Sommeil.

297 18 133
                                    




__

Domaine du bataillon d'exploration, 27 décembre 840.

Levi porta une nouvelle fois ses lèvres sur sa tasse, gouttant à nouveau au gout amer du thé noir qu'il s'était préparé. Il en était à sa troisième tasse de la soirée. Il ne voulait pas dormir, et ne parvenait tout simplement pas à trouver le sommeil, ses pensées reflétant le moindre cauchemar à chaque fois qu'il daignait à fermer les yeux. Posé sur sa chaise de bureau, tentant de combler l'ennuis qui le rongeait d'une quelconque manière, il jouait nerveusement avec sa plume sur une feuille de papier, gribouillant toutes sortes de traits abstraits que même lui ne pouvait décrire.

Les heures passaient à une lenteur effroyable, et seules les aiguilles de la petite horloge, posée sur sa table de chevet, démontraient que le temps ne s'était pas arrêté. La dernière gorgée de son thé, à présent tiède,  glissa le long de sa gorge, laissant le gout âcre de l'infusion se diffuser une dernière fois sur ses papilles. Levi déposa sa tasse, agacé de ne rien pouvoir faire. Ses appartements étaient rangés de fond en comble, chaque tiroir trié avec soin, chaque poussière éradiquée avec précision.  La pointe de sa plume se brisa contre le papier tant il exerçait une pression anxieuse sur cette dernière. Une tâche d'encre se forma sur la feuille, et Levi jura intérieurement, se reprochant de ne pas avoir la capacité, pourtant vitale, de trouver le sommeil.

Le noiraud rassembla les feuilles, sur lesquelles il avait griffonné, en un tas, et referma son pot d'encre bleue marine, posant avec nervosité sa plume sur son socle en ivoire. Il se leva de sa chaise peu confortable, et se dirigea vers la porte de sa chambre, décider à rendre visite à la seule personne probablement encore réveillée si tard dans la nuit.

Le Caporal savait pertinemment qu'Erwin, cet acharné de travail, restait des nuits entières à s'avancer dans ses archives, y consacrant une bonne partie de ses heures de sommeil. Levi n'avait jamais compris cette obsession, lui qui détestait plus que tout le triage de documents. Toutefois, il ne pouvait s'empêcher de vouer un sentiment d'admiration envers le Major, qui parvenait à camoufler la moindre traces de fatigue. Si l'on ne remarquait pas les traits creusés et les cernes du blond, il était quasiment impossible de deviner qu'il dédiait ses nuits au travail, tant il avait toujours de l'énergie, à l'affût de la moindre stratégie à élaborer, prêt et serein à chaque discours qu'il devait donner.

Levi savait que, malgré qu'il ne trouverait pas plus facilement le sommeil dans le bureau d'un autre, il pouvait au moins se distraire avec les livres qui ornaient la grande bibliothèque de la pièce du Major. De plus, l'ambiance des appartements d'Erwin dégageaient un sentiment de bienveillance et de protection, qui reflétaient simplement la caractère naturel du blond. Dans cette atmosphère, Levi ne savait expliquer pourquoi, il pouvait se risquer à fermer les yeux sans qu'aucune vision morbide ne vienne hanter son esprit. C'est d'ailleurs dans le canapé vert émeraude du Major, que Levi avait passé les plus paisibles de ses nuits.

Il remit son t-shirt large, lui servant de tenue de nuit correctement en place, et sortit de sa chambre, faisant bien attention à verrouiller la porte derrière lui, vérifiant, comme à son habitude, s'il l'avait bel et bien fermée à clé. Marchant dans l'obscurité des couloirs, dans lesquels seuls les rayons de la lune s'infiltraient par les fenêtre, il se dirigea quasi-machinalement vers le bureau de son Major.

-

Signer, classer, lire, ranger. Là étaient les seules actions qu'Erwin exerçait depuis quelques heures. Cela ne le dérangeait pas forcément, il prenait conscience de l'énergie que cela lui prenait, mais il était tout aussi conscient de l'avance que cela lui créait pour les jours à venir. Il voyait le jour décliner au fil des dossiers qu'il terminait de classer, et parfois, observait même les premières lueur de l'aube apparaître dans le ciel.

Ce qu'ils méritaient de vivre.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant