Souvenirs d'une douce folie

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C'était de la folie.

Après toutes ces années à essayer de guérir de lui, de son corps, de son odeur... La voilà qui était prête à replonger. A pieds joints.

Elle n'avait jamais compris réellement ce qui lui plaisait chez lui. Certains de ses amis avaient dit qu'il n'était pas très beau, plutôt quelconque. Trop grand, un peu trop mince peut-être. Elle, elle le trouvait diablement séduisant. Et elle savait qu'il dégageait ce quelque chose qui le rendait irrésistible. Il plaisait aux femmes. A toutes les femmes. Il avait un regard expressif, une attitude désinvolte, une voix posée et il savait s'exprimer. Il manipulait les mots aussi bien qu'il savait faire jouir avec ses doigts. Il pouvait aisément raconter des histoires et il le savait. Alors il contait, dès qu'un auditoire se constituait devant lui. Spontanément il se mettait en avant et racontait des histoires. C'est comme cela qu'elle avait fini par le remarquer. Elle, la rêveuse sans aucune confiance en elle, un peu timide et réservée, qui aimait écouter et s'imprégner des vécus pour nourrir son imaginaire. Elle l'avait écouté dans ce bar un peu sombre entouré de leurs amis, leurs pintes de bière posées devant eux. Sa voix couvrait à peine le brouhaha ambiant et la musique assourdissante. Il adorait raconter ses histoires de sexe, ses histoires d'ex, les aventures rocambolesques de ses années étudiantes. Les frasques de ses soirées alcoolisées, les 400 coups faits avec ses amis. Il était passionnant quand il parlait. Elle buvait toujours ses paroles. Petit à petit, c'était devenu un rituel. Chaque vendredi, direction le bar, les bières, la musique, et lui, pour l'écouter pendant des heures. Son regard finissait toujours par se perdre sur sa bouche et elle commençait à imaginer non sans honte ce qu'elle voulait subir de celle-ci.

Comment l'avait-elle connu ? Honnêtement ce n'était plus une information pertinente à ses yeux. Quand elle se rappelait de lui, c'était davantage des sensations qui lui revenaient en tête. Son bas-ventre qui se crispait à l'idée de le revoir, son cœur qui s'emballait quand il posait ses yeux sur elle. Et le souffle court qu'elle avait eu ce soir où penché l'un vers l'autre un peu à l'écart, ils avaient discuté de libertinage et de couple ouvert. Lors d'une soirée, elle avait parlé de ses parties de jambes en l'air à plusieurs. Et depuis, son regard avait changé sur elle. Elle sentait qu'elle était devenue une proie. Elle se voyait déjà comme un petit animal qui gambadait dans les champs, en narguant son prédateur qui se rapprochait inéluctablement.

Et puis un soir, l'alcool aidant, proie et prédateur avaient mouillé les draps de son lit. Dans son petit appartement, à quelques rues du bar durant une nuit chaude de printemps. Elle lui avait ouvert la porte, à moitié vêtue et ils s'étaient jetés l'un sur l'autre. Ce baiser. Érotique, humide, sauvage. Pourquoi les hommes à embrasser de la sorte étaient-ils aussi rares ? Chacune de ses caresses l'avait fait frissonner. Elle s'était sentie entièrement électrisée, comme si son corps ne pouvait réagir qu'à sa peau à lui. Pourquoi ? Quel mystère. Elle savait qu'elle n'était qu'un énième trophée pour lui, une conquête de plus, une groupie supplémentaire. Même si elle lui plaisait, s'il la désirait, même si peut-être il l'appréciait. Mais de toute manière, elle avait envie de lui. Ce n'était jamais assez, ses baisers, ses mains, sa queue, elle les voulait encore et encore. Gémir sous lui, crier son nom. C'était devenu une obsession. Le sexe avait rarement eu une saveur aussi exquise. Chaque coup de reins, chaque murmure dans le creux de son oreille, tout lui revenait en mémoire à la simple évocation de son prénom. Elle avait encore dans ses souvenirs la sensation de ses doigts en elle, de la façon dont en se cambrant elle le faisait gémir. C'était presque comme si elle se rappelait le goût de sa peau, de son sexe, de sa langue si habile. Elle avait tellement gémit et crié entre ses bras.

Il savait raconter les histoires. Il maîtrisait les mots, jouait avec les phrases. Il lui avait donc toujours dit ce qu'elle attendait. Qu'elle était désirable. Sexy. Qu'il avait envie d'elle. Il lui racontait des histoires érotiques. Lui décrivait ce qu'il avait envie de lui faire. Leur relation charnelle était complétée par une histoire épistolaire, dont chaque nouveau message enflammait son corps et son imagination. Elle s'était masturbé un nombre incalculable de fois en pensant à lui. Elle avait même pensé à lui dans les bras de l'Autre.

Il s'était écoulé quelques années depuis ces nuits moites printanières. Comme elle l'avait su dès le début, elle n'avait été qu'une femme parmi tant d'autres. Dès qu'il y avait eu une nouvelle à ces soirées au bar plus jolie, plus mince, un nouveau challenge pour ainsi dire, il s'était détourné d'elle. Elle avait pleuré, bien sûr. Pour faire le deuil de cette relation perdue, et puis pour l'humiliation reçue. Pour son ego. Mais la vie avait continué. Ils avaient donc poursuivi leur vie respective chacun de leur côté sans se revoir. Penser à lui faisait de moins en moins mal à mesure que le temps passait. Les amants passaient entre ses draps mais peu lui faisaient le même effet qu'avec lui. C'était rageant. Elle aurait voulu l'oublier. Le haïr. Se dire qu'il était mauvais au lit. Qu'elle méritait mieux. Mais les souvenirs étaient dans un coin de sa tête.

Et puis, elle l'avait revu.

Elle l'avait sans doute provoqué, cette situation. Mais le voir, jour après jour, avait réveillé en elle cette flamme, cette obsession. Il était assis en face d'elle quotidiennement, dans ce bureau trop fréquenté et trop bruyant. Elle voulait qu'il la prenne partout : sur la table, contre le mur, à même le sol. Toutes ses pensées ne fonctionnaient qu'avec deux mots : lui, sexe. Elle savait toujours qu'elle n'était qu'un bonus, que si elle se redonnait à lui, ça ne serait que physique et qu'il la délaisserait une fois qu'il aurait eu ce qu'il voulait.

Les regards avaient repris. Ses mains avaient effleuré ses fesses. Elle savait qu'il la reluquait, qu'il plongeait ses yeux dans les décolletés qu'elle rendait provocants exprès.

Il avait même fini par l'embrasser.

Elle avait perdu la notion du temps et de l'espace quand il avait fait mine de lui dévorer les lèvres et la langue. Dans ce bar différent de leur lieu passé, il s'était jeté sur elle et sur sa bouche dès que les autres s'étaient absentés de leur tablée. Il avait attrapé son visage et elle avait occulté leur environnement. Plus un son, plus une voix, même le bruit incessant de la musique... Tout avait disparu au profit de ces sensations. Leurs langues qui se mêlaient, leurs souffles chauds et les mains qui se baladaient sous la table. C'était ce qu'elle voulait.

Elle le voulait, encore, entre ses draps, entre ses reins. Elle voulait sa queue dans sa bouche, le faire jouir, qu'il la prenne sans ménagement ni tendresse pour rattraper ces années perdues. Puis tout de même avec tendresse finalement. Elle le voulait, lui et sa bouche, contre son sexe trempé d'excitation. Ses doigts taquins dans sa chatte bouillante, dans son cul étroit qui ne réclamait que ça. Jouir entre ses mains. Une nuit blanche, à s'épuiser mutuellement.

Voilà ce qu'elle voulait.

Avant de sortir de nouveau de sa vie.

Pensées CharnellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant