Chapitre XXX ~ Premier envol

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Drago sentit son cœur gonflé d'un sentiment qu'il n'avait pas éprouvé depuis ce qui lui semblait être une éternité : cette bouffée d'adrénaline qui monte au fur et à mesure que le balai prend de l'altitude. Comment avait-il pu mettre autant de côté cette passion qui l'avait tant animé autrefois ? Tout simplement parce qu'il pensait ne plus avoir goût à rien, même à cela ; et c'était sûrement vrai avant. Mais depuis peu, il ne saurait dire exactement quand, reprendre le sport ainsi que d'autres activités lui semblait de moins en moins dérisoire. A présent il s'en rendait plus que jamais compte : il n'aurait jamais dû arrêter.
Les bourrasques de vent frais dans ses mèches blondes lui faisaient du bien, piquant ses yeux clairs, le froid mordant son visage et remplissant ses poumons lui rappelait qu'il était en vie, et son cœur, serré par l'altitude et battant à en rompre sa poitrine, renforçait plus que tout cette idée.
Il fit quelques tours de terrain pour s'échauffer, puis amorça un looping, puis deux, puis trois, en avant, en arrière, une figure ou deux par-ci par là, slalomant entre les cerceaux des but, debout sur son balai ou suspendu par les mains, filant droit en tournant sur lui même telle une torpille, prenant soudain de la hauteur comme une fusée jusqu'aux nuages, jusqu'à ce que la température soit si basse qu'il ne pusse plus en supporter davantage, puis faisant demi-tour vers le bas, piquant une tête à la verticale puis se redressant à la dernière seconde, lorsque le manche frôlait le gazon, soulevant ainsi le cœur de la jeune femme qui regardait la scène avec un effroi grandissant.
Une fois le pied à terre, il recoiffa comme si de rien n'était ses cheveux ébouriffés, les yeux pétillants, les pomettes rouges ressortant sur son visage pâle, l'air exalté, le sourire franc. Hermione l'avait rarement vu ainsi.

- C'était un léger aperçu de mon talent, petite Granger. Et encore, ça faisait des mois et des mois que je n'en avais pas fait, et sans échauffement. Qu'en dis-tu ? déclara-t-il fièrement.
- J'en dis que... J'en dis que ce n'est pas si mauvais, effectivement. Mais, s'empressa-t-elle s'empresser en voyant son air satisfait, je ne suis pas impressionnée pour autant. Le premier venu saurait faire ces petites pirouettes aériennes....

Ce n'était pas bien de mentir. Mais elle n'avait absolument aucune envie de se retrouver à des centaines de mètres du sol.

- Ah oui ? fit-il avec une moue déçue et boudeuse. Je pensais que ça te plairait... Apparemment je me suis trompé.

Devant son air déconfit, la Griffondor se sentit un peu coupable. Alors, évitant son regard, elle murmura d'une voix mal assurée :

- Bon, j'avoue, tu as du talent... Je suis impressionnée. Mais j'ai peur du vide...
- Mooh, il n'y aucune raison d'avoir peur voyons... Ne t'en fais pas, j'étais comme toi au départ. Est-ce que tu me fais confiance... Hermione ?

Elle releva la tête et plongea son regard dans le sien. Son air bienveillant la rassura un peu. Lui faisait-elle confiance ?

- Je te fais confiance.

Elle s'empressa d'ajouter :

- Mais seulement pour cette fois, hein !

Il rit tendrement, puis l'installa derrière lui. Hermione s'agrippa fermement à son dos, résolu à fermer les yeux jusqu'à ce qu'ils soient de retour sur la terre ferme.

- Tu ne va pas haut et quand je te dis de redescendre, tu le fais okay ?
- Vos désirs sont des ordres madame.

Derrière le rideau de ses paupières closes, Hermione perçut que ses pieds quittaient le sol. Son cœur se serra douloureusement et elle serra encore plus fort Drago, sa seule bouée de sauvetage dans un environnement qui lui était hostile. En d'autres circonstances, elle se serait giflé de faire une chose pareille, mais pour l'instant plus rien ne comptait.
Elle ne réalisait pas trop la distance au sol, mais n'osait ouvrir les yeux. Drago sentait son cœur battre contre lui dans un rythme effréné et il comprit qu'elle n'était absolument pas rassurée.

- Hermione... Détend toi, tout ira bien. Je suis là, et tant que je suis avec toi, tu n'as rien à craindre. Tu as ma parole d'honneur, il ne t'arriveras rien. Ta vie... est bien trop précieuse, finit il dans un murmure.

Il lui sembla que peu à peu elle se détendait, mais bizarrement son cœur ne ralentit pas la cadence, au contraire même. Il ne sut vraiment comment l'interpréter, mais il espérait qu'elle avait un peu moins peur.. toujours est-il qu'il sentit d'un seul coup ses doigts de crisper sur ses épaules et son corps trembler violemment.

- Hermione !!! Que se passe-t-il ? Tu vas bien ?!
- Ce.. C'est beaucoup trop haut, fit-elle d'une voix faible qui semblait à deux doigts de hurler.

Elle avait ouvert les yeux, et ce qu'elle avait vu les avait tout de suite refermé. En effet, ils était à environ vingt mètres au dessus de la plus haute tour de Poudlard. Sans s'en rendre compte, Drago, qui à l'origine ne comptait pas dépasser les cinq mètres au dessus du sol, s'était laissé apparemment distraire par sa soif instinctive d'altitude et avait momentanément oublié sa promesse. Il ne voulait pourtant pas qu'elle garde un mauvais souvenir de son premier vol.

- Suis-moi, je vais te montrer quelque chose.

Suis-moi...... Il en a de bonnes lui, rumina Hermione.

Elle gardait obstinément la tête collé contre son dos, les yeux définitivement fermés. Il rit et quelques instants plus tard elle sentit qu'ils atterrissaient. Rassurée, elle ouvrit les yeux mais à son horreur ses pieds reposaient à présent sur.. le toit du château !

- Dra.... Malefoy, qu'est-ce que c'est encore que cette..
- Chht.

Il avait posé un doigt sur les lèvres de la jeune femme. Ses yeux s'écarquillèrent mais elle aucun son de sortit de sa bouche. Il lui prit la main et ils gravirent maladroitement les ardoises inégales. Arrivés au sommet du bâtiment, Hermione eut le souffle coupé.
Un magnifique paysage s'étendait devant elle à perte de vue ; le soleil mourant jetait ses derniers rayons sur la Forêt Interdite qui dressait jusqu'à l'horizon ses cimes sombres d'un vert profond. Derrière les nombreuses silouettes pointues des tours de Poudlard, on devinait les reflets miroitants du lac empli de mystères. Le vent faisait bruisser les feuillages et les herbes dans un doux murmure qui revenait aux oreilles de Hermione.
Ils s'assirent sur le rebord du toit d'un commun et silencieux accord ; elle appuya sa tête contre son épaule et serra sa main presque imperceptiblement plus fort. Mais cela, il le remarqua, et cela lui arracha un tendre sourire, tandis qu'ils regardaient tous deux les nuages incendiés.

Qui suis-je, Granger ? (Dramione)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant