Et si...

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Dressé face aux tableaux de contrôle, un homme s'empressait de rétablir l'alimentation générale. Sous la lumière rouge qui baignait la pièce d'une aura inquiétante, des mains  imprudentes couraient sur les interrupteurs et les boutons qui étaient à leur portée.

L'homme enchaînait les combinaisons. Frénétiquement, il appuyait sur les touches, bougeait les curseurs et levait les poignées tout en scrutant les écrans qui s'évertuaient à rester noirs.

« Allez ! rageait-il. Pourquoi ça ne veut pas ! »

Stark avait conçu lui-même le système d'alimentation et de protection de la forteresse. Depuis l'attaque de New York, sa paranoïa grandissante le conduisait à échafauder les pires scénarios. Il imaginait alors les stratagèmes les plus efficaces pour contrer les tentatives de ses potentiels ennemis.

Et cette fois encore, son esprit l'avait poussé à raccorder un réacteur Stark au système général en cas de sabotage ou de panne d'électricité. Mais pourquoi donc ce dernier n'avait-il pas pris le relais ? Il avait pourtant veillé à l'installer dans une pièce isolée, coffre-fort imprenable, à l'abri de toute attaque.

« Saleté de ... »

Il n'avait pas fini de pester qu'un bruit sourd, telle une machine se chargeant, l'interrompit. Un sourire de satisfaction égaya alors son visage quand les écrans se rallumèrent. Une lumière blanche ne tarda pas à remplacer la lueur rougeoyante qui avait mis sa rétine à l'épreuve.

Pourtant, un certain trouble le possédait toujours. L'iris imprimé des images qui défilaient sur les écrans suspendus face à lui, le milliardaire assistait avec stupéfaction à ce qu'il se tramait à l'extérieur.

La stupeur laissa bientôt place à de la déception qui le noya dans un flot d'amertumes pensées. Un pincement le saisit. Son cœur se cristallisa, comme rendu insensible par tant de déplorables révélations. Ne subsistait alors en lui que le sentiment d'avoir été trahi par les siens, par des gens qu'il estimait proches de lui et à même de comprendre son acte, aussi extrême soit-il.

Ses propres camarades, ses propres amis - du moins les considéraient-ils comme tels autrefois -, s'étaient lancés à l'assaut de la forteresse pour venir en aide à l'un des plus dangereux criminels qui avaient jamais foulé la Terre.

Étaient-ils prêts à tout pour défendre cet individu qui ne méritait pas la moindre considération ? Où était donc passé leur sens inné de la justice ? Où était cette si ronflante abnégation qui les poussaient alors à tout pour protéger leur foyer, leurs semblables ? Disparue comme leur entendement ? Ou bien avaient-ils été dupés par le plus fourbe des êtres ?

Car s'il l'avait voulu, Loki aurait pu mettre à genoux l'humanité tout entière. Il aurait pu la tenir en esclavage d'une seule main. L'idée même de voir ce tyran fou à la tête de son monde l'écœurait. Et s'il recommençait ? Car il en était sûr, il le referait, aussi certain que le chien qui mord son maître pour la première fois.

Seraient-ils alors vraiment prêts à le pardonner à nouveau ? Seraient-ils capables d'effacer son crime et de lui accorder la liberté ?

La miséricorde n'était pas de ce monde. Il n'y avait ni pardon, ni commisération pour les criminels, quels qu'ils soient.

Ce désir de vengeance, presque insensé, Stark l'entretenait depuis des années. Au fil du temps, cette colère sourde gonflait en lui, insidieuse, silencieuse. Elle se nourrissant de ses peurs, de ses angoisses telle une boule de pus suintante prête à crever.

Intarissable, cette soif de représailles n'avait jamais été aussi intense, aussi obsessionnelle... Ses camarades eux-mêmes n'avaient pas, semble-t-il, pris la mesure du monstre qui naissait dans l'ombre. Et il s'était bien gardé de les en informer...

L'Espoir d'une Renaissance (Loki - Tome III)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant