Chapitre IV 'Enfuyons-nous'

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Olympe passa la porte de chez elle. Personne ne vint l'accueillir. Elle grimpa l'escalier en se tenant à la rambarde, les jambes tremblantes. Elle entra dans sa chambre, se débarrassa à la hâte de sa robe et se laissa choir dans son lit.

La jeune femme resta les deux jours qui suivirent dans sa chambre, renvoyant tous les serviteurs avec nonchalance. Son père, inquiet, était venu s'enquérir de la santé de sa fille, mais cette dernière n'avait pas daigné lui ouvrir.

Ronan, lui, avait réussi à fuir Paris. Il continuait de penser à Olympe, au baiser qu'ils avaient échangé avant de se quitter. Il lui était maintenant impossible de la revoir, mais il ne pouvait cesser de l'imaginer dans ses bras l'embrassant tout en lui contant son amour. À cette pensée, son cœur se serra et il ne put empêcher quelques larmes de couler. Il passa deux jours des les alentours de Paris, ne pouvant se résoudre à s'éloigner plus sa belle Olympe.

Cela faisait maintenant trois jours que la jeune noble était restée cloîtrée dans sa chambre. Trois coups furent frappés à sa porte.

«Allez-vous en, qui que vous soyez, cria la jeune femme
-Mademoiselle, le comte de Peyrolles est en bas. Il exige de vous voir, annonça une servante.
-Dis lui que je suis souffrante et que je ne peux le recevoir. Je ne souhaite pas le voir.
-Il est trop tard pour cela, mademoiselle. Monsieur le comte monte les escaliers.
-Laisse-nous, alors.»

Olympe soupira, agacée. Elle se saisit d'un châle afin de se couvrir, n'étant vêtue que d'une simple chemise de nuit. La porte de la chambre s'ouvrit sur le comte. Il dévisagea sa promise.

«Vous auriez dû frapper, c'est la moindre des choses quand on entre sans y être convié, s'agaça Olympe
-Vous n'avez pas l'air si souffrante à ce que je vois. Ne vouliez-vous juste pas me voir ?
-Cela vous étonne tant que cela ? Je vous croyais plus vif d'esprit, monsieur le comte.
-Ne jouez pas à cela avec moi, Olympe.
-Que voulez-vous ?
-Oh, mais j'étais simplement soucieux, ma chère. Ma promise est souffrante, il est normal que je sois auprès d'elle.
-Ne vous moquez pas de moi, vous n'avez que faire de ma santé.
-Le pensez-vous sincèrement ? Pourquoi croyez-vous que je tienne tant à vous épouser ? Vous comptez pour moi, ma chère Olympe.
-J'ai quelque peine à vous croire, monsieur le comte. Les hommes comme vous sont incapables d'aimer. Vous ne connaissez ni comprenez l'amour et la compassion. Je vous prie maintenant de me laisser, votre présence m'indispose.
-C'est à cause de la fuite de ce révolutionnaire que vous restez enfermée chez vous ?
-Il vous obsède, n'est-ce pas ? Vous sentez-vous toujours obligé de tout ramené sur cet homme ? Ne pouvez-vous pas comprendre le seul fait d'imaginer un futur avec vous est ce qui me rend malade ? s'emporta Olympe»

La rage vint déformer les traits du comte. Il se rapprocha d'Olympe, la regardant droit dans les yeux. La jeune femme soutint son regard, la tête haute. Un sourire moqueur passa sur les lèvres de l'homme.

«J'ai peur, ma chère, que la nouvelle que je me dois de vous annoncer vous indispose plus que vous ne l'êtes déjà. Je n'ai malheureusement d'autre choix que de vous entretenir de l'avancement de notre mariage et qu'il se tiendra désormais dans un mois, le 13 juillet.
-Jean ! apella Olympe en fixant le comte jusqu'à ce qu'un majordome apparût. Veuillez reconduire monsieur le comte. Nous en avons terminé.
-Bien, mademoiselle.»

Le majordome pria Peyrolles de le suivre, laissant la jeune femme seule. Elle s'apprêtait à refermer la porte quand une jeune servante l'appela.

«Mademoiselle ! Un homme vous a fait parvenir cette lettre, l'informa-t-elle en la lui tendant, la noble s'en saisit
-Qui était-il ?
-Il ne l'a pas mentionné, mademoiselle. Il a simplement dit qu'un paysan l'avait arrêté alors qu'il entrait dans la capitale et l'avait prié de vous la remettre.
-Merci, tu peux disposer.»

La domestique laissa la jeune noble seule. Cette dernière claqua d'un geste la porte de sa chambre puis entreprit d'ouvrir la missive. Elle commença à la lire.

"Ma chère Olympe,
J'espère que vous vous portez bien, et que vous ne pensez pas trop à moi. Je vais bien rassurez-vous, j'ai réussi à quitter Paris sans encombre.
Je vous ferez parvenir une seconde lettre dans quelques jours. Si vous souhaitez me répondre, donnez votre lettre à la personne qui vous apporta cette seconde missive.
Nous nous reverrons bientôt, je vous l'assure.

Vôtre, Ronan."

Une semaine passa et Olympe n'avait toujours pas reçu de nouvelles du jeune paysan. Elle en était venue à cesser d'espérer. Depuis son retour du bal, elle n'avait toujours pas quitté son domicile. Ressentant soudainement le besoin de respirer l'air du dehors, la jeune noble se prépara pour flâner dans les rues. Elle erra sans but pendant plusieurs heures. Olympe finit par rentrer. Sur le chemin du retour, un homme vint l'aborder.

«Vous êtes bien mademoiselle Olympe Du Puget ?
-Qui êtes-vous ?
-Je suppose que oui, alors. Tenez, Ronan m'a chargé de vous transmettre ceci. Avez-vous une réponse pour lui ?»

La jeune femme se saisit de la lettre et sortit d'une poche de sa robe une missive.

«Faites-lui parvenir ceci, je vous prie.
-Vous pourrez le faire vous-même, mademoiselle.»

L'inconnu s'éloigna sans rien dire de plus. La jeune femme ouvrit la lettre sur le champ, ne pouvant attendre plus longtemps.

"Très chère Olympe,
C'est avec regret que je vous annonce que je ne peux demeurer plus longtemps dans les alentours de Paris. Les hommes de votre promis sont de plus en plus nombreux et il m'est de plus en plus difficile de les éviter.
Je souhaiterais vous revoir une dernière fois, avant que nos chemins ne se séparent pour toujours. Rejoignez-moi, s'il vous plaît, au Palais Royal.

À jamais vôtre, Ronan"

Sans perdre de temps, la jeune femme se dirigea vers le Palais Royal. Telle fut sa déception en arrivant devant l'édifice quand elle remarqua que son amant ne s'y trouvait pas. Olympe s'apprêtait à rebrousser chemin.

«Olympe !» appela une voix qui venait de derrière une collone

Le jeune paysan en sortit. Il fit signe à la jeune femme de le suivre. Ils s'arrêtèrent dans une rue plutôt sombre. Là, Olympe colla ses lèvres contre celle du jeune homme, le serrant contre son corps et respirant son parfum.

«Comme tu m'as manqué ! murmura la jeune femme
-Tu ? interrogea le paysan, un sourire aux lèvres
-Je suis fatiguée de ce vouvoiement, Ronan. Je t'aime, je ne veux pas te parler comme à un inconnu.
-Tu ne peux pas imaginer à quel point je suis heureux, mon amour.
-Enfuyons-nous. Nous ne pouvons pas être ensemble ici, mais ailleurs nous le pourrons.
-Tu es sûre que c'est ce que tu veux ?
-Je refuse de vivre sans toi, mon amour.»

La Guerre Pour Se PlaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant