𝙹𝚘𝚞𝚛 𝟷𝟹

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— Catherine, réveille-toi, tu vas être en retard ! 

Je peine à ouvrir deux paupières lourdes de sommeil. Une nuit encore bien agitée. La voix de ma mère me parvient lointaine, comme si j'étais jetée dans un gouffre et que je me laissais tomber. 

Chaque soir environ, c'est la même chose, je me bats contre moi-même. Contre cette haine que je porte envers mon corps, mon âme, et cette déception qui me consume à chaque fois que je me rends compte que mon cœur est disloqué, brisé en mille morceaux. Le pire, c'est que je ne sais pas pourquoi j'ai à endurer tout ça, je n'arrive pas à mettre le doigt sur une raison plus ou moins tangible ou concrète de ce qui m'arrive. J'ai beau sourire, vivre un conte de fées, m'enfermer dans mon imagination... La réalité me rattrape où que je vais, partout où j'essaye de m'échapper. Je suis une coquille vide, et ça, personne ne pourra jamais y remédier.

— Catherine ? 

— J'arrive, maman...

Je grogne et jette la couette par dessus mon corps encore engourdi. Mes membres sont ankylosés et c'est une véritable torture de marcher jusqu'à la salle de bains. Quand je me regarde dans le miroir, deux cernes monstrueux me dévorent les yeux. Ce sont littéralement des poches. Quelle horreur... 

L'horloge murale indique qu'il est 6h49, les cours ne débutent qu'à 8 heures mai je me lève toujours un peu tôt avant les cours, ma plus grande phobie est d'arriver en retard et de me montrer en spectacle devant tout le monde dans un épique "Bonjour, désolée pour le retard". Dans un monde parfait, personne ne se soucierait de ma présence et le professeur continuerait son cours en me donnant la permission d'entrer. Malheureusement, le monde est loin d'être parfait. Dans le mien, les élèves se mettent à rire et Harry fait des blagues déplacées sur Catherine la Sainte-nitouche.

Je me passe de l'eau glacée sur le visage et ferme le robinet avant de saisir ma serviette pour m'essuyer la face. C'est mon premier jour au lycée, je pense qu'il serait convenable que je me maquille au moins pour cacher ces choses hideuses qui encerclent mes yeux ?  

On m'a toujours fait remarquer que j'avais des cernes trop prononcées, c'est la première chose qu'on remarque quand on me parle. Est-ce que tu dors ? Est-ce que tu es malade ? 

Je trempe l'applicateur de l'anticernes dans le produit et me badigeonne la zone. Je l'étale de façon à ce qu'il se fonde bien avec mon teint puis matifie le tout avec une poudre que j'ai dû voler dans le tiroir de ma maman. J'essaye de dompter ma tignasse pour l'attacher en une demi queue de cheval, puis j'y attache un ruban blanc. Je me rends ensuite dans mon dressing pour décider comment m'habiller. Il n'y a pas de choix, de toute façon, j'avais oublié. Tenue obligatoire, jupe mi longue bleue, chaussettes longues et chemise blanches avec le supplément veste avec blason aux couleurs du lycée que je récupèrerai une fois sur place. Je mets des ballerines blanches avec une touche de bleu et grimace quand je me regarde dans le miroir. Qu'est-ce que c'est que cette horreur ? 

De toute façon, je n'ai pas le temps de détester ma tenue. Je jette un coup d'œil à mon emploi du temps et saisis mon cartable que j'avais déjà préparé la veille. Quand je fais irruption dans la salle à manger, mes parents sont déjà à table. Ils me font savoir que je suis très belle et quand je prends place, il est déjà 7h15. 

Je mange à peine, je n'ai pas d'appétit. Une boule se forme dans mon estomac et ma gorge est nouée. Mon père propose de me déposer, ce qui est devenu une habitude. Je ne sais même pas pourquoi il propose. C'est bien connu : Catherine ne sort presque jamais toute seule, à quelques occasions près. 

Ethan...

Je me surprends à espérer intérieurement, presque secrètement le retrouver là-bas. On ne s'est pas vus depuis la dernière fois mais j'ai essayé de retrouver son numéro que j'avais bloqué. Je ne sais plus comment me comporter si je le vois. Mais je sais que je dois paraître la plus froide et distante possible.

𝐏𝐎𝐈𝐍𝐓 𝐕𝐈𝐑𝐆𝐔𝐋𝐄 [ 𝙴𝙽 𝙲𝙾𝚄𝚁𝚂 ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant