Récit d'un soir

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Lui et Moi, pas Nous

  Tout est platonique entre lui et moi. Celui qui vous raconte que les rivaux académiques tombent amoureux par le bias d'une compétition acharnée de haine et de travaille à la recherche de la réussite scolaire ou sociétaire vous a menti.

Ça n'existe pas. Tout comme le fait qu'ils se détestent de façon incontrôlée et surréaliste à cause de ces mêmes réussites. Encore faux. On est pas amis. Mais on ne se haït pas non plus.

« Rivaux Académique » c'est sur le papier, stylo en main, au début d'un examen coefficient quatre dans la moyenne. Mais un pied sorti de la salle et nous redevenons « Humains ». C'est une appellation difficile à imaginer pour tous ces adolescents écrivains qui aiment vendre le fameux « ennemies to lovers ». Ça en devient irréaliste. Presque irrespectueux pour des génies comme nous qui tentons notre meilleur pour obtenir ces résultats.

Il partage mon avis. On est souvent en désaccord mais je parierais mon fauteuil vert que sur ce point il est assurément avec moi.

Le haut du classement est la seule chose pour laquelle on se bat réellement. Chaque semaine est une véritable bataille pour la première place. Parfois c'est lui, parfois c'est moi.

Il est très bavard et moqueur, se fait parfois passer pour un idiot pour mieux manipuler les gens, réfléchit autant que moi et travaille beaucoup. Je ne lui dirais pas mais je l'admire. Il est une source d'inspiration que je ne veux pas suivre. Je me dis qu'il est indéniablement admirable mais je n'aspire pas à réussir comme lui. Je ne l'envie pas.

Il arrive qu'on se dispute. Dans ces cas
là on ne se réconcilie pas. Lorsque chacun à fini d'exprimer ses pensées, d'un accord commun on passe à autre chose. J'apprécie ça. On se dispute violemment puis une fois les choses dites je reprends mon livre et il reprend son verre de vin. Il n'y a pas de conséquences. On est adulte. Et on est surtout mature.

On se côtoie à la fois jamais et très souvent. On ne passe pas du temps ensemble à faire nos devoirs ou au cinéma voir les derniers films
ou encore assis dans un parc. C'est chez lui dans son salon ou chez moi dans mon bureau. Il n'y a pas d'autre point de rencontre.

On ne se considère pas comme amis. On tolère la présence de l'autre parce que je crois qu'on ne supporte pas celle d'autrui. Arrogance et peur des relations humaines c'est ce avec quoi il m'aurait présenté en entendant ça. Il est un peu égoïste sur les bords aussi. Mais ce que je lui reproche me revient comme un miroir, on est à la fois très ressemblant et à la fois pas du tout.

Je ne dirais pas toujours à voix haute ce que je n'aime pas, mon visage le fera. Si lui ne l'exprime pas c'est comme si son sommeil le soir était gâché. Il dit ce qui lui passe par la tête. Même si c'est pour dire à ce garçon qu'il en a une plus petite que lui. Surtout si c'est pour lui dire qu'il en a une plus petite. Il est un peu vantard. Moi, pas trop.

Lui et Moi cohabitons sur cette planète comme deux humains bien éduqués et censés le feraient.

Je l'attrape par le col de sa chemise et enfonce mon arme de fortune, un couteau à beurre, dans le creux de son cou. Le bruit du vaisselier qui tremble attire sa dame de ménage mais je ne m'en formalise pas. De ma main libre, j'attrape le rebord de la pâte à pizza qui repose sur la grille de four, tirant dessus. Il jette un coup d'œil à ma main prête à ruiner le plat qu'il allait enfourné avant de s'exclamer d'une voix grave :

« Fait le, je t'explose. »

On sait tous les deux ce qu'il entend par là. Je souris en coin et recule les mains levées comme preuve de mon innocence.

Écrit d'une pensée - 1969Où les histoires vivent. Découvrez maintenant