Enivré.e

2. S'ignorer (2/2) - Ava

Après cette première journée de travail plutôt particulière, je suis ravie de pouvoir rentrer chez moi sans avoir à défaire des cartons. Mes parents sont venus de Los Angeles pour m'aider à m'installer et Lexie et Astrée sont passées hier pour les dernières touches décoratives.

C'est donc dans mon nouveau cocon aux couleurs beige, crème et autres dérivées que j'arrive fatiguée.

— Ah, ma chérie, te voilà enfin !

Ma mère saute du canapé d'angle sur lequel elle était installée pour dessiner et vient me rejoindre dans l'entrée.

— Salut, maman.

Je dépose un baiser sur sa joue avant de la prendre dans mes bras. Je profite encore de sa présence avant son retour à LA.

Mon père sort de la chambre d'amis dans laquelle ils sont installés et vient se joindre à notre câlin. On est une vraie famille de guimauve, à première vue. Mais ça n'a pas toujours été ainsi. L'accident a resserré nos liens.

— Puis-je inviter les deux femmes de ma vie à dîner ?

Ma mère, plus qu'enthousiaste, saute aux lèvres de mon père. Je détourne rapidement les yeux pour ne pas faire de cauchemars cette nuit.

— OK les amoureux, on y va tout de suite avant que je ne change d'avis.

Ma mère glousse comme une collégienne avant de me lancer :

— Toi aussi tu seras amoureuse un jour, ma chérie. J'ai hâte de pouvoir te chambrer avec ça.

— Ça ne risque pas !

— Ton QI te sauve de beaucoup de situations Ava, mais pas de l'amour. Crois-moi, ça arrivera.

Je ne prends pas la peine de répondre, car quand ma mère a une idée en tête, il est très difficile de lui faire changer d'avis. Mais de mon côté, je sais que je ne tomberai jamais amoureuse.

***

Arrivé dans le centre-ville, on franchit les portes de La tabla, un restaurant réputé selon les avis Google que j'ai regardés sur la route. Le nom de l'établissement est affiché en grandes lettres italiques sur la devanture délicate et raffinée annonçant la couleur de ce qui se cache à l'intérieur. Je ne suis pas déçue quand mon talon Yves Saint Laurent rencontre le plancher de la réception où nous attend déjà un employé. En chemise et pantalon noir, le jeune homme cadre parfaitement avec la décoration sobre et sophistiquée du restaurant. Les faibles luminaires qui tombent un peu partout du plafond offrent une ambiance tamisée. Le bar se trouve au centre de la pièce faisant de lui l'animation principale du lieu.

Une fois installée, je prends le temps d'apprécier le confort de la banquette sur laquelle je suis assise et j'admire également les verres en cristal disposés sur la table en bois massif.

Il n'y a pas à dire, mon père connaît mes goûts. Un coup d'œil à la carte des vins me confirme que je vais venir manger ici très souvent.

Je suis encore en pleine réflexion sur mon plat quand on est interrompu.

— Ava, c'est toi ?

Je relève la tête et tombe directement sur Julia, la meilleure amie de ma mère, mais aussi la mère de Rio. C'est bien ma chance, je vais rencontrer tous les O'Brien dans la même journée ? Et je ne crois pas si bien dire quand Alejandro avance vers notre table avec son père.

— Julia, petite cachotière ! Tu n'étais pas censée être en déplacement professionnel ?

Ma mère assène une petite tape à son amie. Moi je repose la carte, je n'ai plus faim.