Chapitre 10 : Sous terre

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Comme nous étions au sous-sol, il n'y avait pas de fenêtres, si bien que la seule lumière naturelle qu'il aurait pu avoir, était absente... Néanmoins, des fleurs de cristal éclairaient la pièce, comme quand j'avais rendu visite plusieurs fois à Sofra. Ma mère me regardait.

« Combien de temps vais-je devoir rester ici ? Demandai-je, triste.

— Tout dépendra de toi. L'esprit à de nombreux pouvoirs. Je suis sûre que tu guériras vite. Quelle est la dernière chose dont tu te souviens ?

Je réfléchis quelques instants. J'étais à deux doigts de lui raconter mon rêve, sauf que ce n'était pas mes souvenirs. Puis, je me rappelai tout à coup, avec horreur, ce qui s'était passé juste avant que j'atterrisse ici.

— Je voulais aller chercher l'un des enfants qui était retourné voir sa mère, décédée. Or, je me suis faite attrapée. Ça m'a mordue... C'est affreux ! Deux parents ont été attaqués !

— Pourquoi deux ? Le père qui a été contaminé, s'est rapidement transformé en iżabok. Il s'agissait d'un ömbėlstik. Maintenant, il a quitté l'école, sûrement pour rejoindre Messack. Quant à la mère...elle se trouve avec les enfants.

— Non... Je l'ai vue être dévorée... Les enfants ont dit que c'était leur mère...

— Nous n'avons pas trouvé de corps. Es-tu sûre de toi ?

— Oui... Je l'ai vue... Et j'ai aussi vu son corps bouger, avant de me faire attraper...

— J'espère que tu as tort. Leur mère est une ömbëlstik, elle aussi...

— J'en suis certaine.

— Je vais en parler à Powâkk après avoir changé tes bandages, déclara Zri qui venait d'apparaître.

Ma mère m'obligea à porter un bandeau sur les yeux, pour ne pas que je puisse observer le spectacle immonde qui s'offrait à moi, quand iel retira tous mes pensements...

— Ça a l'air de guérir, commenta Zri.

Cela me dégoûta, mais ne me faisait pas mal pour autant. C'était sûrement grâce à un produit que l'on m'avait injecté. Quand ce fut terminé, je me retrouvai seule avec ma mère.

— Tu aurais aimé que j'ai un frère ou une sœur ? Demandai-je de façon maladroite.

— Pourquoi demandes-tu ça ? Tu sais bien que tu es fille unique.

— Oui, pardon. Tu as raison... C'est juste que j'ai découvert que tous les camarades de mon âge, dans cette école, sont mes sœurs et mes frères. Je me trompe ?

— Non, en effet. Comment sais-tu ça ? On te l'a dit ?

— C'est toi qui l'as avoué, le premier jour. Tu l'as même fait devant moi...

Elle sembla se rendre compte de son erreur.

— Oui, c'est vrai. Je n'aurais pas dû.

— Tu aurais souhaité avoir d'autres enfants avec lui ? Demandai-je, un peu gênée.

— Non. Déjà parce que le monde où nous vivons est dangereux... Tu sais, je crois que tous les parents de cette école ont fait un choix égoïste. Comment peut-on accepter de donner naissance dans un environnement aussi hostile ? Alors qu'ils savent que leur enfant va sans doute mourir ?

Elle disait cela avec beaucoup d'émotions...

— Je ne suis pas sure qu'ils apprécieraient cette remarque. Mais qu'est-ce tu veux dire par là ? Est-ce qu'ils savent ce qui arrive ensuite ? En venant ici ? Ce sont tous les amants de Powâkk ?

Elle comprit sûrement, qu'elle en avait trop dit.

— Ce sont des informations que tu auras plus tard, m'annonça-t-elle, me souriant et me caressant l'épaule. »

Pour aller mieux, je décidai d'écrire. Maintenant, je préfère utiliser le therme « chapitre », plutôt que de noter la date. Cela donne l'impression que ma vie n'est qu'un livre, car ces journées me paraissent si irréelles. Ça me rassure. Cela me permet d'oublier que toutes les horreurs que j'ai vécues ne sont pas qu'un simple mauvais rêve.

Je suis à l'hôpital depuis quelques jours. Zri m'affirme que je guéris, sauf que je ne perçois pas de changement. Nous sommes vendredi. Cela signifie que cela fait sept jours que je suis ici... Je commence à en avoir assez de ne pouvoir me lever et de devoir rester allongée.

Pendant tout ce temps, j'ai continué à voir la vie de ma mère, en rêve. Elle ne parlait toujours pas à Powâkk...

Enyeto venait me rendre visite, chaque journée. C'était mon seul ami, avec Sofra. Il me contait ses aventures dans cette école. Il racontait tellement bien les faits, que j'avais toujours l'impression d'y avoir assisté aussi. Les cours semblaient tellement intéressants... J'étais dégoûtée de ne pouvoir m'y rendre et je suppose que ça se voyait sur mon visage...

Il m'expliqua que chaque jour de la semaine était destiné à une matière. Le lundi matin était celle de ma mère : la voyance ainsi que les êtres magiques. Le mardi était pour la magie, le mercredi aux soins, le jeudi aux langues et le vendredi au combat. L'après-midi était réservé aux élèves aux pouvoirs spéciaux, ceux qui faisaient partis d'une catégorie particulière. Ce qui signifiait que j'aurai cours le lundi après-midi, ainsi que le mardi et le jeudi ; sans Enyeto puisque les autres ne pouvaient y assister.

Cela faisait donc deux semaines que nous étions ici. J'avais plutôt l'impression que ça faisait plus d'un mois...

La nuit, je n'entendais plus Örnėki aboyer car, j'étais sûrement bien isolée. Je me dis que ce n'était pas plus mal... L'entendre aboyer me rendait anxieuse...

La mère qui a été dévorée n'a toujours pas été retrouvée... Elle traîne sûrement dans l'école et cela me fait peur... Il y a des moments où je me dis que je devrais quitter cet endroit, peut-être que je guérirais plus vite, dans l'école de Messack. J'admets...que j'ai envie de devenir une dėtrix. Comme ça, je n'aurais plus à craindre ces créatures horribles...

Je décidai de dormir. J'allais, sans aucun doute, retourner dans le passé de ma mère. Je pourrais au moins en apprendre plus.

Celle-ci était descendue pour manger. D'habitude, Powâkk n'était pas là à ce moment-là, car elle lui avait fait promettre de rester loin d'elle pendant un moment. Or, cette fois, il avait décidé de pointer son nez.

« Qu'est-ce que tu fais là ? Lança-t-elle. Je t'avais demandé de me laisser tranquille.

— Je n'en peux plus de ne pas pouvoir te voir. Je pensai que je survivrai et que je t'oublierai petit à petit... Mais je crains que ce soit impossible.

— Tes mots sont ridicules... Cela ressemble à de la dépendance affective et je ne supporte pas les personnes collantes. J'ai besoin de liberté.

— Tu as peut-être raison, mais...

— Ecoute. Quand je repense à ce que j'ai vécu avec toi, je me demande comment j'ai pu laisser les choses aller aussi vite... Je n'étais pas moi-même. Nous nous connaissions depuis à peine quelques mois... Voilà pourquoi nous nous trouvons dans cette maison aujourd'hui. J'aurais dû prendre mon temps. Je n'aurais pas dû m'intéresser à toi.

— Je suis désolé, c'est de ma faute, fit-il, navré.

— Laisse-moi, maintenant, remarqua-t-elle, sèchement.

— Non, je ne peux pas...

Il s'approcha d'elle et la serra dans ses bras. Cette fois, elle ne le repoussa pas.

— Très bien, continua-t-elle en soupirant. Dans ce cas, faisons la paix. Nous allons devoir apprendre à vivre ensemble. »

L'Etrange Destin de Kaina (TOME 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant