ANGE ET DEMON, UNE LEGENDE D'ASGARD - TOME 3

Chapitre 27

(Loki songe)

Serrant la main de mon fils de toutes mes forces, je concentre toute ma puissance magique pour cautériser sa lésion et stopper l'afflux de sang. Une fois le sort accompli, je lance aussitôt un appel à l'aide d'une voix énergique :

- « Le prince est à terre ! A moi, soldats, dressez autour de nous un périmètre de sécurité pour me permettre de lui porter secours ! »

Réagissant immédiatement, le capitaine de mes gardes ordonne à une vingtaine d'hommes de faire cercle autour de nous pour assurer notre protection. A l'abri du danger, je peux ainsi me permettre d'examiner plus attentivement la blessure de Kay.

Même si la plaie est impressionnante, je constate en l'observant attentivement que, par miracle, la lame de l'enchanteresse a raté la veine jugulaire de quelques millimètres. Malgré mon épuisement, je devrais donc pouvoir assez facilement utiliser un sortilège permettant d'éviter une infection et d'accélérer la cicatrisation. Mon fils a perdu conscience quelques secondes mais, revenant peu à peu à lui, il tente de me parler :

- « Mon père, que s'est-il passé ? Où est Samia ? Est-elle en sécurité ? »

- « Je ne peux te répondre, mon fils. La jeune femme que tu as vue n'était pas la tienne, tu as été piégé par Amora. Je te demande pardon, je me suis laissé distraire par l'intensité du combat. J'aurais dû être plus méfiant, me douter qu'il s'agissait d'une illusion. Mais tout va s'arranger, maintenant... »

Les larmes aux yeux sous l'effet de la douleur, Kay se confie d'une voix sourde :

- « J'ai mal, papa, je n'ai plus aucune force. J'ai honte de pleurer mais j'ai terriblement peur. Je voudrais vous demander... »

- « Oui, tout ce que tu veux, mon fils. »

- « Je sais que vous n'appréciez pas beaucoup Samia. Mais, je vous en supplie, ne l'abandonnez pas ! Allez la délivrer et ramenez-la chez nous. Assurez sa protection une fois de retour sur Asgard. Promettez-le-moi... »

Emu, je pose un léger baiser sur les doigts de mon aîné :

- « Kay, je n'ai nul besoin de te faire une pareille promesse, car c'est toi qui protégeras à l'avenir ton épouse comme tu t'y es engagé le jour de votre mariage. Je vais te soigner puis tu resteras ici au repos pendant que Thor et moi irons la libérer. Vous pourrez ainsi être enfin réunis. »

- « Etes-vous sûr de ne pas me dire cela juste pour me rassurer, mon père ? »

- « Je te jure que non. Aie confiance en moi. Dès que j'aurai retrouvé mes forces, je pratiquerai un puissant envoûtement de guérison. Tu vas vivre et retrouver ta femme. Je l'ai garanti à ta mère, elle me tuerait si je revenais sans toi ! »

Kay émet un petit rire qui le fait grimacer de douleur :

- « Alors je peux cesser de m'inquiéter... J'ai beaucoup de chance que le plus grand sorcier des neuf mondes soit mon père... »

- « C'est moi qui ai de la chance de t'avoir pour fils. Tu as toujours fait ma fierté, même si je ne te l'ai pas assez dit... »

Peut-être pour la première fois de notre existence, je sens que nos deux cœurs, pourtant si divergents, battent à l'unisson. Ces événements dramatiques ont au moins eu le mérite de me rapprocher de l'unique enfant qui reste dans ma vie.

Alors que j'essaie de me libérer de la vase dans laquelle je suis enfoncée jusqu'aux chevilles, l'étrange torpeur qui engourdissait mon esprit s'efface peu à peu. Avec stupeur, je constate que le décor qui m'entoure n'a rien à voir avec ce que j'avais cru apercevoir : La clairière boisée est un enchevêtrement d'arbres dont les racines se perdent dans les herbes hautes des tourbières, l'étang lumineux n'est qu'un marécage glauque et de sombres nuages masquent les trois lunes d'Asgard. Je fouille sans succès dans mes souvenirs les plus lointains, jamais je n'ai entendu parler d'un pareil endroit à proximité du palais. Je n'arrive même pas à me souvenir comment j'ai pu arriver jusque-là sans qu'aucun garde ne me remarque. Comme je m'agite vigoureusement pour tenter de m'extirper de cette épaisse boue noirâtre, je constate avec frayeur que mes mouvements désordonnés ont l'effet inverse et que je suis à présent enlisée presque jusqu'à la taille. Essayant de respirer lentement pour retrouver mon calme, je sursaute soudain en percevant un éclat de rire cristallin venu de nulle part, bientôt suivi par l'étrange résonnance d'une voix qui me semble familière :