Mars 2015. Ce matin-là, j'étais à Bordeaux pour une réunion de travail. Concentré sur la rédaction de notre publication, je filtrai les appels non essentiels.
En milieu de matinée, nous avions bien avancé lorsque Maddy, ma compagne, m'appelle. Cette fois-ci, je décroche. Sa voix est différente de d'habitude, à la fois solennelle et fébrile. Elle me dit que mon frère Joël a besoin de me parler au plus vite et qu'il a déjà tenté de me joindre. Je comprends que quelque chose de grave se passe. Maddy m'annonce alors la disparition de Marie.
Marie, c'est ma mère. Notre relation était compliquée. Il m'était depuis longtemps difficile de l'appeler Maman, celle-ci n'ayant su tenit son rôle maternel. Nous demeurions en contact, malgré ma distanciation mais c'était toujours à son initiative et je répondais rarement présent. L'instint de survie certainement.
Dépressive, isolée, en obésité morbide et diabétique, sa santé était mauvaise depuis des années. Je m'étais préparé au pire de longue date. Sans émoi, j'ai terminé mon travail puis suis partie dans le premier train venu (ce fût un car de substitution).
Sur la route, mes pensées étaient pour Joël, l'aîné de notre fratrie. Vieux garçon, il entretenait également une relation distante avec notre mère mais la côtoyait au quotidien. Il squattait depuis des mois chez elle en quête d'une connexion à internet et inconsciemment d'une compagnie familière.
Arrivée sur le parking, je vois mon frère Samuel me précédant. Nous nous embrassont sans un mot puis nos regards se tourne sur la maison de notre enfance. Je reste sur le trottoir tandis qu'une ambulance se gare. Deux personnes sortent un brancard puis rentre dans la maison accueillis par mes deux frères.
Un proche de la famille, ayant appris la nouvelle, venait de me rejoindre et nous discutons, toujours à l'écart. Le brancard couvert d'un drap blanc sortie bientôt puis monte dans l'ambulance, partant aussitôt.
Je me décide à passer la porte à mon tour pour embrasser Joël puis Didier, le compagnons de Marie. Nous échangeons longuement entre frères. Samuel habitant à proximité et étant le plus disposé de nous, s'engage à réaliser les démarches funéraires.
Quelques jours plus tard, assis en retrait, sur le banc de l'église, j'observais les gens endeuillés qui entouraient le cercueil. Pas une larme ne venait mais un soulagement m'habitait.
Cette mère qui s'était éteinte, 25 ans plus tôt, au décès de son mari, l'avait enfin rejoint. Fini les journées passées à sa fenêtre, regardant la vie des autres défiler. Terminée, la culpabilité, de pas être un fils pour cette mère qui s'était oubliée. Le téléphone ne sonnera plus, et je ne ferai plus l'abonné absent.
Cette fois, elle est partie pour de vrai. L'ombre d'elle-même s'en est allé.
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Sous les étoiles, si j'y suis.
CasualeRécit d'une existence parmis tant d'autres mais au combien unique dont la fin reste à vivre.