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Margot hausse les sourcils quand elle voit que hope vient encore de la rediriger vers sa boîte vocale et elle essaie de se dire que ce n'est rien. Elle essaie de penser à un moment où son ami l'a renvoyée sur les roses comme ça, à un moment où il a cessé de lui parler brutalement sans raison, sans même lui dire qu'il était au fond de son lit à crever de douleur mais elle peut chercher longtemps, elle le sait, puisque ce n'est jamais arrivé. Elle serre les dents en refermant sa salle de classe et elle se lance à la recherche de ses clés dans sa poche. Elle mâchonne sa langue, maintenant vraiment stressée : ça fait quatre jours que hope filtre volontairement ses messages et ses appels et elle commence à s'inquiéter plus que de raison. Elle a tenté de demander à Moro s'il avait des nouvelles, de son côté ; il lui avait répondu que hope se comportait avec lui de manière tout à fait normale, ce qui avait achevé de l'angoisser. A-t-elle fait quelque chose de travers ? S'est-il... S'est-il rendu compte que quelque chose ne tournait pas rond chez elle ? Elle secoue la tête en essayant de remettre ses pensées en ordre, comme sa psy le lui a appris à le faire. Il ne faut pas qu'elle se laisse emporter par ses pensées parasites, elle sait qu'il n'y a rien de rationnel à ce qu'elle est en train de raconter. Et puis, au lieu de se concentrer égoïstement sur elle, elle pourrait se préoccuper de hope, un peu. S'il a arrêté de lui répondre, c'est peut-être aussi parce qu'il a des problèmes, parce qu'il lui arrive quelque chose qui l'empêche de lui consacrer un peu de temps, et cette idée qui vient de germer dans son esprit l'effraie suffisamment pour qu'elle décide de passer chez son ami sitôt sa journée de cours terminée. Elle doit encore assister à un conseil de classe et rencontrer un élève qui veut lui demander conseil pour son orientation ; elle descend rapidement dans le couloir de la vie scolaire, là où elle avait donné rendez-vous à Maxime. Elle a toujours bien aimé Maxime, contrairement à ses collègues : il faut avouer que le jeune homme avait de quoi agacer, avec son air suffisant, ses yeux qui faisaient tomber plus d'une de ses camarades et son assurance bien trop prononcée pour un gamin de quinze ans, presque seize. Il était de fin d'année et il avait redoublé, autant dire qu'il détonnait au milieu des troisièmes encore très gamins de cette année. Il vivait seul chez lui, ses parents ayant décidé d'aller vivre à l'autre bout du pays et ayant abandonné leur gosse dans leur ancienne demeure. Ils lui donnaient de l'argent et sa grande sœur de vingt ans passait régulièrement voir comment il allait, mais c'était loin d'être suffisant pour élever un ado, évidemment. L'année précédente avait très mal terminée pour lui avec, notamment, un renvoi d'un mois et une dénonciation aux flics par Romind, le prof d'EPS, qui avait découvert de l'herbe dans ses affaires de sport. Margot n'avait pas été fan des méthodes à son goût un peu trop cavalières de son collègue mais le résultat avait été là, et le personnel ne pouvait pas l'ignorer.

L'avantage, c'était que ce renvoi avait remis les idées en place à Maxime. Margot se souvenait de leur désespoir l'année dernière de voir le garçon arriver en cours tous les matins défoncé comme pas possible. Maxime n'allait de toute évidence pas bien, et aucun adulte de son entourage n'avait semblé décidé à l'aider. Ils avaient décidé de le renvoyer parce qu'ils n'avaient pas le choix, pas avec une enquête policière sur le dos, mais ils avaient réussi à lui épargner le renvoi définitif. Qui sait ce qu'il serait devenu dans ce cas... Maxime avait arrêté de fumer pendant les vacances et il était venu le dire, tout fier, à Margot et à Robert, son prof de maths – ils étaient les deux membres de l'équipe enseignante dont il était le plus proche et, malheureusement, probablement les seuls adultes compétents de son entourage rapproché. Margot et Robert avaient décidé de le prendre sous leur aile, officiellement sous condition de travail et de résultat, officieusement sous condition de non foutage de gueule de sa part. Margot n'en avait pas grand-chose à faire qu'il ait des bonnes notes, non : ce qu'elle voulait, c'était qu'il ne finisse pas en prison.