DURANT LES DERNIERS jours passés dans leur appartement, Madeleine avait scruté le ciel, guettant un signe divin. Cependant, lorsque vint l'heure d'abandonner leur foyer pour affronter les rues de Minneapolis, il apparut évident que Dieu ne les accompagnait pas.
Malgré la mi-juin, les nuits et les matinées s'avéraient fraîches. Les amants avaient pris tout ce qu'ils pouvaient emporter : des vêtements chauds, des couvertures, de la nourriture pour la route, et l'argent qui restait dans le portefeuille de Daniel.
Soixante-dix-neuf dollars et soixante-deux cents, c'était tout.
À l'époque, cela représentait l'équivalent d'environ sept cent soixante-sept dollars. Ils ne pouvaient pas se permettre de rester dans leur appartement et de payer une semaine supplémentaire. Ils devaient partir en quête d'un lieu de vie bon marché, où ils pourraient temporairement s'installer pour tenter leur chance à nouveau. Ils espéraient que Dieu, ou toute autre force supérieure, aurait quelque chose de mieux à leur offrir que de les laisser à leur sort dans les rues d'Amérique.
Devant le motel, le jeune couple fait halte, attiré par le panneau lumineux indiquant un tarif de dix dollars la nuitée. Leur dessein est de demeurer sur place durant sept jours et d'aspirer à ce que Daniel trouve rapidement un emploi. En coupant le moteur, il se tourne vers sa femme et observe Guinness sur ses genoux, qu'elle n'a pas voulu abandonner. La vue des ecchymoses sur son visage le remplit de tristesse et de colère. Il regrette de l'avoir laissée seule après l'incident. Il était parti en trombe avec la voiture, cherchant désespérément à trouver Tab pour lui éclater la tête contre un trottoir. Mais, évidemment, débusquer quelqu'un dans une ville comme Minneapolis n'est pas une mince affaire. Il était finalement rentré bredouille à l'appartement, se reprochant son comportement.
Madeleine regarde par la vitre, caressant la fourrure de l'animal. Elle est encore bouleversée par les événements, sursaute au moindre bruit et évite les endroits bondés. Elle semble souvent distraite, dépendante de Daniel, qui essaie de la soutenir du mieux qu'il peut.
— Ma chérie, murmure-t-il, peut-être que nous ne devrions pas garder le chat. Les choses sont déjà assez compliquées comme ça.
La jeune femme le contemple un instant, muette. Daniel finit par ouvrir la portière et par se diriger vers la réception. Madeleine suit du regard sa silhouette avant de reporter son attention sur le chat. Des larmes perlent au coin de ses yeux.
La jeune femme éprouve alors le besoin de s'étirer et de faire quelques pas. Ses jambes sont lourdes et la nausée s'empare d'elle, comme souvent en début de soirée. Elle descend de la voiture, Guinness dans les bras, et scrute l'endroit où ils s'installeront pour un temps. Bien que le motel ne soit pas idéal, il s'impose comme la seule option envisageable. Un lieu peu engageant, situé à quelques mètres de l'autoroute.
Au bout d'une dizaine de minutes, Madeleine aperçoit son mari qui revient, accompagné d'une petite femme au menton pointu.
— Pas de chat ici, clame-t-elle, désignant Guinness. Les animaux ne sont pas admis !
Daniel s'immobilise et se tourne vers elle, contrarié.
— Je vous ai dit que j'allais lui annoncer moi-même. Je vais dire à ma femme qu'elle n'a pas le droit de garder le chat dans votre motel de luxe, rassurez-vous.
La réceptionniste reste immobile, fixant Madeleine et le chat. Daniel extrait l'animal de son étreinte et le dépose avec précaution sur la banquette arrière. Il ouvre le coffre pour sortir leurs bagages.
— Il va faire ses besoins partout, murmure-t-il en jetant un coup d'œil à Guinness.
— Attends, intervient Madeleine. Laisse-moi faire quelque chose.
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Kuklos
Ficción GeneralUSA, juin 1960. Dans une petite ville de Louisiane, le jeune Daniel Spillman étouffe, couvé par une mère possessive et un père l'accablant de brimades et de coups. Un jour, une jeune missionnaire, prénommée Madeleine, frappe à la porte de cette fami...