Chapitre 1 - Mackenzie

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11 ans plus tard

J’ai l’impression d’avoir passé des semaines à fixer ce plafond, d’en connaître désormais chaque nuance, chaque imperfection. Mes écouteurs enfoncés dans mes oreilles diffusant ma playlist spéciale déprime, j’ai bien cru que mes larmes allaient finir par me noyer.

Je ne suis pas sortie de cette chambre depuis trois jours, incapable d’affronter les monstres qui s’y cachent. En grandissant auprès de Soen et Elijah, j’oublie parfois ce dont ils sont capables. Je les hais. Tous les deux. Je les déteste avec tellement d’avidité qu’il m'est impossible de dormir une seule nuit sans imaginer leur mort, causée par ma main.

Une nouvelle larme roule sur ma joue, moi qui pensais mon stock épuisé, il n’a visiblement de cesse de se renouveler. Je serre plus fort Oscar, cet ours en peluche contre ma poitrine. Vieux vestige d’une vie dont je ne garde que très peu de souvenirs, il ne m’a pas quitté depuis l’incendie… et la mort de ma mère.

Je monte le volume de ma musique plus fort lorsque j’entends toquer à ma porte, sans aucun doute Elijah. Soen est un gros enfoiré sans cœur qui doit actuellement jubiler de me savoir au bord du gouffre avec l’intention d’y sauter. Elijah est également un enfoiré sans cœur, mais pour une raison que je ne m’explique pas, il ne supporte pas me voir triste.

Pourtant, ils font tout pour. A croire que c’est devenu un jeu : quand est-ce que la petite Mackenzie se foutra en l’air par notre faute ?

Du coin de l’œil, je vois la porte de la chambre s’ouvrir. Comme prévu, Elijah apparaît, un sourire triste aux lèvres. Je vois ces dernières bouger mais la voix de Lewis Capaldi couvre largement celle de mon bourreau. Dans un autre monde, dans une autre vie, j’aurais adoré Elijah, comme on aimerait un frère, je suppose.

Si on parvient à faire fi de ses nombreux vices, c’est un homme tout à fait charmant avec un sens de l’honneur indétrônable. Celui qu’il est la nuit n’a rien à voir avec l’homme qu’on côtoie le jour. Personne ne pourrait se douter que derrière cette mine attrayante, son sourire angélique et ses cheveux blonds se cache en réalité un monstre qui s’amuse à tuer pour le simple plaisir de le faire. Ses yeux verts d’une profondeur extraordinaire, paraissent toujours doux aux yeux du monde, il ne laisse jamais transparaître la moindre horreur qui l’habite. Sa mâchoire carrée contraste avec les traits de son visage, relativement fins pour un homme. Aucune trace d’un quelconque mal, d’un quelconque meurtrier. J’ai essayé de comprendre, il m’a simplement répondu qu’il ne valait mieux pas. Je m’accorde à ses dires, si je venais à comprendre, je ne vaudrais pas mieux que lui.

Le lit s’affaisse sans que je ne bouge pour autant. Lentement, la main d’Elijah se dépose dans mes cheveux comme le ferait un père. Il est de douze ans mon aîné, approchant à grand pas de son trente-et-unième anniversaire, tout comme Soen. Pourtant, contrairement à ce dernier qui s’est toujours montré froid et distant avec moi, comme si j’étais responsable de ma présence dans sa vie, ou de la leur dans la mienne, Elijah lui, s'est toujours montré fraternel avec moi, voir paternel. Pour mon plus grand malheur.

Il tire sur le câble de mon écouteur, m’arrachant un grognement désapprobateur.

— Je sais que tu nous en veux, déclare-t-il doucement.

— Le mot est faible, je crache.

Il ignore ma remarque alors que je persiste à ne pas le regarder. Dans un coin de ma tête, ma haine n’a jamais cessé de croître. Ce qu’ils ont fait il y a quelques jours a fini d’achever cette dernière, désormais à son paroxysme.

— Nous n’avions pas le choix, Kenz.

Kenz. Seul lui me nomme ainsi. Les amis que j’ai pu me faire en allant au lycée ou à l’université m’ont toujours surnommé Kenzie ou Mack. Soen, lui, se contente de mon prénom et c’est parfait ainsi.

The children of Fareden Tome 1 Broken Fate [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant