Les Clans, Tome 1: Les Amants des Neiges Éternelles (𝑀𝑖𝑛𝑠𝑢𝑛𝑔)

Chapitre 6

Minho aurait aimé dire qu'il se sentait coupable. Sentir les regards lourds et étranges de Jisung sur lui le faisait presque trembler. Il aimait se vautrer dans les peaux que son gardien lui prêtait pour qu'il se sente mieux. Parfois, l'Oméga omettait volontairement de les lui redonner pour en tapisser son nid au fur et à mesure. Plus le temps passait, plus il avait conscience que sa propre odeur de bois de rose se diffusait dans le musc blanc de Jisung comme s'ils voulaient s'imprégner l'un de l'autre encore et encore.

Minho aurait aimé dire qu'il se sentait coupable, sincèrement. Mais lorsque Seungmin se présentait devant lui le matin, des marques d'ongle dans son cou et puant l'odeur d'un autre homme, il n'arrivait pas à ressentir la moindre once de culpabilité.

Il ne savait pas si Seungmin le pensait stupide ou s'il se moquait complètement de lui. Peut être ne savait il pas que son odeur de ciste lui piquait déjà le nez à cause de son accouplement avec Yongbok. Il fallait être un idiot pour ne pas s'en rendre compte. Même si le Seigneur du Nord portait toujours sa pelisse de loup où qu'il se présentait, il était évident qu'il cachait avec application sa glande de compagnon à la vue de quiconque. Cachait il la situation à son peuple même ? Si c'était le cas, Minho le trouvait d'une hypocrisie monstrueuse.

Après son habituel petit déjeuner en compagnie de son futur époux, Minho lui souhaita une bonne journée avant de s'éclipser de la salle de repas en compagnie de Changbin. Ce dernier n'avait fait aucun commentaire depuis la découverte du pot aux roses concernant Seungmin et Yongbok. A défaut de justifier le comportement de son Seigneur, son gardien avait la décence de ne faire aucun commentaire et montrait de la sympathie envers lui. Malgré ses apparences d'Alpha sombre au caractère difficile, Changbin savait se montrer attentif.

Quant à rester avec Jisung...

Depuis la séance de chasse, quelque chose avait changé entre eux. Le regard chargé de jalousie que l'Alpha avait dédié à Hyunjin en fin de journée, ses doigts brûlants à travers ses gants et ses pelisses embaumant son odeur qu'il adorait tant... Dès qu'ils étaient tous les deux, une force invisible les faisait s'attirer l'un à l'autre. Minho se sentait transporté lorsque les yeux de glace se posaient sur lui. Il aurait aimé pouvoir arracher la muselière de l'Alpha pour voir enfin son visage et caresser la peau de ses joues. Mais il se retenait plus que de raison. Il ne voulait pas porter préjudice à Jisung vis à vis de son Seigneur. Il en était hors de question.

La vie à Inlandsis suivait son cours. Chaque jour, Minho rencontrait de nouveaux habitants et chaque jour il n'avait aucune nouvelle de la cérémonie censée l'unir à Seungmin. C'était un matin comme les autres : il était censé aller récupérer la peau de la biche qu'il avait chassé deux semaines auparavant et ce matin Changbin était son garde-fou. Emmitouflé dans ses capes et dans les peaux de loup de Jisung, l'Oméga saluait poliment chaque personne sur son chemin avant d'arriver à la tannerie du village.

Au sein des fortes odeurs de produits et de cuirs s'activait une petite troupe d'Alphas habillés de tablier épais et d'une ceinture d'outils en argent. Le long des murs se trouvait une grande quantité de peaux en tout genre : des tons les plus chauds comme les fourrures de renard côtoyaient les laines épaisses des moutons du village que les tanneurs préparaient pour les donner aux tisseurs d'Inlandsis. L'arrivée de Minho fit s'arrêter un des garçons les plus musculeux qui l'observa de haut en bas en souriant sous sa muselière.

« Mon Cygne, que puis-je faire pour toi ? » demanda le jeune Alpha en passant ses mains crasseuses dans son tablier de cuir.

« Jisung m'a dit qu'une peau de biche que j'ai chassé la semaine dernière serait prête aujourd'hui. Je suis venu voir s'il était possible de la récupérer. »

L'Alpha hocha la tête et se dirigea vers la réserve de la tannerie. Minho n'était pas spécialement à l'aise au milieu des odeurs fortes du bâtiment, mais il se retenait de grimacer ou de montrer son dégout. Il respectait vraiment le travail des artisans comme eux et se sentait bien incapable de faire la moitié de ce dont ils étaient capables. Le jeune homme revint rapidement, portant fièrement une peau à la robe couleur grise claire à l'apparence douce et bien travaillée.