Chapitre 4

8 2 0
                                    


Je tournais en rond dans ma chambre, furieuse, de ne pas avoir su tenir ma langue. J'avais su presque dès le début que je faisais une belle connerie, mais je n'avais rien fait pour contenir mon satané caractère. Et voilà qu'il m'assignait une mission comme pour me punir d'avoir été trop loin.

J'avais une folle envie d'aller le voir et de lui balancer mon poing à la figure avant d'envoyer tout valser. De fuir toute cette vie merdique sans me retourner. Cette existence, cette hiérarchie pyramidale, ces nobles, tout cela commençaient à me rendre malade. Tout ce que j'entendais durant la journée c'était fait-ci, fait-ça. Nous étions dépendants d'un maître 24 heures sur 24, et cela même si nous ne le désirions pas. Même dans le monde des humains ont ne travaillaient pas autant, ni aussi longtemps. Six cent ans, n'avais-je pas assez donné ? J'étais devenue exécutrice malgré moi. Thadéus m'avait promis de me libérer si j'honorais mes missions sans poser de questions. Non seulement, je n'avais jamais vu la moindre liberté poindre le bout de son nez. Mais en plus, je me retrouvais de nouveau enchainée pour le siècle à venir. J'avais de la haine à revendre contre tous ces nobles de pacotille.

Will frappa à ma porte au moment même où j'enfilais un bustier en cuir en remplacement de mon débardeur. Il pénétra dans ma chambre sans même attendre que je l'invite à entrer. Malheureusement pour lui, ce n'était pas le bon soir.

Dos à la porte, j'attachais les liens de mon bustier sur ma poitrine tout en le fusillant du regard par-dessus mon épaule.

-- Ne te gêne surtout pas ! Ce sont mes quartiers, et j'apprécierais que tu n'y rentres pas comme dans un moulin.

Will leva les mains en signe de paix alors que j'attrapais mon pantalon étalé sur le lit.

-- Du calme, je suis de ton côté.

Je me trémoussais sous ses yeux afin de glisser mes fesses au plus vite dans mon pantalon en cuir souple. La petite panoplie de l'exécuteur selon l'ancien maître de clan. Bien, que cela ne me gênait pas, j'adorais ma tenue de travail.

Mais là n'était pas le problème. Mon souci pour le moment était ce type qui se croyait tout permis, et qui avait été à deux doigts de découvrir l'un de mes nombreux secrets que je cachais aux membres de mon clan. Je crois que j'allais devoir être encore plus clair.

-- Et ? Ce qui ne doit pas t'empêcher d'attendre qu'on t'invite à entrer. C'est la dernière fois que je me répète, Will !

Mentalement, je me promis dorénavant de toujours fermé à clef. Will prenait de plus en plus de liberté qui ne me plaisait pas, mais alors pas du tout. Depuis qu'il m'avait déclaré ces sentiments que j'avais gentiment rejetés, il pensait avoir un passe-conduit. Il venait de nouveau de m'en donner la preuve.

Il se passa la main dans les cheveux, gêné.

-- Pardonne-moi.

Complètement indifférente à ces excuses, je glissais mon sabre dans son fourreau attaché à mon dos. Une série de petits poignards affûtés et des shurikens dans un holster de cuisse que je serrais avec fureur. Mon fouet en argent en guise de ceinture et deux poignards incurvés en bas des reins, le tout sous une longue veste en cuir que j'aimais tout particulièrement.

Prête, je m'apprêtais à sortir quand il m'agrippa le bras, et comme je l'avais dit plus tôt, ce n'était pas le bon moment pour me chercher des poux. J'étais assez remonté comme ça. Alors je lui grognais dessus en lui montrant les crocs.

-- S'il te plait, Jo ! Me dit-il avec douceur pour ne pas m'énerver plus qu'il ne le faisait déjà.

Je le forçais à me lâcher, et me tournais vers lui, furieuse. Putain ! Mais ne voyait-il pas dans quel état j'étais ? J'avais pris cent ans de plus, bordel !

-- Nous sommes attendus.... Conclus-je décidée à écourter son petit laïus qu'il me répétait depuis des jours.

-- Je t'aime Jo, lâcha-t-il tout simplement.

Je fermais les yeux pour me calmer. Je le savais ! Par contre lui, qu'est-ce qu'il n'avait pas compris la dernière fois que je l'avais jeté ? J'avais pourtant été très clair.

-- Je n'ai pas les mêmes sentiments que toi, alors laisse tomber Will, d'accord ?

-- Jamais ! Je tiens trop à toi.

Il se pencha vers moi quand je mis ma main devant sa bouche, furieuse.

-- Si tu ne veux pas te prendre mon poing à la figure, arrête-toi tout de suite.

En serrant les dents, je soupirais pour me calmer car au fond je l'aimais bien, même s'il devenait de plus en plus entreprenant, de plus en plus agressif. Depuis l'annonce du retour de Blake, j'avais cette sensation insidieuse qu'il était prêt à tout quitte a foutre en l'air notre relation amicale. Quelque fois, une peur irrépressible m'envahissait comme pour me prévenir d'un danger imminent. Cette boule au ventre qui vous prend et qui me rendait de plus en méchante. C'était très désagréable.

-- Je vais te le répéter car tu es mon ami Will. Je...Ne...Suis...Pas...Intéressé. Est-ce assez clair ? Annonçais-je en articulant pour qu'il entre bien l'information dans sa caboche.

Ses yeux s'illuminèrent du bleu vampirique.

-- Tu aimes Blake, c'est ça ?

Je ne niais pas, ce qui serait inutile. Blake et moi étions un couple aux yeux des autres. Sans que l'on ait fait quoi que ce soit pour le prétendre, nous n'avions pas non plus cherché à le contredire. Pourtant, il était évident que Blake mettait d'autres femmes dans son lit, mais cela ne semblait pas gêner les ragots sur notre relation.

-- Tout ce que tu veux du moment que tu me fous la paix. On y va, ou tu désires un petit affrontement afin que je t'imprime mon refus dans ton crâne de piaf ?

Il grogna, mais lâcha l'affaire.

Il ne faisait pas le poids et le savais parfaitement. Il n'y avait aucune arrogance dans mes propos, j'avais près de quatre cent ans de plus que lui et nos entrainements lui avait démontrés plus d'une fois qu'il ne pouvait rien contre moi. J'avais appris à me battre à un âge où les petites filles jouaient encore à la poupée. Mon apprentissage drastique avait été dur, mère y avait veillé, et je l'avais toujours appliqué de mon mieux afin qu'elle soit fière de moi. Elle n'avait pas été le genre de femme à s'attendre à un câlin de ma part, ou même à m'en faire. Elle avait toujours été de celle qui exigeait la perfection quitte à montrer le pire. Une femme intraitable, mais sans mauvais fond.

Conclusion, j'étais plus forte que Will et une fois encore il me le prouva en s'effaçant. Comment un homme si peu sûr de lui pourrait-il m'intéresser ? C'était insensé qu'il puisse croire que je préférais être la dominante du couple. Surement pas ! J'avais un foutu caractère, il me fallait donc quelqu'un d'assez fort pour contrebalancer, sinon je n'allais pas devenir meilleure mais bel et bien encore plus arrogante.

Sur ce dernier constat, je sortais sans prendre la peine de savoir s'il me suivait. 

Tome 1 - L'Exécutrice : A Cran!Où les histoires vivent. Découvrez maintenant