Chapitre 1 - RumbleTown

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Rumbletown.

Petite ville sans histories aux abords du royaume d'Astra et de la forêt spirituelle.

Dernier bastion humain avant le monde des esprits, Rumbletown fructifie grâce au centre de recherches alchimiques et aux intrépides curieux qui viennent y faire escale. Après tout, il n'était plus donné à tout le monde de voir un esprit depuis la trêve durable entre les êtres physiques et les êtres spirituels, respectivement confinés de part et d'autre de la frontière invisible qui leur permettait cette paix, qui elle, était bien visible sur la petite ville. Cela faisait maintenant un peu plus d'un siècle que le dernier litige avait secoué rues, maisons et champs durant la précédente Grande Guerre, et Rumbletown, ville frontalière qui n'avait rien demandé à personne, était en pleine expansion et vivait sereinement de bien belles années.

Ce midi, le soleil était haut, frappant le sommet de l'immense et impénétrable montagne spirituelle, berceau des esprits de ces monts. Dans le marché qui tenait place chaque matin dans toute la rue principale et malgré le nombre impressionnant de touristes aujourd'hui, les habitants de la bourgade étaient inquiets. Depuis quelques heures, des soldats appartenant aux prêtres de la montagne, gardiens humains de la frontière, faisaient des rondes en ville. La rumeur courrait qu'un esprit malveillant s'était échappé et que sa location n'était toujours pas connue.

« Il aurait brisé la barrière » disait l'un.
« J'ai entendu qu'il mangeait les rêves des enfants la nuit » disait un autre.
« Une bête immense et noire ! Assoiffée de sang, court dans nos rues ! » Criait une commère.
Plus on avançait dans Rumbletown, plus la rumeur grossissait. Maintenant, l'esprit malin avait trois têtes, deux bras et six yeux, crachait de l'acide et faisait pleurer les arbres.

Cet esprit, c'est elle, Eien. Et elle était bien loin de cette description improbable que les passants murmuraient près du petit coin de mur où elle se cachait. Sérieusement comment aurait-elle pu dépasser la frontière avec une apparence pareille ?! L'imagination des humains la fascinait des fois. Mais la partie sur son évasion elle, était bien vraie. Et elle n'avait aucune intention de rentrer !
C'est la première fois qu'elle visitait le monde humain et avait bien l'intention d'en profiter. Elle réajusta la capuche qui cachait ses traits et se réfugia dans une ruelle à l'approche des soldats. Ni une ni deux, elle fila entre les maisons de briques et poursuivit son chemin en priant aller dans la bonne direction. Enfin, plutôt une direction, vu qu'elle ne connait pas du tout l'endroit. Le plus important était de s'éloigner de la montagne. Elle marcha sur les pavés, laissant l'aura magique du monde spirituel derrière elle.

Après une bonne vingtaine de minutes de vadrouille en évitant les chemins fréquentés, la petite silhouette arriva à l'orée de la ville, entourée de champs. Fort heureusement, les patrouilles ne semblaient pas encore avoir été déployées dans ce coin. La jeune fille regarda une dernière fois dans son dos l'immense silhouette bleutée de la montagne, mais décidément aucun regret ne l'envahit. Pas même un pincement au cœur. Elle soupira et dirigea son regard vers l'horizon opposé. C'était ça maintenant, son futur. Sa mission. Elle devait le retrouver. Plus question de faire marche arrière, elle n'en avait plus le temps de toute façon. Elle s'élança, les blés fouettant ses jambes et ses bras bandés, soulevant sa veste alors qu'elle s'en allait vers l'inconnu. C'était une sensation inquiétante mais toute aussi grisante, et un sourire s'étira sur ses lèvres.

Malgré tout le beau discours qu'elle s'était fait dans sa tête une minute plus tôt, Eien s'arrête à peine dix mètres plus loin. Pas par remords, loin de là. Mais parce que quelque chose sur sa gauche avait piqué sa curiosité.

Pendant ce temps-là à la frontière de la ville, Seth était caché. Dans un buisson. Ou plutôt, il aurait voulu. Ça aurait été plus classe en fait. Car en réalité il était COINCÉ dans ce buisson. Qui en fait n'en était pas tout à fait un. Oui, la vie de Seth était compliquée. Le buisson était en fait des ronces à mûres. Et qui plus est, une des ronces de la propriété PRIVÉE du tavernier de la ville qui, s'il le trouvait coincé dans un de ses buissons adorés allait lui faire passer un sale quart d'heure.

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