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Dimanche 14 avril 2024
11h24
Place Louis Pradel, 69001 Lyon, France
11°C
Dicton du jour : Si Saint Lambert est pluvieux, suivent neuf jours dangereux.

Diane QUESSY marche rapidement sous la pluie battante, trempée jusqu'aux os, surprise par cette pluie imprévue qui à démarrée il y a seulement quelques dizaines de minutes. Elle passe avec précipitation devant la Fontaine d'Ipoustéguy, cette étrange sculpture de bronze à laquelle elle jette un rapide regard avant de se reconcentrer sur ses pieds pour éviter une grande flaque au niveau d'une bouche d'égout obstruée. Elle pénètre ensuite enfin dans le commissariat de police après avoir manqué de glisser dans les marches qui mènent à la porte d'entrée. A 34 ans cette jeune femme est une inspectrice de la deuxième brigade de la police du 1er et 4ème arrondissement de Lyon. Fière de son grade et de son métier elle se donne corps et âme dans son travail, n'en déplaisait à son mari William Faure, un homme d'affaire, patron d'une boite d'intérim aux activités florissantes. Leur relation s'est dégradé au fil des années jusqu'à n'être plus que des colocataires distants l'un pour l'autre. Mais cela ne gêne pas tant que ça Diane qui n'a jamais considéré William comme l'amour de sa vie, au départ il n'était qu'un petit ami avec qui la vie était facile et poussés par leurs parents respectifs ils se sont mariés. Attention il ne s'agit pas là d'un mariage arrangé, ils se plaisaient réellement, mais la réalité de la vie les a rattrapés.

L'inspectrice monte jusqu'au troisième étage, où se trouvent les bureaux de sa brigade. Si elle se trouve sur son lieu de travail un dimanche où elle est censée être en repos c'est par pur professionnalisme. En effet, par soucis de conscience elle a souhaité s'y rendre pour vérifier une information qui lui taraudait l'esprit depuis la veille. L'enquête qu'elle vient de conclure s'est achevée avec l'arrestation d'une jeune femme pour agression sur son petit ami. Il a été particulièrement difficile de démêler le vrai du faux dans cette affaire car la jeune femme possédait elle aussi des marques de coups et accusait son petit ami. Cette femme qui semblait si innocente avait touché Diane, son côté policière aussi bien que sont côté de femme. Mais la réalité est que cette jeune femme est vicieuse, manipulatrice et excellente comédienne. Elle est allée jusqu'à s'infliger elle-même des coups pour contrer son petit ami qui avait finalement trouvé le courage de porter plainte après des mois de calvaire. Diane, malgré la dureté de son travail est restée quelque peu innocente et croit réellement en la bonté des gens. Il s'agit là d'une façon de penser bien utopique par rapport à ce à quoi sont confronté les policiers.ères dans la réalité ; le mal, la partie sombre de l'être humain. Mais Diane est comme ça, elle croit que tout le monde à un bon fond mais que certains fond de mauvais choix. C'est pour sauver les gens, des autres et d'eux-mêmes qu'elle est entrée dans la police. Son assiduité et sa détermination lui ont permis de devenir inspectrice assez tôt et de travailler sur de véritables affaires, non que le présumé vol du caniche d'une petite vielle simplement parti chasser un papillon dans le jardin du voisin ne soit pas intéressant mais il y a plus palpitant.

Après vérification l'enquête a bel et bien été menée correctement et la jeune femme est réellement la manipulatrice dans l'histoire et donc la coupable. Soulagé mais encore triste d'avoir été si facilement trompé, la jeune inspectrice referme le dossier légèrement mouillé et le range à sa place. Elle observe ensuite par la fenêtre la pluie tomber sur le gazon de la Place Louis Pradel. Le ciel est d'un gris foncé et qui envie de s'enrouler dans un plaid chaud avec une bonne tasse de café fumante. Déprimé par ce temps, Diane décide d'attendre à son bureau que le torrent d'eau qui s'abat sur la ville de Lyon se calme. De toute façon personne ne l'attend à son appartement, son mari est supposé être en voyage d'affaires à la capitale et elle n'a aucune idée de quand est-ce qu'il rentrera. Elle fait tourner sa chaise de bureau sur laquelle elle est assise comme une enfant s'ennuyant. D'une humeur mélancolique, elle attrape ses écouteurs et les branche sur son téléphone, puis elle lance sa playlist spéciale pour les mauvais temps. La Suite Bergamasque de Debussy commence à s'élever dans ses oreilles. Et oui, en 2024 Diane à encore des écouteurs avec des fils, sa petite nièce de 10 ans Victoria dit que c'est vintage. En pensant à la petite fille elle décide d'envoyer un message à sa sœur, Célia, de 4 ans son ainée, pour prendre de ses nouvelles. Avec son travail qui lui prend tout son temps elle ne communique que très rarement avec sa famille. C'est avec son unique sœur qu'elle parle le plus, pour ce qui est de leurs parents elle n'est pas très proche d'eux. En effet un grand désaccord subsiste entre eux depuis des années ce qui creuse la distance ; ils n'ont jamais approuvé son choix de carrière, trouvant le métier de flic beaucoup trop dangereux et inadapté pour une jeune femme. De plus ils considèrent qu'à son âge elle devrait déjà avoir des enfants, comme sa sœur. Avoir des enfants n'est pas un projet pour elle et son mari, bien trop occupé par leur travail respectif. Et puis ils n'ont pas eu rapports intimes depuis longtemps. Bien que Diane soit de nature très optimiste elle n'est tout de même pas naïve au point de ne pas se douter que son mari à une ou plusieurs maitresses. Mais cela lui est égal car même si elle n'est plus sûre de ressentir de l'amour pour William elle tient à lui et ne souhaite que son bonheur.

Alors que la Piano Sonata n°14 de Beethoven commence à se faire entendre dans les oreilles, une personne débarque dans l'open space désert de la deuxième brigade. Il s'agit de l'une des secrétaires de l'accueil. Elle tient une enveloppe en papier kraft dans les mains.

- Oh bonjour inspectrice Quessy ! Je ne vous avait pas vu arriver. Vous n'êtes pas censée être en repos aujourd'hui ?

- Bonjour Samia, j'avais simplement quelque chose à vérifier. Répond l'interpellée en retirant l'un de ses écouteurs.

- Vous travaillez trop ... Je venais déposer ça, on vient de l'apporter, c'est pour votre brigade. Mais c'est étrange c'est un jeune garçon qui l'a déposée, il est arrivé en courant et il est repartit aussi vite qu'il est arrivé, j'ai même pas eu le temps de voir son visage. J'espère que ce n'est pas encore une de ces farces des enfants du quartier voisin...

- Très probablement, mais je vais regarder quand même au cas où. Merci

- Bonne journée ! S'exclame-t-elle en disparaissant dans l'escalier pour retourner à son poste.

Diane se saisi de l'enveloppe après avoir remis son écouteur et l'inspecte. Pas d'adresses, de timbre, ni de nom de l'expéditeur. Pas très étonnant pour une farce de gamins. Elle déchire grossièrement l'ouverture et en sort une page de ce qui doit probablement un carnet. Sur le blanc cassé du papier, sans carreaux ni lignes, est inscrit de manière assez anarchique quatre lettres : HELL. La jeune inspectrice soupire, c'est bien ce qu'elle pensait ; c'est rien de plus qu'une blague enfantine qui veut se faire passer pour un message satanique. Ce n'est pas le premier et sûrement pas le dernier, des symboles qui se veulent représenter le diable, des pentagrammes grossièrement dessinés, des phrases qui soit disant menaçantes et qui annoncerait la venue du « maître des enfers ». Enfin bref que des bêtises de gamins qui cherchent à se faire remarquer. Par précaution elle range le papier et l'enveloppe dans un tiroir de son bureau, celui tout en bas, juste à côté de son arme de service. On ne sait jamais se dit-elle, vaut mieux en faire trop que pas assez. Elle se réinstalle ensuite dans son fauteuil de bureau. Dehors il pleut toujours des cordes, Diane est encore là pour un moment. Elle commence à agiter joyeusement la tête au rythme et à la mélodie entrainante de L'Automne des Quatre Saisons de Vivaldi qui vient de se lancer. La musique à ce pouvoir, presque magique, de changer ses émotions en un rien de temps. Sa mélancolie a laissé place à une joie, éphémère certes mais bien présente qui envahi tout son être. Elle ferme les yeux. Le bout de ses doigts s'agitent légèrement au rythme de la mélodie. Un sourire étire doucement ses lèvres. Finalement elle n'est pas si mal ici, bien qu'il fasse un peu froid puisqu'elle est toujours mouillée par la pluie qui l'a assai à la sortie du métro A.

Au bout d'une petite heure de presque transe reposante sur fond de musique classique, Diane fini par se lever et par prendre le chemin vers son appartement à une vingtaine de minutes en métro du commissariat. Comme prévu il n'y a personne là-bas, William n'est pas encore rentré. Elle sort un Tupperware de pates à la crème qu'elle enfourne dans le micro-onde, puis elle allume la télé sur un téléfilm nul du début d'après-midi, nul mais qui fait passer le temps.

HELLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant