Chapitre 2 : Mackenzie

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— Tu penses qu’il aurait pu fuguer ? me questionne Emy en observant les avis de recherche tapissant les murs de l’université. 

Non. Il est au fond de mon jardin.

— C’est possible. 

Emy passe sa main dans mon dos, le caressant de haut en bas avec une délicatesse qui lui est propre. Mon attention, elle, reste obnubilée par la photo d’Hugo, au centre de l’affiche. Il n’était pas le plus beau de la fac, ni le plus sportif, ni le plus intelligent, mais il avait ce truc en plus qui me faisait me sentir à la maison. Sur le cliché, on le voit sourire à pleines dents, ses deux fossettes creusant ses joues bien apparentes. Il avait ce genre de sourire communicatif, celui qui faisait craquer tout le monde. Je crois que c’est ce que j’aimais le plus chez lui. Il le gardait en toute circonstance, même lorsque le ciel semblait lui tomber sur la tête, même lorsqu’il était stressé pour les exams, il trouvait toujours le moyen de sourire et faire sourire les autres. 

Je déglutis difficilement en lisant la phrase sous la photographie demandant de contacter le numéro pour les personnes disparues si nous avions une quelconque information susceptible d’aider les forces de l’ordre à le retrouver. J’ai été tentée de le faire… et puis je me suis rappelée que personne ne pourrait venger la mort de ma mère et celle d’Hugo si j’étais six pieds sous terre. 

— Hugo ne serait jamais parti sans t’en parler, crache Jackson. 

C’était son meilleur ami et depuis sa disparition, ou son meurtre pour être précise, il n’a eu de cesse de m’appeler. La police m’avait déjà interrogée, je n’ai aucun compte à rendre à Jackson. Je comprends son chagrin, ne pas savoir est peut-être encore plus horrible que d’être au courant, mais je ne peux pas dénoncer Soen et Elijah. Égoïstement, je ne suis pas prête à mourir. 

— Jackson, s’il te plaît, temporise Emy, c’est compliqué pour vous deux. Ce n’est pas le moment de vous prendre la tête, vous devez vous montrer solidaires, pour Hugo. 

Compliqué ? Compliqué ?! J’ai vu mon petit ami se faire égorger alors que nous faisions l’amour. Son sang a coulé entre mes lèvres puis dans ma gorge. J’ai dû prendre sept douches pour retirer toute cette hémoglobine. Sept. J’ai vidé le ballon d’eau chaude au bout de la troisième, mais j’étais persuadée qu’il en restait dans mes cheveux, sur mon visage et ces fichues tâches sous mes ongles… elles ne voulaient pas partir. C’est finalement Elijah qui m’a sortie de là, faisant fi de ma nudité. Je n’ai même pas su l’en empêcher. Sous le choc, je l’ai laissé me sécher, m’enfiler un pyjama et me traîner dans mon lit. Je suis restée à contempler le plafond durant trois jours et trois nuits. 

Je vis avec ceux qui lui ont fait ça. Je vis avec ceux qui ont tué ma mère. Par peur, par lâcheté, ou par je ne sais quelle autre faiblesse, je n’ai jamais été capable de les tuer, ou même de les dénoncer. Si je l’avais fait, Hugo ne serait pas placardé sur ce mur mais à côté de nous. 

Non, décidément, « compliqué » n’est pas le terme que j’utiliserais.  

— Ce que je veux dire, reprends plus calmement Jackson, c’est qu’Hugo n’aurait pas fugué, il n’avait aucune raison de le faire ! 

— On ne peut pas savoir ce qui se passe dans sa tête, souffle Emy, il allait peut-être mal.

— C’est mon meilleur pote, j’aurais su si quelque chose n'allait pas ! 

J’observe les deux se fusiller du regard alors que la boule présente dans ma poitrine ne cesse de grossir. 

— Tu as l'empathie d’un lion qui a la dalle, Jackson ! Il aurait pu te le dire que tu n’aurais toujours rien compris. 

The children of Fareden Tome 1 Broken Fate [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant