tabourets bien trop proches et il éclata d'un rire mauvais.

-"Alors, on m'avait caché que vous étiez en couple les filles"

-"Val', t'es bourré là, je vais te raccompagner chez toi" Thomas se leva et s'approcha doucement de Valentin.

-"Me touche pas Thomas!" rugit le brun aux yeux clairs. Il se tourna ensuite vers Maxence, ses yeux lançaient des éclairs, "Je suis qu'un connard égoïste après tout, je mérite pas d'être aidé, hein Maxence?" Le rider fit un clin d'œil en direction du brun, et mima le signe d'un baiser avec ses mains.

-"Ecoutez, je sais pas ce qu'il s'est passé, mais Val' je vais te ramener à ta chambre avant que ça dégénère vraiment ok?" Le rouquin attrapa le bras de Valentin et le tira vers la porte.

-"Alors Maxence tu dis plus rien? T'as perdu ta langue? Je t'intimide c'est ça"

-"Je vais le raccompagner Thomas, je m'en charge" décréta Maxence d'une voix sans appel, sous le regard étonné de son ami rouquin. Il attrapa à son tour le bras de Valentin qui tressaillit à son contact et s'engagea dans le couloir sombre, peinant sous le poids du corps alcoolisé du rider. Ils se dirigèrent lentement, pas à pas, vers la chambre de Valentin, abandonnant Thomas dans la petite cuisine éclairée.

Une fois devant la porte de bois sombre, le rider chancela et se laissa tomber contre le mur frais, abattu. Maxence l'observa quelques instants, méfiant, puis s'assit enfin à ses côtés, la fraîcheur du sol contrastant avec l'effervescence de sa rancœur. La minuterie de le la cage d'escalier s'estompa dans un grand clic et une douce obscurité s'empara de leur corps, se mettant enfin au même niveau que leur cœur.

Lorsque Valentin passa la main dans sa poche pour récupérer son téléphone, un bruissement d'étoffe se fit entendre, sa chemise frottant contre le pull de Maxence, son bras frottant son corps. Il le déverrouilla, et une chanson retentit soudain, faiblement, tandis que les battements du cœur du brun s'accéléraient rapidement.

(Shots-Imagine Dragons)

I'm sorry for everything
Oh everything I've done
From the second that I was born
It seems I had a loaded gun
And then I shot shot shot a hole through everything I love
Do I shot shot shot a hole through every single thing that I loved?

(Je suis désolé pour tout
Oh, pour tout ce que j'ai fait
C'est comme si j'étais né
Un pistolet chargé dans la main
Et puis je tire, tire, tire sur toutes les choses que j'aime
Pourquoi dois-je tirer, tirer, tirer sur toutes les choses que j'aime ?)

I am out of luck I am waiting to break
When I keep saying that I'm looking for a way to escape
Oh I m wishing I had what I'd taken for granted
I can't help you when I'm only gonna do you wrong
Oh I'm going to mess this up
Oh this is just my luck over and over and over again

(J'ai aucune chance, je vais bientôt tomber
Et je répète sans cesse qu'il faut que je m'en aille
Oh, j'aimerais avoir ce que je croyais avoir acquis
Je ne peux pas t'aider car je vais seulement te causer du tort
Oh, je vais tout gâcher
Oh, ce n'est que de la chance, encore et encore et encore)

Lorsque les dernières notes de la musique laissèrent place au silence, Valentin se releva, tituba légèrement déverrouilla la porte de sa petite chambre et planta ses prunelles claires dans celles de Maxence.

-"C'est ma sœur qui est à l'hôpital, je vais la voir presque tous les jours. Voilà pourquoi tu as du me croiser... Bonne nuit Maxence" Et, sans attendre de réponse, il referma lentement la porte de sa chambre, sous le regard stupéfait du brun.

Jeu InconscientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant