GIULIA
Séduis puis détruis. Sa phrase résonne comme un disque rayé.
Je devrais être surprise, attristée même, à l'idée que mon père me vende à l'ennemi pour sauver sa propre peau. Et même s'il tente de cacher l'objet de ma mission au nom de notre famille, je ne suis pas naïve au point de croire qu'il le fait pour nous.
C'est dans le doute et l'impatience que je vis ces derniers jours depuis notre rendez-vous. À chaque instant, je m'attends à l'arrivée d'hommes ou de femmes qui seraient prêts à m'embarquer.
Selon les dires de mon père, les visages devraient m'être familiers à la suite des photos dans l'enveloppe.
Pour m'assurer de ne pas percer ma connaissance, j'ai brûlé chaque feuille dans ma cheminée. Elles sont réduites en cendres désormais.
C'est un orage terrible qui me sort de mes pensées. On définit ce temps comme « un trouble qui éclate ». Je crois donc aux signes de la nature.
Pour passer le temps, j'aime m'instruire. Comme apprendre de nouvelles langues.
Ces dernières semaines, je travaille intensément l'espagnol. Dans notre milieu, c'est une langue souvent parlée. Nous avons souvent tendance à faire affaire avec le Mexique, alors c'est primordial que je sois parée à chaque situation.
Si demain, je dois reprendre les rênes, j'ai à assurer l'honneur de mon nom.
- Muévete o te mato... Muévete o te mato.
Ce qui veut dire « bouge ou je te tue. »
Les adversaires, les collaborateurs et les recrues viennent souvent des quatre coins du monde et je sais à quel point ça leur est perturbant qu'on comprenne ou parle leur langue.
Toute mon enfance, j'ai eu droit à trois heures par jour afin d'apprendre différentes langues. Je maîtrise le français, l'anglais, le suédois, le russe, l'allemand et désormais l'espagnol.
- Baja...tu arma. (baissez votre arme.)
Mon accent italien et ma voix légèrement cassée ont tendance à perturber la compréhension des mots. Il est alors essentiel pour moi de revoir la prononciation à son maximum.
- Baja tu arma.
Mon téléphone sonne. Le nom d'Antonio s'affiche sur mon écran.
Je referme à contrecœur mon carnet et décroche. Le visage trempé de mon meilleur ami apparaît.
Je vois à son torse-nu et à sa serviette qu'il sort de la douche.
Penchée pour récupérer mon paquet de cigarettes, j'en sors difficilement avec une main. Entre mes lèvres, il suffit d'un coup de briquet pour que je puisse relever la tête et rejeter la fumée.
- Giulia, ta chemise est mal fermée.
Je rigole légèrement et croise le tissu en soi, avant de me mettre à étudier ses pupilles dilatées.
Antonio est mon meilleur ami, mais il est un homme. Je n'ai jamais été attiré par lui, pour la seule et bonne raison, que c'est dangereux pour lui.
Je sais bien que je suis une femme qui lui plaît, et je ne m'en cache pas, contrairement à lui.
- Tu étais au courant, pour la mission.
Dis-je d'un sourire faux. Ça m'a blessé qu'il n'ait pas songé à me le dire plutôt. Je ne trouve pas tolérable de laisser sa meilleure amie être utilisée par des hommes à leur guise, pour une histoire minable de vengeance.
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Mafia Segreta (première partie réécriture : 01/11)
RomanceGiulia Pavarotti, jeune mafieuse italienne au caractère affirmé, n'a plus le choix. Pour sauver son père, elle doit infiltrer l'un des plus gros cartels des États-Unis. Sa mission : obtenir un maximum d'informations pour le détruire de l'intérieur...