Chapitre 7 19/07/2022

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Sept mois plus tard.

Une silhouette tournait lentement en écartant les bras. L'homme au crâne rasé portait des oreillettes sans fil. Il avait baissé les paupières pour se concentrer sur une chanson d'Aerosmith ! Ses mouvements ralentirent, il abaissa les bras, posa un genou à terre pour ne plus bouger.

Franco appartenait au Bulldog, clan de Navarre. Il accompagnait les livraisons de fonds d'herbe, toutes sortes de produits illicites en Nouvelle-Aquitaine ! L'espagnol en débardeur n'occupait pas le poste de chauffeur, mais de voiture bélier ! Il devait franchir la distance de deux cent quarante kilomètres séparant San Sébastian de Bordeaux en un minimum de temps. Par autoroute, cela approchait une heure cinquante ! Franco dépassait rarement les deux heures quarante-cinq par la nationale. Impossible vous pensez ! Le rôle du véhicule bélier avait pour but d'ouvrir le passage au transporteur !

La seconde musique lui fit battre des bras en tapotant le sol de la crosse de ses fusils mitrailleurs. Il adorait ACDC. Il ouvrit les paupières en se relevant. Le tueur battait le rythme en hochant le visage. Un sourire sadique se dessina sur ses lèvres alors qu'il tapait le sol de ses bottes. Il tourna sur lui-même pour observer la façade avec colonnes, ouvertures et statues de la mairie de Bordeaux. Le Palais Rohan était en retrait de cette façade protectrice et au fond d'une cour d'honneur. Un jardin ouvert au public appelé « Jardin de la Mairie » se trouvait à l'arrière donnant sur le Cours d'Albret et le quartier Meriadeck. Sa demi-sœur Bernadette était bordelaise ! Il détourna le regard pour contempler la place Pey-Berland. Peu était au courant que la place tenait son nom de l'archevêque de Bordeaux en quatorze cent trente. La tour Pey Berland proposait une vue imprenable sur les alentours. Il s'était accoutumé aux gémissements permanents. L'attroupement de morts-vivants sur le devant de la cathédrale Saint-André indiquait la présence de survivants à proximité.

Elle avait servi de magasin à fourrage au moment de la Révolution, triste destinée pour ce monument ayant subi un incendie dévastateur au XIXe siècle. L'espagnol concentra son attention sur la horde de morts-vivants se mouvant maladroitement dans le relief de la place. Comment une telle entité pouvait-elle exister ? Quelle raison avait décidé Dieu à leur donner existence ?

Franco exerçait avec professionnalisme son travail !

Les morts n'étaient que des dommages collatéraux. Il apportait la marchandise d'un point A au point B, rien de plus, rien de moins. Donner la mort ne lui apportait aucune satisfaction. Les policiers pouvaient sans le désirer tuer des victimes innocentes, lui, c'était du pareil au même. Qu'est-ce qui les différencier ? Eux étaient payés par le contribuable, lui par la mafia espagnole.

Le transporteur n'avait que deux règles dans la vie, rester le plus rapide, atteindre les six millions avant sa retraite... ses cinquante ans ! Le premier restait incertain, les nouvelles technologies routières proposaient sans cesse de nouvelles opportunités ! La seconde serait dure à atteindre sans apporter un supplément monétaire. Il fallait être patient ! Il volerait un jour le règlement complet d'une livraison. Le seul handicap restait Bernadette. Il n'avait pas encore trouvé de lieu sécurisé permanent. Elle n'était heureusement pas encore mariée.

Bernadette était sa seule famille. Leur père avait été assassiné dans un règlement de compte entre clans. Leur mère respective était décédée, l'une d'un cancer, l'autre d'un accident de la route. Un caillou lancé dans le vide le coupa de ses pensées.

— César, s'exclama-t-il en regardant son partenaire portant une lampe torche fixé à un casque court. Cesses de jouer !

Le chimpanzé le fixa longuement les yeux exorbités.

— Ha, ha, ha, ha, éclata de rire l'espagnol en visant la route en contrebas pour tirer en rafale.

Des zombis gesticulèrent en écho de ses tirs. Ils levèrent ensuite leurs têtes dans sa direction.

— Hooooo, poussèrent-ils dans un long gémissement.

— Hooooo, les imita-t-il.

Le singe sautilla en balançant les bras.

— T'as faim, César ?

Le chimpanzé hocha positivement la tête en souriant bêtement.

— On a mérité une bonne grillade, annonça-t-il en approchant d'un sac réfrigéré.

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