Chapitre 40

4.3K 243 8
                                    

_ Je n'ai pas grand chose à dire… Ce n'est pas non plus un salaud ou je ne sais quoi, il ne m'a jamais frappé ou autre. Je ne sais pas trop ce qu'il me trouvait, et je ne sais pas trop ce que je ressentais pour lui. Même s'il était parfois romantique, il ne m'a jamais dit qu'il m'aimait, et je ne lui ai jamais dit non plus. Notre relation n'était pas très naturelle, et il semblait davantage heureux d'être proche de ma mère que de moi. On ne parlait pas beaucoup, et je ne pense pas qu'on avait grand chose en commun… Je n'étais pas vraiment heureuse, et je doute qu'il l'était vraiment. François a toujours détesté l'idée que je fasse des études en mécanique. Plus d'une fois il a voulu que j'arrête. Même si j'avais pris l'habitude de le laisser décider, ça, c'était hors de question. Il a fini par l'accepter, je crois… Ou se résigner, plutôt. J'étais docile et il pouvait décider de tout, tout en profitant des avantages de côtoyer ma mère, après tout. À notre majorité, il m'a demandé en mariage. C'était trop tôt et je n'avais pas envie, mais mes parents et lui ont décidé de tout sans même attendre ma réponse. On a fait une grosse cérémonie, et Dario n'a même pas été invité… Finalement François a acheté un appartement à Toulouse, et c'est là que ça a dégénéré. Il devenait de plus en plus autoritaire et rude dans ses propos. Je n'ai aucun exemple concret, mais il me parlait vraiment mal… Mon oncle disait qu'il était un serpent, et c'était assez vrai. François m'étouffait en répandant son venin. J'ai passé cinq années horribles où j'avais l'impression de ne plus être moi-même. Seuls le travail me rendait heureuse, et le café. Enfin bon… Je suis tombée enceinte, un accident, car on se protégeait. Au début je me disais qu'un couple sans amour ne pouvait pas rendre heureux un enfant, je voulais avorter…. Mais François est devenu adorable, superbe. Il voulait vraiment de cet enfant, et mes parents nous soutenaient. Alors j'ai accepté, et je me suis attachée à ce petit être dans mon ventre. Et puis un jour, j'étais à 6 mois de grossesse, et c'était vraiment difficile pour moi, je n'ai pas réussi à rentrer dans l'appartement de François. Il avait changé les serrures. Dario m'a appelé pour me dire que toutes mes affaires venaient d'être déposées au garage. J'ai finalement croisé François à son retour, et il a dit ne pas vouloir de cet enfant, et qu'il me quittait. J'étais à la fois perdue, énervée et surtout soulagée. Je suis rentrée au garage, Dario m'a énormément soutenu. Ça n'a pas été le cas de mes parents. Ils me reprochaient soudainement le départ de François, ma grossesse… Ils m'ont demandé d'accoucher sous X et d'abandonner mon fils. J'ai refusé, puis on a divorcé. Je suis donc retourné dans l'appartement de mon adolescence, et je suis devenue une mère célibataire ne pouvant compter que sur son oncle. 

Tout le long de son discours, Cléo tremblait et avait les larmes aux yeux. Elle fixait le mur, racontant son histoire comme si elle essayait de s'en détacher le plus possible. Je n'avais pas osé bouger, ni l'interrompre, l'observant juste, le cœur serré. J'étais vraiment très en colère contre ce François, et contre ses parents. Ne sachant pas du tout quoi faire, je m'approchai d'elle, et la pris dans mes bras en l'allongeant doucement sur le côté. Blottie contre moi, je l'entendis respirer difficilement, et je la connaissais assez pour savoir qu'elle se retenait de pleurer. Doucement, je l'embrassai sur le haut de la tête, en lui caressant le dos. La voix saccadée, elle murmura : 

_ Tu as pitié de moi, maintenant ? 

_ Bien sûr que non. Je te l'ai dit, tu es une femme admirable avec beaucoup de courage. 

Elle baissa la tête. 

_ Je suis une femme stupide qui est resté huit ans avec un homme qu'elle n'a jamais aimé et qui l'a saccagé mentalement. 

Je la serrai contre moi, en caressant cette fois ses doux cheveux. 

_ Je ne suis vraiment pas douée pour réconforter, ça n'a jamais été mon fort… Tu avais tes raisons pour rester avec ce type, et même si tu en as souffert, tu vas bien maintenant. Je pars du principe que le passé ne peut être modifié, mais qu'on peut s'en servir pour avancer. C'est cette expérience qui a fait de toi ce que tu es maintenant, Cléo. Sans ce débile, tu n'aurais pas Olivio, tu n'aurais pas ta complicité avec Dario, … Je n'ai pas pitié de toi, et tu n'es pas une femme stupide. Tu es Cléo Rossi, une mère extraordinaire, une nièce aimée, une tutrice bienveillante, une mécanicienne de talent, une bénévole dévouée, une amie géniale. François a brisé ta confiance en toi, mais je t'assure que tu es incroyable. J'ai tellement de respect et d'admiration pour toi...

Tomber amoureuse par accident (histoire lesbienne)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant