17 ~ Mon monde de merveilles

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Lana profite des dernières journées du mois d'août sur le perron, confortablement installée dans une chaise à bascule, quand Manuel monte les escaliers menant aux appartements d'un air furibond.

Il accourt vers elle, saisit sa main, qu'il retourne dans tous les sens.

-Et même pas de bague ! Je ne lui ai donc appris aucune manière.

Lana comprend où il veut en venir et jubile intérieurement.

-Il vient de cracher le morceau, le petit cachotier. Je voyais bien depuis votre retour qu'il planait sur un petit nuage.

-Nous ne sommes pas encore mariés, juste fiancés.

Manuel continue de s'exciter.

-Encore heureux que ce prêtre ait refusé, vous marier loin de nous ! Et cette façon de demander sa main à quelqu'un, quel manque de romantisme. Ma pauvre, il ne sait vraiment pas s'y prendre.

-On parle de Diego quand même.

-Sì, c'est vrai. Et toi qui ne me dis de rien... Tu mérites mieux qu'un mariage à la dérobée. Nous allons organiser des festivités.

-Je ne veux rien de grandiose, ça me mettrait mal à l'aise, Diego encore plus. Vous et quelques proches suffiraient.

Manuel prend une autre chaise, qu'il rapproche de la sienne avant de s'asseoir.

-Tu pourrais inviter tes parents. Je l'autoriserais.

-Les faire revenir ici ? Voilà qui ne risque pas d'arriver.

-Tu sais où leur écrire ?

-Oui, j'ai des nouvelles de ma sœur de temps en temps.

-Mets-les au courant, invite les, sinon tu le regretteras.

Dans la même lettre, Lana doit annoncer deux nouvelles à ses parents, que son premier mari est mort et qu'elle se trouve sur le point d'épouser un nouvel homme, de la même catégorie sociale, ce qui ne va pas les réjouir. Une courte missive arrive en retour, moins de deux semaines plus tard.

« Notre chère Lana,

Nous sommes heureux d'avoir de tes nouvelles après tout ce temps. Tu nous manques terriblement. Cependant, nous n'assisterons pas à ton mariage. Si nous respectons ton choix, nous ne l'approuvons pas pour autant. Continuons cette correspondance et viens nous rendre visite à l'occasion. Papa et Maman. »

Lana comprend que cette invitation ne s'adresse qu'à elle seule, c'est pourquoi elle ne se rendra jamais dans le Colorado.

En tant que père de substitution, Manuel la conduit devant le maire qui officie le mariage civil, puis devant l'autel. Elle a opté pour une robe blanche fluide, aux accents bohèmes. Son cœur fond devant Diego endimanché dans un costume trois pièces, du jamais vu.

Les Muerto et leurs amis se réunissent au coucher du soleil dans la cour intérieur du quartier. Pour l'occasion, ils ont installé deux longues rangées de tables, des lampions et un petit groupe assure la musique latina. Ils trinquent un nombre incalculable de fois, festoient dans une joie jamais égalée en ces lieux. Diego supporte avec calme les réjouissances et ne quitte plus sa femme des yeux. Il remercie finalement Manuel de s'être impliqué quand il voit combien Lana rayonne. La lettre de ses parents l'a un peu abattue, cela ne lui a pas échappé, mais elle est assez forte pour passer outre.

Ultime épreuve pour Diego quand il doit inviter son épouse à danser, poussé par les acclamations de ses compères.

-Fais comme s'il n'y avait que nous deux, lui chuchote-t-elle à l'oreille.

Elle entrelace ses doigts derrière sa nuque et l'entraine dans un slow envoutant.

-J'ai hâte de me retrouver seul avec toi, pour consommer le mariage, dit-il en descendant ses mains sur ses reins.

-Comme si on ne l'avait pas déjà fait il y a longtemps.

Ils resteraient bien là, à se dandiner d'un pied à l'autre, lorsque Sonny vient réclamer à son tour la mariée. Presque au supplice, Diego doit regarder un à un les membres des Muerto faire danser Lana, au son des guitares. Manuel lui apprend la salsa tandis que Josh qui a deux pieds gauches la fait tournoyer plus que de raison. Cherchant son équilibre, elle finit par rejoindre son mari pour couper le gâteau final. Une fois la nuit étoilée bien avancée et les invités éméchés, ils s'éclipsent pour rejoindre leur nid marital.

Ce que la mort doit à la vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant