Le camp d'été: pour protéger mon coeur (pause)

~2~ Les autres campeurs

~Floch: treize ans~

L'intérieur du chalet est fait entièrement de bois et composé de quelques lits superposés au bout desquels se trouvent de vieux coffres en guise de rangement. D'autres campeurs de notre âge sont déjà arrivés et installés, discutant entre eux. Combien sont-ils nouveaux? Intimidé, je serre ma peluche contre moi en me rapprochant d'Eren. Tant que je suis à ses côtés, rien ne peut m'arriver. Il me l'a promis.

Alors que mon meilleur ami place nos affaires sur l'une des couchettes libres, je sens quelqu'un tirer sur la tête de Petite Pomme. Pris de court, ma peluche glisse de mes mains, se retrouvant dans la prise d'un étranger d'environ quinze ans. D'une tête que plus que moi, le jeune homme dévisage mon âne d'un œil moqueur. Son visage disgracieux empeste l'arrogance alors que ses courts cheveux pâles et vagué pendent de chaque côté.

-Le cabanon des gamins, c'est la Garnison, affirme l'étranger. On ne veut pas d'un gosse et de sa peluche parmi nous, tu comprends?

-Je...

Les mots n'arrivent pas à franchir mes lèvres, intimidé par cet être détestable. Tremblant, j'essaie de reprendre ma peluche, mais le garçon l'éloigne en utilisant sa taille supérieure. Je ne suis pas bien sans Petite Pomme. Mes yeux se remplissent d'eau bien que j'essaie de le cacher, sentant la panique m'envahir. J'ai besoin de ma peluche.

-Qu'est-ce que je vois? se moque l'inconnu. Est-ce des larmes dans tes yeux? Le bébé va pleurer simplement parce que j'ai touché sa peluche? Comme c'est mignon. Veux-tu une tétine avec ça?

-Rends-lui tout de suite Petite Pomme, ordonne Eren.

Mon meilleur ami a réalisé la situation, se retournant vers mon bourreau avec colère. Me connaissant mieux que quiconque, il sait que sans ma peluche, je peine à garder mon calme. C'est honteux d'être ainsi dépendant d'un jouet, mais cet âne m'a suivie dans toutes les épreuves que j'ai surmontées. Il est un symbole de ma nouvelle vie, un rappel que je suis un survivant. Les autres campeurs ont cessé de parler pour observer la scène, curieux de voir comment ce conflit va se terminer. Je n'ai pourtant rien fait à ce garçon hideux, donc pourquoi s'en prend-il à moi?

-Petite Pomme? répète l'étranger avec confusion.

-Ouais, c'est le prénom de cette peluche. Tu lui rends ou je n'hésiterai pas à venir la reprendre moi-même. Tu comprends ce que je dis?

-Ha là, là, quelles gamineries. J'vous jure, ce séjour commence mal.

Cette voix masculine ne provient d'aucun des deux garçons, mais plutôt d'un nouvel arrivant qui retire sans difficulté la peluche des mains du méchant avant de me la rendre d'un geste nonchalant.

-Cette peluche t'appartient, je crois? s'enquiert mon sauveur.

-Je... oui... merci.

-La prochaine fois qu'un imbécile tentera de te faire chier, n'hésite pas à lui donner un bon coup de pied. Vu sa tronche, il doit s'en prendre à toi juste pour se prouver qu'il n'est pas un laideron.

Je souris timidement alors que les autres garçons du camp rient, amusés par l'insulte du nouvel arrivant. Du même âge que moi, cette personne aux cheveux courts châtains a un visage rondelet et allongé. Malgré son surplus de poids, ses yeux noisette en amande reflètent une grande gentillesse.

-M-merci, bégayé-je.

-De rien, mec.

-Oh, mais quel héros ce Jean, s'exclame un garçon qui l'accompagne. À peine arrivé, tu viens déjà en aide à un petit gars en détresse. Quel bon cœur tu as!