Alistair Gardenian et l'Ordre des Gardiens

Chapitre 46: Le brassard

Les trois hommes adossés aux murs sont inconscients, deux sont d'âge moyen, l'autre est assez jeune. De visage et de corpulence banale, ces trois là pourraient être monsieur tout le monde et pourtant... Ils sont agités par une bien curieuse idéologie et un but des plus controversés. 

- "Tu les connais?" Demande Mici, en frottant ses mains.

Walter repose son visage sur ses mains jointes, ses yeux d'ambre bougent d'une personne à l'autre mais demeurent neutres. Il tourne la tête de droite à gauche, frustré.

- "Tu crois que ça veut dire quelque-chose?" Demande-t-elle, d'une voix basse. "Tu sais, comme les gangs ont des tatouages... Je me demandais si ce n'était pas la même chose. "

Walter hausse un sourcil, étonné. Les trois mains droites sont tatouées du même symbole. Un serpent tout ce qu'il y a de plus minimaliste, dont le charme est dans sa discrétion.

- "Je pense, ça ne peut pas être une coïncidence." Le gardien pose une main sur son menton, agenouillé face aux inconscients. "Ils doivent former une sorte de groupe. Plus on est nombreux, plus on a de chances de réussir. "

- "Un peu comme les clans de gardiens?" Propose Mici, perplexe. 

Il n'est pas rare de voir des groupes de gardiens s'habiller de la même manière ou prôner un même discours. En effet, afin de peser sur les décisions de l'assemblée, certains gardiens s'associent entre-eux afin de former des clans. Ils choisissent qui va et vient selon leurs critères, les liens du sang peuvent entrer en compte. 

À ce jour, on compte trois grands clans avec une influence non négociable sur l'Ordre des gardiens. Ceux-ci privilégient exclusivement les liens du sang afin de garder un certain "prestige". Vous ne pouvez donc y entrer à moins de vous marier à l'un des membres. C'est une tradition qui semble quelque-peu dépassée, mais qui subsiste dans ce monde à part.

L'enjeu de pouvoir des clans est immense. Si quelqu'un réussissait à rallier l'un d'entre eux à sa cause... Cela signifierait obtenir une certaine crédibilité vis à vis du premier Ordre de par l'avantage du nombre. Un avantage qui pourrait s'avérer utile... En cas d'éventuel coup d'État.

- "Faudrait savoir lesquels..."

Émilie porte dans ses mains un flacon vert pétillant, la fiole éveille sa curiosité.

- "Je t'avais dit de prendre des gants..." Mici se retourne, son regard d'émeraude est accusateur.

- "Je déteste les gants, ça me fait de l'allergie." 

Elle tend abruptement le flacon, quelques gouttes tombent sur le sol. Mici gronde intérieurement, saisissant une seringue en verre. L'instrument semble venir d'un autre temps. 

- "Cela fait bien longtemps que je n'ai pas fait d'interrogatoire moi-même."

Les trois hommes demeurent inconscients, yeux fermés et poches détroussées. Elle se place face à une silhouette de taille moyenne, simplement vêtue d'une chemise blanche et d'un pantalon de toile. De longues mèches blondes et rèches retombent sur son visage, cachant ses traits.

- "Allons-y..." Sans hésitation, elle brandit la seringue emplie du liquide pétillant. 

Deux iris bleus intenses, des pupilles noires et dilatées, de fines lèvres s'étirent dans un sourire acéré. La scientifique s'arrête net dans son geste, un mince souffle s'échappant de ses lèvres froides.