Tome 2 - Chapitre 2

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Il m'avait fallu une vingtaine de minutes, trois verres d'eau et deux bonbons au citron pour que mon reflet dans le miroir retrouve un peu de couleurs. J'avais préféré reporter le rendez-vous suivant. Mon corps humain n'aurait pas supporté un effort supplémentaire. Et puis j'avais déjà ruiné ma robe blanche avec du sang, je ne voulais pas empirer les choses. Peut-être qu'avec du détachant et beaucoup de prières j'arriverais à la nettoyer...

En vingt minutes, j'avais eu le temps de repenser à ce cinq de coupe, faire des théories, me rendre compte que je ne savais toujours pas à quelle période de temps ma carte faisait référence et m'énerver contre le destin de se montrer aussi sadique. Pourquoi m'envoyer un signe s'il savait que je ne pouvais pas l'interpréter ! C'était beaucoup trop frustrant pour moi. Même la méditation ne me calmerait pas. Quoi que, malgré tout, je ne dirais pas non à une séance de yoga cet après-midi.

Puisque j'étais fâchée avec mon tarot, je pouvais utiliser une autre méthode divinatoire. Peut-être qu'ainsi je découvrirai si ma journée allait vraiment s'annoncer si pourrie ou s'il y avait encore de l'espoir. Au fil des millénaires, j'avais étudié diverses formes de divination. Ce sujet m'avait toujours passionnée et, même si parfois la dévotion de ces mortels n'allaient pas à notre panthéon, leurs pratiques se révélaient intéressantes.

Bon sang, où les avais-je rangées ? Le coffre à côté de l'aloes contenait toute ma paperasse depuis que j'avais ouvert ce salon, donc sans doute pas là. Je m'étais attendue à les trouver dans les tiroirs de mon bureau, mais visiblement j'avais eu la bonne idée de les déplacer. Sur les étagères, il y avait mes pierres, mes bougies et mes encens.

Pas ici non plus.

Ah oui ! Je me souvenais maintenant !

Le mur qui faisait face à mon bureau était couvert de plantes grimpantes et, entre elles, j'avais placé une sorte de toile en macramé à laquelle étaient fixées de petites pochettes grises. Si je ne me plantais pas, j'y avais glissée mon pochon en soie.

D'un pas vif, j'allais vérifier. Elles étaient là ! Je récupérai le sachet en tissu et m'assis à même le tapis. Épais d'environ cinq centimètres, c'était la carpette la plus confortable du monde ! J'adorais m'y poser et méditer, lire ou juste pianoter sur mon téléphone. Enfin, bien entendu, je ne le faisais que lorsque je n'avais pas de clients ! Délicatement, je défis le nœud qui maintenait la protection scellée et renversai son contenu sur les poils gris et marron. Les pierres s'entrechoquèrent avant de retomber à plats sur le sol. Je retournai certaines agates de façon à ce que les runes soient cachées, puis les mélangeai.

Je pris une grande inspiration, me concentrant sur le silence qui régnait en maître dans la pièce. Je me focalisai sur l'énergie qui coulait dans mes veines. Elle me guida vers une première rune que je fis glisser vers moi, face exposée. J'en choisis une deuxième sans hésitation. Mes doigts semblaient presque aimantés vers elle, comme si son message devait avant tout me parvenir. Pour la troisième, en revanche, je sombrais dans une hésitation assommante. J'avais à peine posé la pulpe de mon index sur l'une d'elle quand la sonnerie de mon téléphone me fit sortir de ma transe. Je l'extirpai tout de même du groupe pour ne pas la perdre et pris l'appel :

– Allô ?

– Neph ? C'est Mal. T'as quelque chose de prévu pour le déjeuner ?

Je hochai la tête alors même que Malora n'était pas en mesure de me voir.

– Ouais, Isis passe me récupérer puis on va au ciné.

– OK. On mange ensemble demain du coup ?

– Avec plaisir ! m'enthousiasmai-je. Ça fait un bail en plus.

– Oui, faut que je te raconte notre weekend à Memphis. C'était magique.

Le Fléau d'Égypte - Tome 1 & 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant