𝟑𝟕. 𝐓𝐨𝐧 𝐜𝐨𝐦𝐛𝐚𝐭 𝐞𝐬𝐭 𝐝𝐞𝐬𝐨𝐫𝐦𝐚𝐢𝐬 𝐥𝐞 𝐦𝐢𝐞𝐧

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Mercredi 25 décembre, Séoul, Corée du Sud,

J'ai enfin pu goûter ce qu'est la définition d'une bonne grasse matinée bien méritée. Le contrecoup de l'hôpital — qui n'est pas un mensonge monté de toute pièce et les diverses émotions de la soirée — m'ont fait sombrer dans un sommeil particulièrement profond. Le lit est magistralement divin. Il n'a rien à envier à celui de mon ancienne chambre d'hôpital. Le matelas est certainement un dernier modèle de qualité à mémoire de forme, dans lequel on souhaite s'éterniser à jamais. Les draps sentent le doux parfum de la lavande, contrastant avec l'odeur de désinfectant et de stérilisation des hôpitaux.

Mais ce qui est encore plus agréable pour cette première nuit en dehors de ma chambre hospitalière, n'est autre que mon petit-ami, blotti dans mes bras et agrippé à moi tel un koala accroché à son arbre. Je souris en prenant conscience que c'est notre première nuit dans notre chambre, dans notre appartement, dans notre lit. Je souris, en le contemplant dormir, le visage parfaitement logé dans le creux de mon cou — comme si c'était sa place destinée depuis toujours — faisant répandre dans ma poitrine une chaleur indescriptible.

Mes cils battent dans la faible obscurité de la chambre, doucement éclairée par une forte lueur blanche provenant de l'extérieur, et partiellement diffusée dans l'entièreté de la pièce à travers les volets fermés, je ne peux me résoudre à admirer son visage angélique. Je n'ose pas bouger d'un millimètre, la chaleur de son corps s'étant imprégnée à la mienne, et même si je crève de chaud, je ne bronche pas une seule seconde.

J'aurais pu le dégager sans montrer la moindre gêne, me séparer de lui pour sentir l'air frais me rafraîchir le corps de cette ébullition qu'est son enveloppe charnelle, digne d'un radiateur ambulant. Mais je ne souhaite en aucun cas mettre un terme à cette scène, même si j'allais pouvoir la vivre, encore et encore, chaque matin aux côtés de l'homme de ma vie. Alors, pour combler l'attente de son réveil, j'ai récupéré mon téléphone, qui tient en équilibre sur le rebord de la table de chevet. J'ai ouvert ma messagerie, qui, à ma plus grande surprise, est chargée de SMS de mon frère, mais également de mes amis, qui sont partis de la maison au petit réveil.

Mais le message qui m'interpelle le plus, est celui de mon frère. Cela faisait tant d'années que je ne l'avais pas vu en chair et en os, que lorsqu'il est venu me rendre visite à l'hôpital je ne l'ai pas reconnu dans l'immédiat. Tant d'années que nous nous n'étions pas échangés un seul message, car il était parti comme un voleur du jour au lendemain, sans m'avoir dit au revoir, sans m'avoir dit qu'il m'aimait.

Si je suis au courant de sa situation sentimentale, de sa stabilité financière et de l'emploi qu'il tient à temps plein au sein d'un restaurant gastronomique, c'était tout simplement grâce à ma mère, qui avait réussi à rentrer à nouveau en contact avec lui, malgré la distance qui les séparait. Depuis son départ, il n'y avait pas un seul jour où je ne pensais pas à lui, où je me demandais s'il aimait réellement sa vie à Paris, avec sa femme. Et surtout, si je lui manquais, comme il me manquait à moi.

Ma tension monte, et je me décide enfin à ouvrir son message après quelques minutes de réflexion.

Asaël : Salut frangin, j'espère que tu vas bien ? Je sais que je ne t'ai pas envoyé beaucoup de messages depuis que je t'ai rendu visite à l'hôpital. La mort de maman, ta tentative de suicide, m'ont bouleversé, et je me suis dit que tu devais certainement m'en vouloir pour tout ce qui s'est passé depuis mon départ.

Cependant, je tiens à t'adresser ces derniers mots depuis l'aéroport, en attendant mon vol pour rentrer en France. Je me suis dit que c'était le moment ou jamais de te dire ce que j'ai sur le cœur. De te dire ce que je suis incapable de te prononcer à voix haute.

A Nos Âmes ÉcorchéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant