Je suis là, assise sur cette terrasse pleine de charme, à profiter de la vue sur l'océan, me demandant lequel des mets délicieux posés dans mon assiette je vais porter à ma bouche en premier.
Tous mes sens sont en éveil.
Je suis au comble du bonheur, et je n'en reviens pas de la tournure qu'a pris ma vie depuis une grosse semaine...
Il y a une semaine, mon job de serveuse était à peu près tout ce qui meublait ma vie fraîchement revenue à elle-même.
En effet, j'ai été longtemps très malade. Trop malade. Trop longtemps, de quoi y laisser tout ce que j'avais : mon job, mes amis, et même une partie de ma famille.
Il n'y avait plus rien dans ma vie.
Et d'un coup, les évènements se sont précipités : j'ai été témoin d'un meurtre, prise pour cible, protégée par un homme incroyable, Attila, qui s'est ce faisant également mis une cible dans le dos, puis par un policier qui n'était autre que mon fantasme d'adolescente.
Un sacré tumulte, tant au niveau physique qu'émotionnel !!
Finalement, les méchants contre lesquels nous devons témoigner sont sous les verrous. Mais comme ils sont les hommes de main d'un type très puissant et très peu recommandable, on ne sait jamais ce qu'il peut être prêt à faire pour les conserver à son service et leur éviter la prison. Lorsque le deuxième homme que j'ai vu dans cette ruelle a été arrêté, et que la protection policière a pris fin, Attila a donc immédiatement décrété que l'on n'avait aucune assurance d'être en sécurité, et qu'il était hors de question de prendre le moindre risque. Nous devions partir. Aller nous mettre à l'abri.
Il a posé ses congés en retard, j'ai prévenu mes patrons qui ne peuvent que comprendre ma fuite, puisque c'est en travaillant que j'ai été témoin du meurtre, j'ai pris toutes mes économies, et nous avons sauté dans le premier train de nuit qui menait vers l'océan !
L'odeur des embruns sur la terrasse du restaurant se mêle à celle des plats dans nos assiettes, je m'en remplis les poumons avec délectation.
Et je le regarde lui : Attila, le gars que je ne voulais pas voir quand il me faisait du gringue en tant que client de la serveuse que j'étais, qui m'a sauvée la vie, qui m'a protégée, et m'a même donné la sensation d'être aimée, ou du moins d'être quelqu'un de précieux, de rare, d'unique, en seulement une petite semaine.
Il est entré dans ma vie il y a moins de dix jours, et a su tout cristalliser autour de lui. Mes sentiments, mes préoccupations et mes actions...
Tout tourne à présent autour de lui, avec lui.
Mes yeux parcourent son visage. Bon Dieu qu'est-ce qu'il est beau !! Ses yeux sont d'un noir profond et chaud, et les petites rides qui commencent à les border soulignent leur vivacité. J'aime sa mâchoire puissante, que les fossettes sur ses joues adoucissent quand il sourit. Il est imparfaitement parfait, ou parfaitement imparfait.
Je relève la tête et observe l'océan, ses vagues calmes mais puissantes, la force qu'il dégage...
Sa présence est très étrange, du moins, l'effet qu'il me fait est très étrange.
Attila, hein, pas l'océan. C'est un peu comme si je l'avais toujours connu.
Dès le premier jour, dès le premier contact en fait, cet homme qui ne me plaisait pas, parce que je le trouvais un peu « too much » avec ses gros muscles et son visage de beau gosse trop sûr de lui, m'a littéralement paru être comme la pièce de puzzle qui s'emboîte avec la mienne.
Son odeur, son contact, le son de sa voix, son regard sur moi, tout me réchauffe et me rassure.
Avec lui, je suis bien.
Avec lui, je suis moi. Je me sens même à ma place...
Plus besoin de me cacher, même mes souffrances, je peux les montrer sans crainte qu'il ne s'enfuie en courant...
Enfin, dans une certaine mesure tout de même : avec la maladie, j'ai bien compris, bien assimilé que les autres ne veulent pas nous voir souffrir.
Soit ils nous aiment, et ça leur fait du mal, soit ils ne nous aiment pas, et ça les fait chier.
Mais souffrances extrêmes mises à part, je peux lui montrer qui je suis, jusqu'ici, il semble attiré et non repoussé par mon côté "trop". Et oui, moi aussi je suis trop. Trop tout : hypersensible, hyperactive, hyperlaxe, hyper tout.
C'est d'ailleurs pour ça que, même avant la maladie, j'avais un peu de mal à croire à l'amour...
Enfin, l'amour, oui, mais pour moi... Ben non, je suis trop, moi, même pour l'amour.
Je sais très bien que lui aussi, va finir par se lasser et partir...
C'est ce que tout le monde fait.
J'aimerais bien me faire croire que maintenant que je ne suis plus malade, les gens vont à nouveau m'aimer, mais je crois qu'en mon for intérieur, je suis convaincue que les gens ne savent pas aimer. Ils ne savent plus aimer...
Non ! Ils ne savent pas aimer : avant, on n'aimait pas mieux ! Les mariages et unions n'étaient même pas choisis, ils étaient imposés.
Je suppose que certains apprenaient à s'aimer, mais c'était tout de même un peu contraints et forcés, à la base...
Et aujourd'hui...
Plus personne n'a de patience. À la moindre engueulade, on fuit. Au moindre problème, on fuit.
Chacun pour soi, et moi d'abord...
Désolée pour ceux qui ont encore des illusions, mais moi c'est bon, j'ai rendu toutes les miennes, et saurai désormais m'en protéger.
Enfin... j'espère !...
J'essaie de ne pas trop réfléchir à Attila et moi. Ni à l'amour, ni au sens de notre relation. J'essaie d'être simplement dans l'instant présent.
Je me contente d'en profiter à fond, de savourer, de remplir mon corps et mon esprit en reconstruction de bonnes choses, sans penser à demain. Sans promesse, sans espoir, juste ici et maintenant.
De toute façon, j'aurais du mal à faire autrement : quand je suis avec lui, je ne peux que me remplir (sans mauvais jeu de mot s'il vous plaît) de lui, de sa présence et du bien-être qu'il m'apporte. Tout le reste s'évapore.
Ou peut-être que tout le reste n'a finalement plus d'importance...
Voilà ! C'est tout ce que je peux donner en matière de réflexion.
C'est donc là que j'en suis : à me délecter les papilles, les yeux, le nez, et l'esprit.
- Je suis trop heureuse d'être là, avoue-je. Si le paradis existe, je suis sûre qu'il ressemble à ça.
Attila pose sa main sur la mienne, plonge ses yeux de braise dans les miens.
- On va marcher un peu sur la plage ? Propose-t-il.
Je lui réponds par un sourire qui fend mon visage d'une oreille à l'autre.
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Amour Sacré
RomanceAfin d'échapper à ceux qui veulent les éliminer, Tessa et Attila (Le fantasme et la bête) décident de se réfugier vers l'océan. Ils y découvriront des choses étonnantes à leur propre sujet. Le hasard est-il à l'œuvre, ou vont-ils prendre conscience...