- Monsieur Humbert ? Que vous arrive-t-il ?
Ma respiration se fait haletante. De l'air. Il me faut de l'air.
- Je... Je ne me sens pas bien.
- Vous vous voulez que j'appelle quelqu'un ? Où que je vous apporte un verre d'eau ?
J'ignore sa remarque et commence à penser à voix haute.
- Boire un verre, un verre. Du vin ? De l'alcool ? Je... J'en ai déjà bu ? Quand ?
Je prends ma tête dans mes mains, assailli par une violente migraine. Il y a quelque chose qui se cache là-dessous. Je veux savoir.
- Vous essayez de vous souvenirs !? réalise soudainement la chercheuse. Arrêtez ! Vous ne vous êtes pas encore remis, ne forcez pas !
Je plante mon regard dans le sien.
- J'ai l'impression que si je laisse l'occasion passer, je perdrai cette piste. Il faut prendre les choses dès qu'elles arrivent, où elles disparaissent.
Mme Perret se tord les mains, à moitié convaincue.
- Je ne tiens pas particulièrement à ce que vous vous mettiez dans tous vos états à cause d'une réminiscence qui vous serait revenue par ma faute...
- Je ne vous en voudrai pas. Et puis, vous avez dit que vous m'aideriez, non ?
- Certes, mais j'ai peur qu'un souvenir tourant autour de l'alcool soit très bon pour votre moral. Vous devriez peut-être creuser dans votre mémoire mais sur un sujet certain d'être positif...
Je hausse les épaules. Elle commence à me taper sur les nerfs. Je comprends son raisonnement, mais il s'agit de ma personne. À moi de décider de ce que je fais. De toute façon elle ne pourra pas m'en empêcher.
- C'est un risque à prendre.
Elle hésite encore un moment, puis finit par céder.
- Très bien, je marche. Mais promettez-moi de ne pas vous mettre en danger en faisant ça.
- Ça ira. Par contre, vous devriez sortir, au cas où je deviendrai violent. Je ne veux blesser personne cette fois-ci.
La chercheuse croise les bras.
- Au contraire, mieux vaut que je reste ici pour vous calmer.
Elle est déterminée, je ne parviendrai pas à la faire changer d'avis. Elle m'adresse un sourire qui se veut rassurant, mais tout ce que je discerne, c'est cette lueur éteinte, qui un court instant à traverser ses yeux. Comme lorsque je l'ai rencontrée pour la première fois.
Je me concentre. Quel est le lien entre l'alcool et mon passé ? Combien de fois en ai-je bu ?
La réponse me vient naturellement. Une fois. Il faut dire que vu le dégout que je semble éprouver, je n'ai pas du boire beaucoup.
Mais c'est bien la seule information que j'obtiens. Je n'arrive pas à saisir le reste. Tel un ballon troué, j'ai l'impression que ce souvenir me quitte, alors que je venais à peine de le trouver.
J'enrage.
Pourquoi rien ne vient ? Est-ce que je ne souhaite pas sincèrement me rappeler maintenant que j'ai une petite idée de ce qui peut m'attendre ? J'avais pourtant décidé de ne plus fuir. Je suis encore un lâche. Je ne dois pas avoir de courage. Je n'en ai jamais eu. Après tout, une brute comme moi, qui s'en prenait aux plus faibles, n'a jamais dû avoir de force.
- J'ai peut-être une suggestion.
La voix de Mme Perret me sort de mes pensées.
- Oui ?
- Quand ce passait votre souvenir ?
- J'avais une vingtaine d'années... (Je hausse un sourcil ne comprenant pas où elle veut en venir.)
- Vous devriez chercher dans la même période.
- Pourquoi ?
- Je pense que si vous avez été si bouleversé après vous être souvenu, c'est car les événements responsables de votre perte de mémoire font partie de ces années-là.
Elle a vu juste. Je le sens. Je le vois.
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Fragiles Ailes de papillon
Short Story/cette histoire va avec "à des années lumières", à lire avant, après, ou jamais/ Un homme avec des trous de mémoires ? Que peut-il bien se cacher derrières ses souvenirs arrachés... (Ouais, j'ai pas d'idée pour le résumé, je reviendrais dessus un de...