PARTIE IV

703 66 123
                                    

Le vent était doux ce soir-là. La brise faisait virevolter gentiment les feuilles des arbres, jouant avec les interstices entre elles pour laisser s'infiltrer par petites touches étincelantes la lumière rougeoyante du crépuscule. Les brins d'herbe sauvage s'agitaient allègrement lorsqu'elle venait les caresser, répandant dans un chuchotis pressé l'annonce de la nuit qui s'approchait à petits pas. Non contente de s'amuser avec les petites choses de la nature à sa disposition, elle se permit de faire voler délicatement les mèches dorées du jeune homme assis là, à même le sol, s'estimant certainement satisfaite lorsque celles-ci furent parées d'éclats par les derniers rayons du soleil.

Le jeune homme en question souffla doucement pour remettre ses cheveux en place, puis se redressa légèrement, dénouant ses bras enroulés autour de ses genoux pour étendre ses longues jambes, et enfouissant ses doigts dans l'herbe afin de trouver un appui plus confortable. Il respira profondément, s'emplissant de la tranquillité du moment et de la beauté du paysage époustouflant devant lui.

Malheureusement, si la seconde était incontestable, la première fut perturbée par un bruissement de pas caractéristique dans son dos. Cependant, loin de se sentir embêté par cette intervention imminente, le jeune homme sourit doucement, et attendit patiemment que l'intrus s'installe à ses cotés. Celui-ci lâcha un soupir audible de satisfaction en se laissant tomber dans l'herbe à sa gauche, et le rejoignit dans sa contemplation.

La vue était réellement magnifique. En contrebas s'étendait un immense lac, dont la surface imperturbable reflétait à la perfection les quelques arbres environnants et le ciel qui se teintait de rose pâle et de mauve derrière les montagnes qui pointaient au loin. Tout était paisible, et les deux jeunes hommes profitaient pleinement des quelques petits jours de repos qu'ils s'étaient accordés, loin de l'agitation de la ville où ils s'étaient installés il y a quelque temps. Ils appréciaient, sans vraiment l'avoir formulé, de se retrouver seuls loin du reste du monde ; le besoin d'intimité avec quelqu'un autre était nouveau pour eux, et s'ils ne l'avaient pas réellement défini de cette manière, ils étaient néanmoins heureux d'avoir l'occasion d'y goûter.

Et Sherlock avait réellement choisi l'endroit idéal. William se tourna vers son compagnon, qui souriait pensivement, la tête en arrière, les yeux fixés sur la voûte céleste.

« On voit vraiment bien les étoiles, ce soir..., fit remarquer celui-ci sans les quitter de son regard inquisiteur. C'est drôle... je n'y connais rien en astronomie, mais en les voyant là-haut, j'ai l'impression qu'elles sont familières. »

William laissa son regard s'attarder un instant sur le petit sourire de son compagnon avant de se tourner à son tour vers le ciel. La nuit claire, à peine tombée, commençait en effet à laisser entrapercevoir quelques joyaux inaccessibles scintillant dans l'immensité au-dessus d'eux. Tout semblait si calme, si tranquille, et à la fois délicieusement vertigineux. Seul, avec les milliers d'astres bien loin au dessus de lui, et Sherlock Holmes à ses côtés... il avait la sensation de ne rien maîtriser du tout. Et alors qu'il aurait du être terrifié par cette idée, il se sentait si bien... à sa place. Comme si, malgré ce qu'il avait toujours pensé, malgré les horreurs qu'il avait commises, malgré la mort prête à l'accueillir à bras ouverts il n'y a de cela pas si longtemps, il n'aurait dû se trouver nulle part ailleurs aujourd'hui.

« Ce sont les étoiles...

Il n'eut pas l'impression de parler réellement à voix haute lorsqu'il laissa distraitement le murmure s'échapper dans le vent, pourtant son compagnon tourna immédiatement la tête vers lui.

- Quoi donc ?

William sourit et compléta sans quitter le ciel du regard :

- ... les étoiles tout là-haut qui gouvernent notre existence.

𝐂𝐮𝐫𝐬𝐞𝐝 𝐒𝐨𝐮𝐥𝐬 | sʜᴇʀɪᴀʀᴛʏ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant