chapitre 4 : papier dans les flammes

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ça fait tellement longtemps que j'ai pas publié que j'ai passé 10 minutes à chercher le bouton "écrire" pour poster ce chapitre... #boulet


Contrairement à beaucoup de ses camarades, Adrian n'était pas de ceux qui méprisent la foule, ses clameurs et son agitation. Le voir endurer sans broncher aussi bien le vacarme de la salle principale des Trois Balais les jours de sortie à Pré-au-Lard que les jacasseries de ses coéquipiers lors des soirs de match trop arrosés étonnait d'ailleurs souvent son entourage, à qui il renvoyait l'image d'un garçon qui aimait sa tranquillité. Mais, en réalité, Adrian détestait le silence. Il ne pouvait pas vraiment se l'expliquer, mais l'absence de son l'angoissait terriblement. Pour lui, le cauchemar, ce n'était pas les histoires fantaisistes créées par son cerveau au plein cœur de la nuit, mais le silence qui l'accueillait après un réveil en sursaut et lui donnait l'impression que toute vie avait déserté le château. À cet égard, les ronflements de Lucian étaient une vraie bénédiction.

Quelque part, le Serpentard savait que le fait d'avoir passé son enfance à Hollow Bridge n'était pas étranger à son aversion pour le silence. Il ne s'en était pas rendu compte lors de ses premières années, bien trop occupé à gazouiller pour les beaux yeux de sa mère et à suivre Elsie dans toutes ses aventures, depuis les mauvais tours joués à leurs voisins Moldus aux expéditions jusqu'au portail du Nid aux Corbeaux pour en secouer les grilles dans l'espoir qu'il finisse par s'ouvrir et les laisser explorer le manoir, mais Adrian n'était pas capable d'envisager un endroit plus silencieux qu'Hollow Bridge. Les habitants, pour la plupart retraités, sortaient rarement de chez eux, les voitures ne remontaient pour ainsi dire jamais la route qui passait devant la demeure des Pucey et seuls la pluie et les corbeaux se sentaient suffisamment confiants pour hausser la voix de temps à autre. Avant, dans une autre vie, sa mère et Elsie rompaient également l'interdit tacite pour faire vibrer les murs de leur maison d'une joie de vivre qui, perdue dans Hollow Bridge, avait des relents d'illégalité, mais elles avaient déserté le village depuis si longtemps pour rejoindre Poudlard ou les cieux que l'adolescent n'était même plus en mesure d'affirmer qu'il n'avait pas fantasmé cette époque.

Fort de cette psychanalyse, Adrian n'avait jamais cherché à creuser plus en profondeur cet aspect de sa personnalité. Il méprisait le silence et accueillait avec plaisir les éclats d'émotion que les autres s'abstenaient de contenir comme lui s'évertuait tant à le faire, et cela lui suffisait. Cependant, il fallait croire que, désormais, il ne pouvait même plus se fier à ce qu'il avait toujours cru savoir de lui-même car, le 30 octobre, quand les délégations de Beauxbâtons et de Durmstrang firent leur entrée dans la Grande Salle sous les clameurs, Adrian se sentit aussitôt repoussé par l'entrain de ses camarades. Alors que chacun d'entre eux trouvait à se passionner pour quelque chose, que ce soit la présence de Krum, la beauté d'une des étudiantes françaises, le contraste flagrant des uniformes des deux écoles, la taille de Madame Maxime ou encore l'apparence terrifiante de Karkaroff, il balaya tous ces détails d'une indifférence qui ne lui ressemblait pas, tout en pensant qu'une vingtaine d'élèves somme toute aussi banals que lui ne valaient pas la peine qu'on fasse un tel foin pour les accueillir.

Même Paganelli, d'ordinaire plus enclin à rouler des yeux qu'à aligner son moral sur l'ambiance générale, se joignit à l'enthousiasme du reste des Serpentard et passa le banquet à discuter – ni en anglais ni en italien puisque, évidemment, il maîtrisait aussi la langue d'usage à Durmstrang, quelle qu'elle soit – avec la fille qui s'était assise à côté de lui lorsque la délégation avaient rejoint leur table. Alors que cela l'aurait normalement agacé, Adrian ne s'offusqua d'ailleurs qu'à peine de la jalousie qu'il décela sur le visage de Lulla quand elle remarqua à son tour le comportement de l'Italien, tout occupé qu'il était à se répéter à quel point il aurait aimé pouvoir quitter la Grande Salle s'il avait pu le faire sans attirer l'attention sur lui.

Le Fils du potionnisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant