𝟎𝟓. 𝐈𝐦𝐩𝐮𝐢𝐬𝐬𝐚𝐧𝐜𝐞

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— Alors mon fils, as-tu réussi les examens de ce premier semestre ?

Comme toujours, le repas se déroule sans musique, ni de bruit de fond provenant de la télévision, et encore moins d'une quelconque radio. J'aurais pu apprécier ce calme plat et cette sérénité, si mon paternel n'avait pas daigné ouvrir sa bouche pour ne s'intéresser qu'aux notes de mes foutus contrôles.

— Plus ou moins, réponds-je vaguement à sa question.

Ce soir-là encore, je ne trouve aucunement l'appétit, me contentant de regarder le délicieux repas que ma mère a soigneusement préparé durant notre absence.

— C'est-à-dire ? Sois plus précis, commente mon père, en posant ses baguettes sur le rebord de l'assiette, pour joindre ses mains entre elles et m'accorder ce regard tant méprisant.

— J'ai eu que des vingts dans pratiquement toutes les matières, révélé-je, en sentant ma gorge s'assécher avec le stress. Il y a juste en économie, où j'ai eu dix-sept et demi.

— Dix-sept et demi, en économie ? répète mon père d'un air ébranlé. L'une des matières les plus importantes, et tu n'as même pas réussi à en décrocher un vingt ? Tu es sûr que tu bosses réellement dans ta chambre ?

— Mais... c'est déjà bien, non ? osé-je lui répondre, d'une voix tremblante. Je veux dire, ce n'est pas mauvais non plus...

Je tourne le visage vers ma mère pour chercher un peu de soutien dans ses yeux. Mais seul le vide me regarde dans le blanc des yeux.

— N'est-ce pas, mère ? C'est bien...

— Laisse ta mère en dehors de ça, Joshua. Tu es loin de la perfection que l'on attend de toi. Très loin, même, souligne-t-il avec amertume. Nous t'avons pourtant fait suivre des cours supplémentaires à la maison pour que tu puisses intégrer cette prestigieuse université, et voilà comment tu nous remercies. Et tu oses me répondre que ce n'est pas une mauvaise chose ? Comment veux-tu reprendre l'entreprise familiale avec un niveau aussi médiocre ?

Ma tension monte à son paroxysme, et je ne peux que constater ma vision se troubler, ainsi que des sueurs froides me prendre d'assaut. Je serre mes mains en forme de poings pour ne pas me laisser abattre, ou plutôt, pour garder un semblant de lucidité et ne pas défaillir devant mes géniteurs.

Je n'ai pas besoin de regarder une nouvelle fois ma mère pour savoir qu'elle ferme sa jolie bouche sous l'emprise de mon père, se contentant de fixer d'un air livide le contenant de son assiette.

— Il y a intérêt Joshua, que tes prochains examens au second semestre, soient beaucoup plus représentatifs de notre famille que ceux que tu viens de nous apporter.

La boule coincée dans le fond de ma gorge, je réponds dans un murmure ;

— Oui... père...

Avant de me lever de ma chaise, sans avoir touché à mon assiette.

— Je vous prie de m'excuser. Père, mère, je vais travailler beaucoup plus, pour vous satisfaire...

En leur accordant une inclinaison respectueuse, je pivote sur mes talons pour regagner ma chambre d'un pas rapide, dans laquelle je viens m'enfermer à double-tour. Collant mon dos contre la porte, je me laisse glisser contre cette dernière, libérant les larmes qui se sont logées dans le coin de mes yeux.

— Je n'en peux plus, je n'en peux plus ! Je n'en peux plus ! sangloté-je à m'en arracher les cheveux par poignée.

À mesure que le temps s'écoule, je me rapproche dangereusement de ce fameux point de non retour. Ce point de rupture est plus que imminent. Cette situation devient de plus en plus insupportable, et je dois à tout prix m'en défaire au plus vite.

A Nos Âmes ÉcorchéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant