PARTIE III

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Tout était si calme. Pas un son, pas un mouvement détectable, pas une brise sur sa peau. Étrangement paisible, les yeux clos, il tentait de reprendre lentement conscience de sa situation.

Il se souvenait des chocs - tous les chocs. La secousse dans son bras brusquement relâché, le corps percutant le sien pour le serrer avec force, son cœur propulsé hors de sa poitrine ; puis, avant la violence de la surface de l'eau et le froid le pénétrant tout entier, il avait fermé les yeux, s'adonnant une première et dernière fois à cette chaleur qui l'envahissait.

Il rouvrit les paupières.

Il s'était souvent demandé à quoi ressemblerait l'enfer, mais il devait avouer que pour une fois, ce qu'il avait devant les yeux échappait à toutes ses prédictions. Il pourrait résumer l'environnement présent par un seul simple mot : blanc. Immaculé, pour satisfaire son inclination poétique. Et c'était bien tout. Il n'y avait rien d'autre. Ni sol ni plafond, ni début ni fin, ni chaleur ni fraîcheur, ni relief, ni bruit, ni mouvement... Rien que du blanc à perte de vue.

Pourtant, il percevait une surface dure et plate, invisible, sous ses semelles. Il ne sentait pas le poids de l'eau qui aurait dû alourdir ses vêtements ; d'ailleurs, il ne sentait pas le poids de ses vêtements tout court, pourtant ils étaient bien là. Il tenta de faire un pas en avant, et il y parvint sans souci ; mais pas un son ne résonna dans l'immensité.

Était-ce à cela que ressemblait la torture éternelle ? Il s'en tirait un peu trop bien. Rester là, indéfiniment, seul avec ses pensées... À bien y réfléchir, peut-être était-ce là la pire forme de châtiment possible. Il s'efforçait pour le moment de conserver le plus longtemps possible sa sérénité précaire en repoussant ses souvenirs du mieux qu'il en était capable, mais ils affluaient malgré lui, de plus en plus nombreux, de plus en plus lointains, de plus en plus étranges...

Il ferma de nouveau les paupières pour tenter de réfréner la multitude d'images qui envahissaient soudain son esprit, fronçant les sourcils au fur et à mesure qu'il se rendait compte que certaines ne pouvaient absolument pas venir de lui.

Alors il réalisa, petit à petit, comme une certitude irréfutable, à la fois mortifiante et étrangement rassurante ; malgré la douloureuse confirmation qu'il n'avait jamais été rien d'autre qu'un monstre, il se sentait présentement égoïstement satisfait de savoir que Sherlock et lui étaient inexorablement liés ainsi.

Ses yeux étaient toujours clos lorsqu'il haussa un sourcil en se remémorant entre autres la vision incongrue d'un détective avec une truffe et des oreilles sur le crâne, mais il les rouvrit vivement, le cœur soudain affolé, lorsqu'il s'aperçut apparemment lui-même, ou plutôt son reflet dans une vitre sombre, sous les traits d'une jeune femme blonde, en train de...

Il secoua la tête pour se remettre les idées en place. Rien de tout cela n'avait aucun sens, pourtant la conviction incontestable qu'il s'agissait bien de la réalité s'était emparée de lui.

Donc, s'il comprenait bien... il devait patienter ici ? Sherlock vivrait encore une longue et heureuse vie, songea-t-il en souriant doucement pour lui-même. C'était tout ce qui importait, n'est-ce pas ?

Plongé dans ses pensées mélancoliques, il mit un moment à remarquer l'irradiation de chaleur dans son dos, pourtant anormale dans cet environnement. Comme en transe, il se retourna lentement pour rencontrer une sorte de lumière, émanant de nulle part (mais il avait abandonné l'idée de trouver une quelconque logique), à quelques pas de lui. Cependant... il ne lui semblait pas qu'elle ait jamais été présente, toutes les fois précédentes où il (ou qui que ce fut alors) était arrivé ici, et une légère excitation, à peine consciente, crépita soudain sous sa peau, son intuition lui soufflant d'emblée ce qu'il était censé comprendre. Enfin... l'heure était enfin venue !

𝐂𝐮𝐫𝐬𝐞𝐝 𝐒𝐨𝐮𝐥𝐬 | sʜᴇʀɪᴀʀᴛʏ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant