Chapitre 10

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Le bruit du frottement du métal contre la pierre réveilla Astra en sursaut. Un garde glissait un plateau de nourriture vers elle. Il y avait un morceau de pain, un bol de soupe, un verre ainsi qu'une petite carafe d'eau. Elle approcha la carafe de son nez et renifla son contenu. Comme elle ne sentait rien de particulier et que sa bouche était desséchée, elle versa de l'eau dans le vers et bût tout son saoul. Elle inspecta la soupe et le pain mais ne trouva aucune trace de poison ou de drogue. Tout en sachant qu'elle aurait très bien pu passer à côté d'un quelconque produit, elle mangea, déplaçant le problème au prochain repas.

Trois hommes apparurent dans le couloir, l'un d'eux prit la relève du garde posté devant les cellules alors que les deux autres entrèrent dans la cellule de Harold. Intriguée par le bruit, Astra se rapprocha des barreaux autant qu'elle put. Les deux hommes firent une piqûre à son oncle, qui s'effondra d'un coup, avant de le détacher et de l'emmener. Elle se rassit sur le sol sale et se perdit dans ses pensées, tremblante. Que pouvaient-ils faire à son oncle alors qu'il était endormi ? Elle commença à trembler et serra ses genoux contre elle.
Soudain, l'image de Kira en sang apparut devant ses yeux.
"Le lycée ! Comment vont- ils ? L'homme à dit que c'était pour moi qu'ils avaient attaqué. J'espère que tout va bien pour eux..."
Une larme solitaire coula sur sa joue et l'adolescente la balaya d'un geste de la main. Elle s'inquiétait pour Kira et tous les autres. Si les chimères étaient venues, c'était pour elle. La seule raison valable pour ça, c'était que les nomades qui les contrôlaient savaient qu'elle était une Rekker. Surtout que son oncle était captif aussi. Mais depuis quand ? L'ont-ils capturé en quelques heures ? Avant de remarquer qu'elle n'était pas avec lui au domaine et de venir attaquer le lycée des Caryres ?
D'autres larmes rejoignirent la première et elle s'effondra. Astra se recroquevilla sur elle-même, repliant ses genoux et se collant contre le mur froid.

***

Le cliquetis de la serrure fit sursauter Astra, qui se redressa brusquement. Un garde s'approchait avec une seringue. Il portait un masque noir qui ne laissait voir que ses yeux. La seringue reflétait le peu de lumière et la jeune fille recula le plus possible jusqu'à toucher le mur derrière elle. Du coin de l'œil, elle aperçut qu'un autre garde ramenait son oncle dans sa cellule. L'homme se tenait à portée de bras et avança dangereusement la seringue vers le cou de la captive. Elle ne voulait pas s'endormir, elle ne voulait pas perdre conscience ici. Astra n'avait aucune idée de ce qu'on allait lui faire ou ce qu'on attendait d'elle, mais elle savait une chose, il était hors de question qu'elle se laisse injecter un produit inconnu sans rien dire.
"Je vous suivrais sans faire de bruit ! Je ferais ce que vous voulez mais ne m'injecter rien, s'il vous plaît..." implora-t-elle en levant les bras pour protéger son visage.
Le garde arrêta son geste et se retourna vers ses compagnons. D'un signe de tête celui qui avait amené Harold lança un bout de tissu et Astra se retrouva les yeux bandés. Elle entendit des cliquetis venant de ses chaînes et les sentit tomber. Elle aura voulu remuer, s'étirer, mais ne bougea pas, ne voulant pas vexer ses gardiens. D'autres menottes vinrent entourer ses poignets mais ses chevilles étaient toujours libres. Le garde prit son bras et la souleva facilement. Il la fit marcher mais ne la lâchait pas.
Astra essayait de suivre le rythme rapide de son geôlier mais trébuchait beaucoup. Elle comptait les tournants, essayant de se faire une carte mentale de l'endroit où elle était retenue. Les voix se taisaient sur son passage et tout ce qu'elle avait réussi à comprendre était l'étonnement de la voir marcher en pleine conscience.

Après une dizaine de minutes de marche, son garde s'immobilisa pour toquer à une porte. Trois coups rapides, deux lents, cinq rapides à nouveau. Le bruit des serrures fit trembler la jeune captive, de la bille lui monta à la bouche et elle ravala son malaise.
La porte grince et le garde pousse Astra à l'intérieur. Son bandeau se relâchait et tombait lentement pendant qu'on troquait ses menottes contre des lanières l'attachant à une chaise en métal. Le froid de celui-ci se répandait dans le corps d'Astra, lui donnant encore plus de frissons.
Une main gantée retira le bandeau à présent inutile alors que la porte claqua.
"Enchanté Assstra, susurra la personne gantée. Je sssuis heureux que tu sssois ici avec nous. Ça faisait longtemps que nous te cherchions."
Astra ne répondit rien et entreprit de dévisager son interlocuteur. Il était vêtu d'une tunique blanche tachée de sang et portait des gants chirurgicaux.
"Je te sssuggère de coopérer. Sssinon ce sssera douloureux." continua-t-il en préparant une aiguille.
"Je ne prendrais pas de sédatif." annonça Astra d'un ton catégorique.
Ce n'était pas une question et l'homme reposa la seringue qu'il tenait en main. Il approcha un plateau en métal et saisit un scalpel ainsi qu'un petit récipient.
"Sssoit." dit-il en faisant une incision sur le bras de la jeune fille. Elle se mordit les lèvres pour ne pas montrer sa douleur et observa son bras. L'homme récupérait du sang et de la peau qu'il plaçait ensuite dans des petits récipients transparents étiquetés. Il répéta l'opération à plusieurs endroits.
Astra n'avait aucune idée de pourquoi l'homme faisait ça et les larmes lui montait. Quand elle eut un peu de répit, elle pris son courage à deux mains et demanda des nouvelles du lycée. Alors, une voix horriblement familière, transmise grâce à un micro, lui répondit.
"Ne t'en fais pas pour eux, ils vont bien. Tu étais notre objectif principal."
La jeune fille fut prise d'un frisson de terreur et l'homme à côté d'elle approcha une main de son visage. Astra voulut reculer sa tête pour éviter le contact mais elle était attachée et la main se posa sur son front.
Une douleur fulgurante lui transperça le crâne et la captive hurla. Elle se débattait contre ses liens et convulsait comme si elle était en proie à une crise. En plus de la douleur physique, l'esprit d'Astra la replongea dans des souvenirs et elle revoyait le domaine des Rekker jonchant de cadavres, elle entendait à nouveau Tim lui expliquer ce qu'il se passait, elle sentait à nouveau sa hanche transpercée de part en part. Elle hurla de plus belle.

"Stop."
La douleur cessa. La main s'écarta du front de la jeune fille tremblante, une forme floue était collée à celle-là et l'homme la plaça dans un récipient avant de reprendre son scalpel et de refaire des prélèvements.
Des gardes rentrèrent dans la pièce, détachèrent Astra et enfermèrent ses poignets à nouveau, mais c'était bien inutile. L'adolescente ne réagissait à rien, elle n'était plus qu'une coquille vide en peine.

Elle marcha jusqu'à sa cellule et se laissa faire quand on lui remit ses chaînes. Elle resta debout sans bouger pendant un long moment, puis ses jambes la lâchèrent et elle tomba sur le sol. Ses pieds heurtèrent le plateau de nourriture et la carafe d'eau tomba, renversant tout son contenu par terre. Mais Astra n'y prêta pas attention. Son esprit était rivé dans le passé.

Harold, ayant vu sa nièce tomber, brisa le silence.
"Astra, chuchota-t-il. Astra."
Mais la jeune fille ne réagissait toujours pas alors il parla plus fort.
"Astra, réveille-toi !"
Il s'agrippa aux barreaux, faisant le plus de bruit possible.
"Astra ! Ne les laisse pas te contrôler !"
Ayant entendu du bruit, deux gardes accourrurent vers les cellules alors que Harold criait encore plus fort.
"Ferme l'accès à tes souvenirs ! Bloque les ! Astra !"
Sa nièce, comme sortie d'une transe, ouvrit les yeux vers son oncle, des gardes l'empoignaient et le forçaient à se taire. L'espace d'un instant, l'image de l'adulte dans sa cellule se confondit avec son oncle du passé, de ses souvenirs.
"Astra ! Tu dois rester forte ! Il ne doivent absolument pas réussir à-"
Les gardes, n'en pouvant plus, donnèrent de grands coups de pieds à Harold et celui-ci se recroquevilla sous l'assaut. Un troisième garde arriva et planta une seringue dans le cou du captif. Les autres se relevèrent et commencèrent à détacher les chaînes. Du bout des lèvres, Harold articula trois mots : désolé, sois forte.
Les gardes emportèrent le corps inerte de son oncle sous le regard d'Astra. Que voulait-il dire ? Aurait-ce un rapport avec les échantillons d'avant ?
Un flot de questions assaillit les pensées d'Astra mais elle ne pouvait répondre à aucune d'entre elles. Pourquoi les avoir capturés ? Que veulent-ils faire avec son sang ? Que doit-elle empêcher ? Qui est derrière tout ça ?
La jeune fille se massa les tempes avant de bouger difficilement son corps douloureux. À cet instant, elle se rendit compte de l'eau qui était tombée par terre et ramassa la carafe. Celle-ci était fissurée et lui entailla la main. Elle la reposa brusquement sur le plateau et l'écarta de ses pieds. Astra était épuisée et s'endormît d'un sommeil agité.

Astra RekkerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant