Toujours. (bxb)

HUIT.

Jonann était assis sur sa chaise, silencieux. Ses lunettes sur le nez, il écoutait attentivement le cours qui se déroulait devant lui. Depuis son retour de l'hôpital la semaine passée, il ne les avait pas quitté. C'était comme si ses lunettes faisaient de nouveau partie intégrante de sa vie. Ou était-ce juste le signe qu'il n'avait plus le goût à rien ? Ce qu'il avait vécu le dégoûtait, surtout quand il touchait sa jambe et se rendait compte qu'il ne la sentait plus comme avant. Mais, même en général, il ne se souciait plus de grand chose. Il ne se coiffait plus, laissant ses cheveux sécher au naturel et passant une main dedans pour éviter que les boucles ne retombent sur son visage. Il était assis à côté de la fenêtre, tout au fond de la classe. À côté de lui se trouvait Féryelle. Il ne voulait plus s'asseoir à côté de Juliano.

Au début, il avait trouvé ça super de voir le brun venir le voir à l'hôpital, de le retrouver comme avant. Cependant, le blond ne pouvait plus supporter son comportement changeant. Un coup, il était super câlin, l'autre super distant. Ce comportement lunatique était exécrablement détestable, quelque chose que Jonann ne pouvait supporter. De ce fait, il avait fait comprendre son mécontentement en s'éloignant du brun sans l'avertir réellement. Il avait bien remarqué que Juliano avait ressenti cette distance, mais le brun n'en faisait guère plus pour améliorer la situation. C'est ainsi que Féryelle était devenue la personne les séparant d'une table en cours. La rousse avait bien tenté de nombreuses fois de régler la chose, bien qu'elle ne savait pas réellement le fond du problème — tout comme Jonann.

Le blond était en train de sombrer, il le sentait. À force d'avoir vécu ce genre de choses, il reconnaissait les signes lorsqu'ils apparaissaient. Il devenait distant, ne parlait plus, avait la flemme de tout, un mauvais rapport avec la nourriture — il ne mangeait presque plus, cette fois. D'autres facteurs étaient entrés en jeu mais ceux-ci étaient les plus flagrants. Lorsqu'il avait fait une dépression en seconde, il avait eu tout ça, hormis le fait qu'il avait pris du poids. Là, c'était le contraire qui se passait. Sa mère l'avait bien remarqué, mais il n'en faisait rien et remettait ça sur le compte de son séjour à l'hôpital.

Lorsque la sonnerie retentit, Jonann enfila ses écouteurs et lança de la musique. Il partit en vitesse, sans même laisser de temps à ses amis de le retenir ou même de lui parler. Il n'en avait pas envie. Il appréciait les efforts qu'ils faisaient tous — enfin, presque tous. Mais il n'en pouvait plus, ça le suffoquait. Rien qu'à l'idée de devoir leur expliquer encore, et encore, et encore tout ce qu'il a vécu et pourquoi il se sent ainsi.. ça lui déplaisait fortement. C'est ainsi qu'il emprunta les escaliers latéraux, évitant le très populaire escalier central, pour quitter le bâtiment de cours. Il s'empressa de rejoindre un petit coin d'herbe tranquille près du gymnase pour s'y installer. Il posa son sac. Il faisait beau ce jour-là. Pour une journée de mi-octobre, c'était étonnant. Le blond ferma les yeux et se laissa emporter par la musique, les reflets du soleil venant s'écraser contre sa peau.

Allongé contre l'herbe, il finit par sentir une présence venir se poser à ses côtés. Il ouvrit un oeil pour regarder qui était cet intrus. C'est ainsi qu'il remarqua Elhysa. Il referma un oeil et elle lui mit un coup dans le ventre.

— Hé ! S'exclama Jonann en ouvrant les yeux, feignant une douleur intense.

— T'es con ou t'es con !?

Elle avait l'air plutôt énervée. Il se redressa donc, l'observant. Elle avait sa longue chevelure brune attachée en une queue de cheval. Elle était toujours aussi pâle mais d'une telle beauté.

— De quoi tu parles ? Demanda le blond, confus.

— De Juliano ! Répondit-elle, ne quittant pas ses yeux.

Le blond leva les yeux au ciel et ça lui valut une nouvelle tape. Il pestiféra.

— Tu vois pas dans l'état qu'il est le pauvre ? Sans parler que tu nous ghostes aussi.